Le délinquant de l’Intérieur

Malgré la gravité des faits pour lesquels il est condamné, eu égard à sa fonction, il la conserve cependant. Au seul titre d’homme-clé du système sarkozyste ?

Michel Soudais  • 6 janvier 2011 abonné·es

Comment un délinquant récidiviste peut-il être en charge de nos libertés et de notre sécurité ? Comment un homme convaincu de racisme et qui fait preuve d’un souverain mépris de la justice peut-il rester à la tête d’un ministère (l’Intérieur) qui, François Bonnet et Marine Turchi le rappelaient récemment sur Mediapart, « doit symboliser l’État, sa compétence, sa qualité, son impartialité, son écoute »  ? Son maintien à ce poste, poursuivaient nos confrères, « n’est pas seulement angoissant » , il est aussi « anormal et dangereux, pour nous, pour l’État et pour nos institutions » . Et c’est bien pour cela qu’après chacune de ses condamnations des voix se sont élevées pour demander sa démission. À gauche, mais pas seulement.

Le 17 décembre, l’Union syndicale des magistrats et le Syndicat national des officiers de police, majoritaires dans la magistrature et la police, ont signé, fait exceptionnel, un appel commun réprouvant la réaction du ministre de l’Intérieur après la condamnation par le tribunal de Bobigny de sept policiers coupables de faux témoignages : « Il n’est plus possible, écrivaient-ils, que des polémiques stériles et des critiques inopportunes, fondées sur de purs calculs politiques, sapent constamment l’autorité de l’État, au plus grand bénéfice des délinquants. »

À ce jour, pourtant, Brice Hortefeux est toujours à son poste. Certes, le Premier ministre lui a bien adressé deux remontrances cet automne. Mais à l’Assemblée nationale, le 21 décembre, le même François Fillon a défendu le maintien de M. Hortefeux à son poste contre la gauche, qui demandait son départ. C’est que l’ancien ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale est l’homme du Président. Premier directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy à la mairie de Neuilly, de 1983 à 1986 – il n’avait pas fini ses études –, il ne l’a plus quitté depuis. Et au poste qu’il occupe, cet homme-clé du système sarkozyste s’apprête à mettre toutes les ressources de l’État au service de la campagne électorale de son ami de trente ans. Peu importe à ce dernier que la « République exemplaire » qu’il vantait en 2007 ait le visage d’une république délinquante. Si c’est le prix de sa réélection…

Publié dans le dossier
L'art d'enterrer les affaires
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