Italie : La surprise Beppe Grillo

Pas de majorité au Sénat, le centre-gauche en tête à la Chambre, un résultat inédit.

Olivier Doubre  • 28 février 2013 abonné·es

Ingouvernabilité. C’est le mot le plus prononcé au cours de la longue soirée électorale, lundi 25 février. Les électeurs n’ont en effet désigné aucune majorité nette. Du moins au Sénat, où des alliances post-électorales tenteront de résoudre une situation inédite en Italie. À la Chambre, au contraire, le système électoral en vigueur (surnommé «  porcellum  » ou « saloperie » tant il est compliqué au-delà de tout bon sens) attribue automatiquement un « bonus de majorité » à la coalition arrivée en tête, en l’occurrence le centre-gauche. Sa principale composante, le Parti démocrate (PD), a pourtant été dépassée d’un cheveu par le nouveau venu en politique, le Mouvement cinq étoiles, la grande surprise et le grand vainqueur du scrutin (autour de 25,5 %). Créé il y a à peine trois ans, adepte d’Internet et du « grand coup de balai » contre les professionnels de la politique, il est dirigé d’une main de fer par le bouillant comique Beppe Grillo, mi-Coluche mi-Poujade, séduisant abstentionnistes et protestataires de tout poil, en particulier à gauche, avec un discours violent contre la corruption, pour la sortie de l’UE et l’abandon de l’euro, la nationalisation des « biens communs » (gestion de l’eau courante, accès à Internet, banques de dépôt), la défense de l’école publique et de l’environnement. Un discours qui a dérapé toutefois en stigmatisant les immigrés en « défense des emplois des Italiens », les Roms « pour la sécurité », ou encore le « pouvoir des syndicats »

De son côté, le PD doit la majorité à la Chambre aux voix de son allié, le petit SEL (Gauche écologie et liberté), issu d’une scission de Rifondazione comunista et emmené par le courageux gouverneur des Pouilles, homosexuel déclaré dans un sud catholique, Nichi Vendola. Celui-ci a passé toute la campagne à empêcher le PD de regarder trop au centre, vers l’ex-président du Conseil, l’ultralibéral Mario Monti, grand perdant du scrutin. À droite, alors que Berlusconi avait commencé assez bas dans les sondages, il termine à quelques points du centre-gauche et des listes Grillo. Afin d’éviter une improbable alliance entre PD et berlusconiens, que certaines élites appelaient de leurs vœux pour empêcher les « radicaux » de Beppe Grillo d’accéder aux responsabilités, Nichi Vendola demandait « au nom d’une véritable gauche de gouvernement » – alors que la gauche de la gauche, du juge Ingroia, n’obtient pas de sièges – à discuter, au-delà de son leader, avec les élus de ses listes, pour la plupart inconnus, dont les électeurs expriment, selon lui, de « justes demandes de changement »

Monde
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Droit international : quand règne la loi du plus fort
Monde 9 juillet 2025 abonné·es

Droit international : quand règne la loi du plus fort

Les principes du droit international restent inscrits dans les traités et les discours. Mais partout dans le monde, ils s’amenuisent face aux logiques de puissance, d’occupation et d’abandon.
Par Maxime Sirvins
Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face

Depuis les traités de Westphalie, le droit international s’est construit comme un champ en apparence neutre et universel. Pourtant, son histoire est marquée par des dynamiques de pouvoir, d’exclusion et d’instrumentalisation politique. Derrière le vernis juridique, le droit international a trop souvent servi les intérêts des puissants.
Par Pierre Jacquemain
La déroute du droit international
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

La déroute du droit international

L’ensemble des normes et des règles qui régissent les relations entre les pays constitue un important référent pour les peuples. Mais cela n’a jamais été la garantie d’une justice irréprochable, ni autre chose qu’un rapport de force, à l’image du virage tyrannique des États-Unis.
Par Denis Sieffert
Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »
Entretien 2 juillet 2025 abonné·es

Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »

L’intellectuel syrien est une figure de l’opposition au régime des Assad. Il a passé seize ans en prison sous Hafez Al-Assad et a pris part à la révolution en 2011. Il dresse un portrait sans concession des nouveaux hommes forts du gouvernement syrien et esquisse des pistes pour la Syrie de demain.
Par Hugo Lautissier