Associations : Qui veut la peau d’Anticor ?

L’association s’inquiète notamment de la prolongation de l’instruction de sa demande d’agrément.

Erwan Manac'h  • 17 février 2021
Partager :
Associations : Qui veut la peau d’Anticor ?
© Jérémie Lusseau/AFP

Tout mélanger, bien agiter et répandre allégrement. C’est la recette de la cabale qui monte ces derniers jours contre Anticor. L’association qui vient d’obtenir l’ouverture d’une instruction pour « prise illégale d’intérêt » contre le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, s’inquiète de la prolongation de deux mois de l’instruction de sa demande d’agrément. Ce sésame, dont elle a besoin pour se constituer partie civile dans des affaires de corruption, risque de lui être retiré.

Lire > Lutte contre la corruption : Prière de ne pas déranger

Coïncidence frappante, les griefs sont listés, en vrac, par deux hebdomadaires réputés proches du pouvoir, Le Point et Le JDD. Ils pointent notamment la confidentialité entretenue par Anticor sur l’identité d’un généreux donateur (60 000 euros en 2020), qui pourrait lui être reprochée au nom d’un « manque d’indépendance ».

Les articles s’intéressent également au violent conflit interne qui secoue l’association depuis un an et demi. Un groupe de 9 ex-administrateurs sur 21 (dont 2 sont toujours élus) accuse en effet la présidence d’autoritarisme et regrette que son projet de réforme des statuts ait été écarté : « Pour protéger Anticor des critiques politiques, nous proposions que les membres du CA ne puissent pas avoir d’engagement politique ou militant et ne puissent pas être magistrats en exercice », indique l’ancienne élue (PS puis Parti de gauche) Françoise Verchère, reconnue pour son combat contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes et figure de proue de la fronde interne à Anticor.

Depuis la démission du président Jean-Christophe Picard pour candidater aux municipales sur une liste écolo à Nice, deux camps sont à couteaux tirés dans une guerre interne aux multiples rebondissements qui finira devant le comité d’éthique interne et les tribunaux. Plus récemment, l’engagement de la présidente, Élise Van Beneden dans le lancement de Blast, web-TV d’investigation autour du turbulent Denis Robert, viré du Media en octobre, électrise ceux qui dénoncent une « politisation » du mouvement.

Une certaine presse compte les points et la macronie se frotte les mains. « Qu’Anticor vive, c’est indispensable », tranche pourtant Françoise Verchère, regrettant que cette discorde télescope la procédure d’agrément. Élise Van Beneden dénonce, elle, une « campagne de calomnies » articulée autour d’un conflit de « démocratie interne » et s’interroge : « Est-ce pour me déstabiliser moi, flinguer Anticor ou légitimer un refus d’agrément ? » Récemment, les affaires Ferrand et Kohler ont été relancées par l’association après un classement sans suite.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

À Nantes, la socio-esthétique apaise les corps des demandeurs d’asile
Reportage 2 décembre 2025 abonné·es

À Nantes, la socio-esthétique apaise les corps des demandeurs d’asile

Bulle de douceur, le travail de la socio-esthéticienne du centre d’accueil des demandeurs d’asile complète l’approche des travailleuses sociales en redonnant au corps la place centrale qu’il mérite, et à la personne, un temps pour soi.
Par Elsa Gambin
Budget : le (très) décevant rapport sur l’imposition du patrimoine      
Analyse 2 décembre 2025

Budget : le (très) décevant rapport sur l’imposition du patrimoine      

Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a rendu, ce 1er décembre, un volumineux rapport sur l’imposition du patrimoine. Si celui-ci dresse le constat d’une imposition « très inégalitaire », ses recommandations restent, dans l’ensemble, peu ambitieuses.
Par Pierre Jequier-Zalc
29 novembre : en France, une unité nationale inédite mais tardive de solidarité avec la Palestine
Mobilisation 28 novembre 2025

29 novembre : en France, une unité nationale inédite mais tardive de solidarité avec la Palestine

Ce samedi de Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, une manifestation nationale rassemblera à Paris plus de 85 organisations : associations, syndicats et l’ensemble des partis de gauche. Une configuration inédite depuis le 7 octobre 2023, la plupart des structures politiques restant jusqu’ici en retrait ou divisées lors des mobilisations. Des rassemblements ont aussi lieu sur tout le territoire.
Par Caroline Baude
Dissolution d’Urgence Palestine : face aux rapporteurs spéciaux de l’ONU, la France botte en touche
Répression 28 novembre 2025

Dissolution d’Urgence Palestine : face aux rapporteurs spéciaux de l’ONU, la France botte en touche

Fin septembre, le gouvernement français a été interpellé par quatre rapporteurs spéciaux de l’ONU sur les atteintes aux droits humains qu’entraînerait la dissolution d’Urgence Palestine. Politis a pu consulter la réponse du gouvernement, qui évacue les questions, arguant que la procédure est toujours en cours.
Par Pauline Migevant