Concurrence et TIC

Christine Tréguier  • 6 mars 2008 abonné·es

L’enquête de 60 millions de consommateurs sur la hausse des prix dans la grande distribution a donné lieu, la semaine passée, à quelques savoureux moments d’images. Christine Lagarde s’étant réservé les caméras de télévision pour une rapide incursion au Carrefour de Charenton, Luc Chatel s’est rabattu de façon assez inédite sur Internet, avec la diffusion sur DailyMotion d’une vidéo à l’intitulé accrocheur, «Luc Chatel, un ministre en colère». En bras de chemise dans son bureau, notre secrétaire d’État à la Consommation se lâche: «Le gouvernement ne peut pas accepter que distributeurs et industriels s’engraissent sur le dos des consommateurs.» Il exhorte les ménagères à comparer les prix, acheter où c’est moins cher, et promet que le gouvernement va «faire jouer la concurrence au service du consommateur».

Revenons donc, à cette occasion, sur sa loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs (publiée au JO le 4janvier 2008). Va-t-elle empêcher les opérateurs de téléphonie portable, qui ont depuis longtemps amorti leurs infrastructures, de s’engraisser eux aussi sur le dos des abonnés? Selon une étude réalisée par l’UFC Que Choisir, les prix n’ont que peu ou pas baissé entre 2003 et2007. Sur les petits forfaits de 80 à 160 minutes, ils ont même augmenté de 5 à 20%. Les offres se multiplient, mais elles restent opaques et inadaptées à la demande. Et le principal frein à la concurrence est le contrat de 24 mois qui rend l’abonné captif. Des contrats dont l’UFC réclame l’interdiction (comme en Finlande) et que plusieurs pays européens limitent déjà à 6 ou 12 mois. Pas très en colère à l’époque, Luc Chatel s’est laissé convaincre par les opérateurs de ne pas trancher: les abonnés auront le choix entre un contrat de 12 mois et un contrat de 24 mois résiliable moyennant paiement de 25% seulement des échéances restantes.

Sa loi va-t-elle favoriser la concurrence et le pouvoir d’achat, en obligeant les distributeurs et les fabricants d’ordinateurs à commercialiser des ordinateurs sans logiciels préinstallés, et à rembourser les logiciels en cas de non-utilisation? Une demande soutenue en son temps par un député du nom de… Luc Chatel. Non. L’amendement allant en ce sens a été rejeté, et les utilisateurs n’ont aujourd’hui d’autre choix que d’aller en justice pour obtenir remboursement. Trois juges de proximité ont déjà donné raison à des clients mécontents. L’UFC, la CLCV et deux associations du Libre, April et l’Aful, viennent de mettre en ligne un Guide du remboursement et annoncent que les procès vont se multiplier.

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