L’hôpital, un luxe ?

L’augmentation du forfait hospitalier part du principe que c’est au malade de payer le déficit de la sécu.

Thierry Brun  • 10 septembre 2009 abonné·es

Une hausse du forfait hospitalier, qui passerait de 16 à 20 euros, serait donc en gestation, au motif éculé qu’il faut réduire le déficit de l’assurance-maladie. La méthode employée pour tester une augmentation de ce forfait acquitté par les malades pour chaque journée passée à l’hôpital est d’un grand classicisme. Une note interne entre Bercy et le ministère de la Santé est éventée par voie de presse, et une poignée de ministres réagissent, la plupart du temps pour expliquer qu’il ne s’agit là que d’une des « pistes » pour réduire le déficit de l’ensemble des branches (retraite, famille, maladie et accidents du travail), soit près de 30 milliards d’euros en 2010, selon l’estimation gouvernementale.

La manœuvre valide ainsi l’idée qu’il n’y aurait que les malades pour financer l’assurance-maladie, à quelques semaines de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2010. Le ministre du Budget, Éric Woerth, ne peut cependant ignorer que ce forfait n’a jamais cessé d’augmenter. En passant de 10,67 euros à 13 euros par jour (plus 22 %) en 2004, puis à 14 euros en 2005, 15 euros en 2006 et enfin 16 euros en 2007, il n’a pas résolu le problème des recettes de l’assurance-maladie. Une hausse de 25 % du forfait hospitalier « reviendrait à facturer 600 euros pour un malade hospitalisé un mois, ce qui augmente de façon exorbitante le reste à charge des malades » , dénonce l’Unsa. « Ces orientations risquent d’aggraver encore les difficultés d’accès aux soins sans apporter une réponse adaptée, solidaire et pérenne à la dérive de l’assurance-maladie » , estime la Fnath, association des accidentés de la vie. « Le gouvernement feint de croire que les malades seront remboursés par leur complémentaire, alors que 7 % des Français n’ont pas les moyens de s’en payer une, et que toutes ne remboursent pas le forfait » , déplore pour sa part la Fédération syndicale unitaire (FSU).

Syndicats et associations ont rappelé à la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, qu’une étude publiée par l’Insee en octobre 2007 a démontré la part importante de la situation financière dans l’inégalité d’accès aux soins. Et Bercy ne dit mot sur les exonérations de cotisations patronales qui ont représenté plus de 30 milliards d’euros en 2008, selon une estimation de la commission des comptes de la Sécurité sociale. Il semble aussi oublier que la Cour des comptes a suggéré en 2007 de soumettre à cotisations sociales les plus-values des stock-options dont bénéficient cadres et dirigeants de grandes sociétés, ce qui, en 2005, aurait pu rapporter 3,2 milliards d’euros à la Sécurité sociale.

Santé
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Devant une usine de pesticides BASF, paysans, malades et médecins dénoncent « une guerre chimique »
Reportage 17 novembre 2025 abonné·es

Devant une usine de pesticides BASF, paysans, malades et médecins dénoncent « une guerre chimique »

À Saint-Aubin-lès-Elbeuf en Seine-Maritime, une action d’infiltration a été menée ce 17 novembre dans une unité du géant industriel allemand, pour dénoncer la fabrication de produits interdits en Europe, tel le fipronil.
Par Maxime Sirvins
Sécurité sociale : le musée des horreurs du gouvernement
Austérité 4 novembre 2025

Sécurité sociale : le musée des horreurs du gouvernement

Si le projet de loi de financement de la Sécurité sociale a été rejeté en commission des Affaires sociales, les débats en séance pourraient ressusciter certaines mesures éruptives. Attention, la troisième va vous surprendre !
Par Lucas Sarafian
Dans la Loire, le médicobus arpente les déserts médicaux
Reportage 17 octobre 2025 abonné·es

Dans la Loire, le médicobus arpente les déserts médicaux

Dans l’agglomération de Roanne (42), un cabinet médical mobile propose des consultations sur les places de plusieurs villages. À son bord, défilent des habitants de tous les âges privés d’accès à un médecin traitant et témoignant de leurs difficultés face à un système de santé défaillant.
Par Baptiste Thomasset
Lutte contre les pesticides : « On a l’impression que tout est fait pour que ça traîne »
Entretien 16 septembre 2025 libéré

Lutte contre les pesticides : « On a l’impression que tout est fait pour que ça traîne »

L’Anses et Santé Publique France ont publié une nouvelle étude sur les pesticides. Mais elle ne s’intéresse pas aux liens avec les pathologies, pourtant primordial. Entretien avec Pierre-Michel Périnaud, président de l’association Alerte des médecins sur les pesticides.
Par Caroline Baude