Donald Trump achève la destruction de la recherche climatique

En supprimant les financements publics, en faisant pression sur les scientifiques, en menaçant les mécènes du climat, le président américain affiche sa négation des désordres du climat.

Claude-Marie Vadrot  • 14 mai 2018
Partager :
Donald Trump achève la destruction de la recherche climatique
© Photo : Alex Edelman / Consolidated News Photos / DPA

Discrètement, et sans autoriser les responsables de la NASA à en expliquer les raisons politiques et idéologiques, le président américain vient de faire supprimer un programme scientifique destiné à surveiller et à mesurer l’évolution des proportions de gaz carbonique et de méthane présents dans l’atmosphère de la terre. L’administration présidentielle, poursuivant l’organisation de la négation du réchauffement climatique, a mis fin au Carbon Monitoring System qui devait permettre à la NASA, grâce à ses mesures, de modéliser l’évolution des gaz à effet de serre et leurs effets à venir sur le climat si les émissions ne sont pas rapidement stabilisées ou réduites.

Ce programme, dont tous les climatologues attendaient les résultats, ne représentait pourtant qu’une modeste dépense d’une dizaine de millions d’euros ; mais elle illustre la suppression silencieuse et progressive de tous les programmes et de toutes les recherches liés à l’évolution du climat. Même lorsque cela concerne le territoire des États-Unis. Non seulement Donald Trump est sorti de toutes les obligations de l’accord de Paris, mais son gouvernement ne participe plus au financement du GIEC qui connaît, en conséquence, des difficultés de fonctionnement. D’autant plus que la plupart des scientifiques américains qui y contribuent, de façon bénévole comme tous les autres, subissent des pressions de plus en plus fortes de la part de l’administration fédérale, notamment de l’Agence pour l’environnement toujours dirigée par un climato-sceptique notoire.

Au moins 20 universités sanctionnées

Une vingtaine d’universités américaines, dont la plupart des spécialistes du climat sont entrés en rébellion contre les théories officielles, se sont vues mettre le marché en main : ou elles renoncent à financer ou à aider les programmes de recherche sur la climatologie, le réchauffement et ses conséquences, ou bien elles verront leurs financements réduits ou supprimés. Des pressions efficaces s’exercent aussi sur les mécènes qui participent à ces financements par le biais de leurs Fondations. Des chantages qui commencent à toucher tous les laboratoires, officiels ou privés. Notamment ceux qui se préoccupent de la montée du niveau des mers et du recul des côtes. Y compris ceux qui affectent déjà, depuis la Floride jusqu’aux États nord est du pays, des centaines de kilomètres de rivages qui subissent des inondations marines quasi permanentes. En fait, pour le président Trump, la question climatique ne doit plus exister puisqu’il s’agit d’une « invention ».

Pour éviter les paniques ressenties par les habitants de ces États américains menacés, les informations prévisionnelles encore fournies par des centres de recherche, ne sont plus publiées. En outre, le programme de mesure de l’évolution des quantités de gaz à effet de serre émis par les industries américaines ne fonctionne plus, considéré comme « inutile ». En fait, tout un pan de la recherche du pays, qu’il concerne seulement les USA ou le reste du monde, est en train de disparaître. Situation qui remet en cause toute la recherche climatique à laquelle les savants américains consacraient de gros efforts depuis des années.

…Et la France ne dit plus grand chose

L’administration américaine est efficacement secondée, dans cette disparition de la préoccupation climatique, par les parlementaires Républicains, au Sénat et à la Chambre des représentants qui, procèdent régulièrement à des coupes ou des gels dans tous les programmes scientifiques. Cette négation de l’importance de la recherche, climatique ou autre, ne sera pas compensée par l’accueil de quelques savants organisé par le président français dont la préoccupation sur le réchauffement est en train de faiblir comme le montrent les discussions en cours à Bonn pour préparer la prochaine conférence sur le climat qui se tiendra cet automne en Pologne. Avec la complicité des autorités polonaises qui ne tiennent pas à ce que leur recours grandissant au charbon soit remis en cause.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

A69 : des usines à bitume irritent les riverains

Reportage 10 décembre 2025 abonné·es

A69 : des usines à bitume irritent les riverains


Depuis cet automne, deux usines pour fabriquer l’enrobé de l’A69 ont été installées à proximité du tracé. Les potentiels rejets de substances toxiques inquiètent des riverains, qui ont conçu leurs propres capteurs d’air.
Par Vanina Delmas
A69 : les cinq enjeux d’une audience cruciale
Décryptage 10 décembre 2025 abonné·es

A69 : les cinq enjeux d’une audience cruciale

Une audience cruciale est prévue à la cour administrative d’appel de Toulouse ce jeudi 11 décembre pour acter ou non la poursuite du chantier de l’A69. Décryptage des principaux enjeux.
Par Vanina Delmas
Valérie Masson-Delmotte : « Les questions de climat et d’énergie sont les premiers marqueurs de la désinformation » 
Entretien 10 décembre 2025 abonné·es

Valérie Masson-Delmotte : « Les questions de climat et d’énergie sont les premiers marqueurs de la désinformation » 

Il y a dix ans, lors de la COP 21, 196 pays s’engageaient dans l’accord de Paris à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) pour contenir le réchauffement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Depuis, la climatologue ne ménage pas son temps pour faire de la vulgarisation scientifique et reste une vigie scrupuleuse sur la place des faits scientifiques.
Par Vanina Delmas
« La Syrie sous Assad était un régime du silence »
Entretien 8 décembre 2025 abonné·es

« La Syrie sous Assad était un régime du silence »

Un an jour pour jour après la chute du régime de Bachar Al-Assad, Arthur Sarradin, journaliste et écrivain, revient sur les traumatismes d’une Syrie effondrée après quatorze années de guerre civile.
Par William Jean