Génération coup de poing

Une soixantaine de personnes ont assisté, le 19 mai, à la présentation de l’ouvrage *Les nouveaux militants* , dans les locaux du ministère de la Crise du logement, en présence du philosophe argentin Miguel Benasayag. Politis.fr était sur place.

Politis.fr  et  Mathilde Azerot  • 27 mai 2008 abonné·es

Illustration - Génération coup de poing

« C’est une coïncidence. Ça n’a rien à voir avec les quarante ans de mai 68 » , assure Laurent Jeanneau, journaliste et co-auteur des Nouveaux militants , avec Sébastien Lernould. Mais ça tombe bien. Car quelle meilleure occasion que celle de l’anniversaire de l’archétype du mouvement contestataire pour promouvoir un ouvrage consacré… aux nouvelles pratiques militantes ? Une aubaine. Présenté comme étant le fruit d’un travail journalistique, Les nouveaux militants ne prétend pas produire une analyse sociologique des mouvements contestataires. Il se lit comme on lit un -bon- reportage, illustré par un reportage-photo réalisé par Pierre-Emmanuel Weck, photographe et militant à ses heures. L’ouvrage brosse avec exhaustivité le paysage actuel des mouvements sociaux qui s’inscrivent pour la plupart dans la dynamique amorcée au printemps 2006 par le mouvement anti-CPE.

Qui sont ces « nouveaux » militants ? Des jeunes, passés maîtres dans l’art de la communication, affichant une propension à la surexposition médiatique, gage de l’existence et de la popularité de leurs revendications. Ils présentent une affection assumée pour le spectaculaire et les opérations coup de poing. Voilà pour l’essentiel. « Ils veulent inciter les politiques à faire leur travail , explique Sébastien Lernould, leur but est de changer la loi » . Et non pas de changer la face du monde. Il n’est plus question d’ériger des théories globales fondées sur des idéologies partisanes. « Dans les années 70 , analyse Miguel Benasayag, qui s’exprime dans un entretien en postface du livre, le problème était que toutes les expériences de contre-culture ont été éclipsées par l’idée qu’il fallait prendre le pouvoir pour changer le monde. Qu’il fallait le changer par le haut. Cette hypothèse s’est épuisée, elle s’est cassée la gueule » . Exit donc le modèle de lutte traditionnel usité par leurs aînés, la nouvelle génération s’émancipe et aspire à une redéfinition des modes d’action collective.

« Il y a un pont avec la génération précédente , relève malgré tout Laurent Jeanneau, il y a une ressemblance sur la forme, mais une rupture sur le fond. On est face à des groupes monothématiques et pragmatiques qui n’attendent plus le grand soir » . Des jeunes de Génération précaire, mobilisés pour faire entendre la voix des stagiaires, à ceux du collectif Jeudi Noir, porte-parole des mal-logés, en passant par les Enfants de Don Quichotte ou par le Réseau éducation sans frontières, tous réclament à l’unisson la justice sociale. Mais à chacun sa cause.

A l’image de la BAC, la Brigade activiste des clowns qui sème le rire et remet la pitrerie au service de la subversion, ils sont inventifs, provocateurs, prônent la dérision et l’humour. L’engagement rime désormais avec plaisir et bonne humeur et non plus avec dévotion et « remise de soi ». Mais, prévient Miguel Benasayag, « il faut toujours éviter le simplisme et le spectaculaire. Vouloir la justice, c’est sérieux, on peut le faire dans la joie, mais c’est un boulot sérieux » . Derrière la mise en scène et une apparente légèreté de ton, c’est bien de combat politique dont il s’agit.

Temps de lecture : 3 minutes