Prémisses d’un front

Dix organisations de gauche, dont le PCF, le NPA et le PG, ont signé une déclaration de soutien à la journée nationale de grèves du 29 janvier. Un texte en forme de plateforme…

Michel Soudais  • 29 janvier 2009 abonné·es

La dispersion de la gauche de gauche n’est pas fatale. « L’heure est à la riposte » , proclament dix organisations, dont le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), le Parti communiste français (PCF) et le Parti de gauche (PG), dans une déclaration unitaire de soutien à la journée nationale d’actions de ce jeudi [^2]. Intitulée « Ce n’est pas à la population de payer la crise », celle-ci devrait logiquement conduire les signataires à se retrouver, au-delà du 29 janvier.

Illustration - Prémisses d’un front

Olivier Besancenot (NPA), Francis Parny (PCF) et Jean-Luc Mélenchon (PG) lors de la conférence de presse du 27 janvier. Fife/AFP

L’accord s’est fait d’abord sur un constat partagé : « Les classes populaires sont durement touchées par la crise. La politique du pouvoir est plus que jamais au service des privilégiés » , affirment les signataires en dénonçant « un véritable plan de mutation libérale et de privatisation qui s’accentue avec les suppressions d’emplois publics » . S’ils se réjouissent que « les grèves et manifestations comme celles du 29 janvier expriment les colères et amplifient les luttes » , ils estiment qu’ « une riposte populaire d’ensemble est urgente » et s’engagent en conséquence « à mettre toutes [leurs] forces au service de la convergence des luttes contre les licenciements, la vie chère, le chômage et la précarité, et pour la défense et l’élargissement des services publics ».
Appelant à se « mobiliser pour une Europe sociale, écologique, démocratique, féministe » , ils estiment qu’ « une autre politique est possible, en s’attaquant aux profits et à la spéculation financière, en remettant en cause la rémunération du capital » . Parmi leurs propositions, figurent notamment l’augmentation des salaires, du Smic, du minimum vieillesse et des minima sociaux, « l’annulation du paquet fiscal de l’été 2007 » , une réforme de la fiscalité des entreprises ou la « remise en cause du pacte de stabilité et des directives européennes de privatisation » . Les organisations affirment aussi leur opposition aux licenciements et « exigent l’annulation des 30 000 suppressions de postes décidées » dans le secteur public en 2009, « le retrait de la privatisation de la santé, la création d’emplois socialement utiles ».
Un peu plus de trois semaines ont été nécessaires pour mettre au point cette déclaration. Tandis que le PCF éprouvait la volonté unitaire du NPA, ce dernier jaugeait l’engagement du parti de Marie-George Buffet. Le texte final garde des traces de cette longue gestation : les signataires, y lit-on, s’inscrivent « dans les prochaines mobilisations de janvier (sic), Éducation nationale le 17, santé et hôpital Public le 24, grève interprofessionnelle et manifestations de masse du 29 janvier ».
Le 20 janvier, quelques heures avant une ultime réunion, Olivier Besancenot, anticipant un peu vite un échec, déplorait que les partis à la gauche du PS « ne [soient] actuellement pas capables d’écrire un texte commun sur les licenciements » dans la perspective de la mobilisation interprofessionnelle du 29 janvier, pour conclure à l’impossibilité de faire « un front politique durable » aux européennes.
A contrario, l’accord réalisé ouvre-t-il la voie à la constitution d’un tel front de gauche ? Marie-George Buffet le croit : « Aucun travailleur en lutte aujourd’hui ne comprendrait qu’alors que ces élections vont être un moment essentiel pour contester le libéralisme et porter une alternative, que les convergences du 29 janvier ne se poursuivent pas dans l’élaboration d’un véritable front aux européennes de juin prochain » , a-t-elle déclaré lundi. On ne connaissait pas alors la réponse d’Olivier Besancenot mais, estimaient plusieurs signataires, le NPA, après avoir signé un tel programme de mesures d’urgence, pourrait difficilement refuser de le porter sur le terrain électoral avec ses cosignataires.

[^2]: Les autres signataires sont : AlterEkolo (AE), Alternative démocratie socialisme (ADS), Alternative libertaire, Association des communistes unitaires (ACU), Coordination nationale des collectifs unitaires pour une alternative au libéralisme (CNCU), Les Alternatifs, Parti communiste des ouvriers de France (PCOF).

Politique
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