La prison en question

Daniel Dériot, [lecteur-correspondant de Politis
->http://association.pour-politis.org/] à Chalon-sur-Saône, évoque la la question des prisons en Saône-et-Loire et porte un regard critique sur l’exposition organisée autour de l’histoire des prisons dans le département.

Politis.fr  et  Daniel Dériot  • 25 février 2008
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Jusqu’au 31 mars prochain, la Maison du patrimoine de Chalon-sur-Saône organise une exposition consacrée aux prisons de la ville. Un événement qui a suscité deux publications, l’une sur le thème «Les prisons de Chalon», l’autre étant une brochure de l’exposition. Néanmoins, une certaine discrétion semble régner autour de cette rétrospective qui aurait dû susciter au moins un débat, des rencontres et
pourquoi pas d’ autres manifestations sur les problèmes de l’incarcération, de la justice ou de la réinsertion. Mais la prison demeure un tabou auquel il ne convient de ne pas de toucher, surtout en période
électorale.

Voilà déjà un peu plus d’une vingtaine d’années, le ministre de la Justice, Albin Chalandon, décidait d’implanter un centre pénitentiaire dans la périphérie de Chalon-sur-Saône. Après des débats animés, voire passionnés et pour le moins agités, la prison a été construite à Varennes le Grand, au sud de la ville. La maison d’arrêt de Chalon construite en 1844 ferma donc ses portes en septembre 1991. Ces épisodes de la vie carcérale figurent en bonne place dans l’exposition réalisée et
présentée à la Maison du patrimoine. Déjà en 1844, les débats furent animés, comme le rappellent les «Chroniques chalonnaises» de décembre dernier, une publication entièrement consacrée à la vie des prisons chalonnaises.

Des prisons qui ont été (et sont encore) des « lieux de souffrances. » Certes, rien de commun avec l’enfermement durant la Seconde guerre mondiale, mais ces lieux de privation de libertés demeurent encore des espaces de relégations méconnus de beaucoup. Depuis le 17e siècle, la prison s’est donc installé dans différents sites géographiques de la ville. Une constante toutefois : elle se trouvait toujours au cœur ou en bordure du centre. Sauf pour le centre pénitentiaire, situé tout près de l’autoroute A6, en bordure de forêt. Loin des regards, tout comme les malades qui doivent se rendre au centre psychiatrique voisin, à Sevrey. Enfin, pas de prisons sans évasions et sans exécutions, dont la dernière a eu lieu en 1952, dans la cour.

Avec le concours de photographes, les services de la Maison du patrimoine ont donc édité une brochure distribuée gratuitement à l’occasion de cette exposition. L’histoire des prisons chalonnaise, les contextes historiques nationaux et locaux y sont relatés. Peu de débats autour de l’événement, donc. C’est d’autant plus regrettable qu’une association oeuvrant dans le domaine de l’insertion, l’Apar, vient
de signer une convention avec le Service pénitentiaire
d´insertion et de probation (Spip) et la direction du Centre pénitentiaire afin d’accueillir des détenus munis du bracelet électronique.

Ces actions méritent pour une fois d’étre saluées, encouragées, voire promues. Elles ne sont toutefois pas pleinement satisfaisantes au regard des peines trop longues, de l’absence de volonté et de trop faibles moyens pour l’insertion. Sans oublier que trop souvent, les prisons sont des lieux de dépôt pour les citoyens démunis, précaires et autres exclus.

L’actuel centre pénitentiaire de Varennes le Grand connaît en outre des problèmes de surpopulations : 500 détenus pour 393 places. Ce que dénoncent les syndicats des personnels. N’oublions pas non plus les tentatives de suicide, révélatrices du mal être en ces murs. La question de la dignité d’un détenu demeure, ainsi que la place dans la société pour les ex-détenus. Autant d’aspects évités par l’exposition.

Temps de lecture : 3 minutes
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