La Dame de trèfle

Politis  • 14 janvier 2010 abonné·es

Le thème du frère et de la sœur inséparables, fusionnels, est au cœur du 4e long métrage de Jérôme Bonnell, la Dame de trèfle. Argine (Florence Loiret Caille, toujours très étonnante) est une jeune femme marginale, incontrôlable, préférant être sans emploi plutôt que de faire « un boulot de con avec des cons »  ; ce qui oblige son frère, Aurélien (Malik Zidi), non seulement à travailler chez un fleuriste mais à arrondir les fins de mois en participant à des vols de métaux. C’est par ce biais qu’à la chronique amoureuse – mais pas incestueuse – du frère et de la sœur s’ajoute une intrigue de film noir, avec des êtres violents ou inquiétants (Jean-Pierre Darroussin et Marc Barbé). La réussite du film tient dans cette double narration, qui voit notamment le rapport entre la sœur et le frère s’inverser, le second, a priori plus raisonnable que la première, s’abîmant dans une violence presque fatale.

Éric Rohmer

Au moment où nous bouclons ce numéro, nous apprenons la mort, à 89 ans, d’Éric Rohmer. L’aîné des « Jeunes Turcs » des Cahiers du cinéma , devenu ensuite l’aîné des cinéastes de la Nouvelle Vague, a marqué le cinéma par ses œuvres subtiles, du Genou de Claire aux Nuits de la pleine lune , où la profusion rhétorique s’allie avec bonheur aux aventures du cœur.

La Terre de la folie

Dans les Préalpes du Sud, sur un périmètre circonscrit entre cinq bourgs – que Luc Moullet nomme le « Pentagone »  –, se trouve « la Terre de la folie » , titre de son dernier film. C’est là que le cinéaste a rencontré des habitants qui lui racontent plusieurs histoires de meurtres commis dans cette région par des assassins aux comportements saugrenus. L’effet d’accumulation de ces récits et l’éternel côté pince-sans-rire de Luc Moullet finissent par déclencher une hilarité certaine alors que le sujet abordé est on ne peut plus tragique, et les faits bien établis. La Terre de la folie instille ainsi le doute : et si ce « Pentagone de la folie » avait quelque chose de fondé ? Et si derrière le rire il y avait une réalité ? Voilà du cinéma qui ne tranche pas vraiment entre le lard et le cochon, et qui, mine de rien, donne de la complexité à ce que l’on réduit souvent à des manichéismes. Étonnant, non ?

Culture
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