Loin du compte

Après une longue mobilisation, le gouvernement recule un peu. Les enseignants ne cèdent rien.

Jean-Claude Renard  • 19 mars 2009 abonné·es

Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche mise sur la confusion en saucissonnant les dossiers, et tente de diviser les syndicats. Il n’en fait pas moins face à une mobilisation toujours solide, qui dure depuis bientôt deux mois, inédite par son ampleur et son caractère unitaire. Mercredi 11 mars, opposés aux réformes prévues pour la rentrée 2009, ils étaient encore près de 50 000 à manifester à travers la France (lycéens, étudiants, enseignants). Un revers pour un ministère qui vise le pourrissement et l’essoufflement de la grogne.

Pas dupes, les enseignants, devant une politique qui cherche à sabrer l’éducation, réduire son budget. Face à l’absence de réponses claires de Xavier Darcos et de Valérie Pécresse, les motifs ne manquent pas à la mobilisation : l’obtention d’un plan pluriannuel de création d’emplois dans le supérieur et la recherche, la restitution des emplois supprimés en 2009, le refus du contrat doctoral unique et celui de voir démanteler le CNRS et l’Inserm.

S’y ajoute le mécontentement autour de la réforme sur la formation et le recrutement des enseignants du premier et du second degrés (soutenus par les universitaires), baptisée « masterisation ». C’est-à-dire un concours après un master (bac + 5) et non plus seulement une licence, qui répondrait à la suppression des IUFM (qui alternaient stages et cours). Un ­enseignement en fac, donc, sur deux ans avant concours, ponctués de stages épars. Une formation sans pédagogie, avec de nouveaux enseignants sans expérience (et que deviendront les étudiants ayant raté le concours, déjà dénommés « reçus-collés » ? Un vivier d’enseignants précaires, à coup sûr).

Pour l’heure, le gouvernement lâche un peu de lest. Renonçant à la suppression des postes prévue en 2010 et 2011 dans les universités, assurant une modulation de l’emploi du temps des universitaires (enseignement/recherche) avec l’accord des intéressés, et un décret en cours de réécriture. Pas plus. Pour le premier et second degré, ce n’est pas mieux. Xavier Darcos a convenu d’appliquer la réforme graduellement dans le temps, en 2009-2010, et son aboutissement à l’occasion des concours 2011. Pour mieux préparer les nouvelles formations, les présidents d’université ont réclamé un report d’un an. En vain.

En guise de concessions, le ministre promet des stages d’observation rémunérés, étendus sur 108 heures en première et deuxième année de master. En jeu, c’est évidemment une formation réduite à peau de chagrin et des enseignants au casse-pipe. Loin du compte espéré. Et autant de raisons qui verront les mêmes acteurs s’ajouter aux cortèges interprofessionnels du 19 mars.

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