« Une candidature de visibilité »

Pascale Ourbih, transexuelle d’origine algérienne, conduit la liste des Verts dans le XVIe arrondissement de Paris.

Olivier Doubre  • 28 février 2008 abonné·es

Entre Passy et la Porte de Saint-Cloud, le XVIe arrondissement de Paris ne présente pas d’enjeu politique réel à gauche. Au deuxième tour de l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy a en effet remporté l’arrondissement avec 82 % des voix. Y conduire la liste des Verts est donc d’abord une candidature de témoignage. « Mais c’est aussi une candidature de visibilité » , corrige immédiatement, non sans enthousiasme, Pascale Ourbih. « Certes, le poids de l’UMP est écrasant, mais, habitante de l’arrondissement depuis 22 ans, je connais beaucoup de gens vivant ici qui, d’ailleurs, souvent découragés, ne vont même plus voter. Dans l’immeuble où je vis, plus de 50 % des habitants occupent des chambres de bonne ou sont sans papiers. »

Aussi, le choix pour les Verts de Pascale Ourbih comme tête de liste aux municipales exprime d’abord leur volonté de mettre l’accent sur un certain nombre de combats. Outre les questions de genre, mises au premier plan avec la candidature d’une transexuelle (dont le sexe « administratif » est masculin), suivie sur la liste, strictement paritaire, par Anne Souyris, porte-parole nationale des Verts, il s’agit d’abord d’insister sur la question du droit de vote des étrangers hors Communauté économique européenne. Pascale Ourbih est en effet française depuis sa naturalisation le 15 février dernier. « Même si , précise-t-elle, le genre indiqué sur mes papiers ne correspond pas à mon identité sociale ! »

Or, la candidate n’a pas l’habitude de baisser les bras. Arrivée d’Algérie en 1980, elle se retrouve assez vite sans papiers. D’abord mannequin, puis silhouette de la nuit parisienne, au Palace, notamment, où « les jeunes créateurs se battaient à l’époque pour nous habiller » , elle voit nombre de ses amies transexuelles algériennes mourir du sida, ce qui l’amènera plus tard à militer à Act Up-Paris. Mais, avec les années 1990 et la montée de l’islamisme en Algérie, celles qui y sont expulsées sont rapidement assassinées après leur retour au pays. Pascale Ourbih se décide alors à demander un statut de réfugiée, d’abord systématiquement refusé par l’Ofpra. Finalement, en 1998, le Conseil d’État le lui accorde, initiant là une jurisprudence qui porte depuis son nom.

Aujourd’hui, Pascale est actrice, et sa candidature est aussi là pour rappeler que le XVIe comprend le Bois de Boulogne et la Porte Dauphine, où nombre de prostitués(e)s des deux sexes travaillent jour et nuit. La liste de Pascale Ourbih, multiple, veut donc représenter cet « autre XVIe » , avec des immigrés, un travailleur du sexe, une anthropologue ou encore Charlotte Nener, conseillère de Paris (Verts). Une liste pour signifier une présence.

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