Italie : Napolitano réélu grâce à une alliance contre-nature

Alors que le M5S soutenait Stefano Rodotà, la droite s’est associée au Parti démocrate pour reconduire l’actuel Président.

Olivier Doubre  • 24 avril 2013 abonné·es

Le président de la République italienne, Giorgio Napolitano, âgé de 87 ans, ancien de l’aile droite du PCI puis dirigeant du Parti démocrate (PD), a été réélu samedi 20 avril. C’est le premier chef de l’État italien depuis 1945 qui accomplira un second septennat. S’il est une personnalité tout à fait estimable, il demeure que sa réélection augure très mal de l’avenir de la démocratie – et de la gauche – italienne.

Les élections législatives des 24 et 25 février ont porté, du fait d’un mode de scrutin complexe (pour ne pas dire inique), une majorité de centre-gauche à la Chambre des députés, mais aucune au Sénat. Cette paralysie politique a empêché la formation du nouveau gouvernement. Mais le mandat du président Napolitano arrivant à terme à la mi-mai, les grands électeurs (parlementaires et élus régionaux) devaient lui choisir un éventuel successeur. Après plusieurs tours de scrutin qui ont échoué à élire successivement Romano Prodi, Giuliano Amato ou l’ex-commissaire européenne Emma Bonino, les parlementaires du Mouvement 5 Étoiles (M5S, de Beppe Grillo) ont continué à soutenir le professeur de droit Stefano Rodotà, éminente personnalité progressiste engagée notamment en faveur de la moralisation de la vie publique italienne. Il est à noter que le petit parti Gauche écologie et liberté (SEL), allié lors des élections au PD, a lui aussi rallié cette candidature. Mais le parti de Silvio Berlusconi, le PDL, et la xénophobe Ligue du Nord se sont soudain entendus avec le PD pour reconduire Giorgio Napolitano, qui, du fait de la crise, venait de revenir sur sa décision de ne pas se représenter. Dès lors, les jeux étaient faits et Napolitano a été réélu avec plus de 700 voix contre 240 pour Rodotà. Même si une bonne trentaine de grands électeurs du PD n’ont pas suivi le choix de leur formation et ont voté Rodotà avec le M5S et SEL.

Il y a désormais tout lieu de craindre que la majorité du PD penche pour une alliance avec la droite berlusconienne, évitant ainsi les réformes de structures pour lesquelles ont voté, nombreux, les Italiens, en accordant leurs suffrages au M5S. Un signe fort de la protestation contre une classe politique inamovible depuis plus de vingt ans. À l’annonce du résultat, Grillo a dénoncé un « coup d’État » et promis d’assiéger symboliquement les parlementaires. Sautant dans le camping-car qui lui avait servi durant la campagne, il a annoncé qu’il partait à Rome pour aller se garer… devant le Parlement ! Légaliste, Stefano Rodotà s’est quant à lui dissocié de cette initiative, déclarant que le vote du Parlement, sans lui plaire, avait été « parfaitement démocratique ».

Monde
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Extrême droite allemande : « Comme souvent, la colère retombe, on s’habitue »
Entretien 1 décembre 2025 abonné·es

Extrême droite allemande : « Comme souvent, la colère retombe, on s’habitue »

Alors que l’AfD vient de refonder son organisation de jeunesse à Gießen, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont bloqué la ville pour tenter d’empêcher la tenue du rassemblement. Pour la germaniste et historienne Valérie Dubslaff, cette séquence s’inscrit dans la continuité des grandes mobilisations de 2024.
Par Maxime Sirvins
En Allemagne, une mobilisation massive contre l’extrême droite
Reportage 1 décembre 2025

En Allemagne, une mobilisation massive contre l’extrême droite

Près de 50 000 personnes venue de tout le pays se sont rassemblées ce week-end à Gießen pour empêcher le parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD) de reformer sa faction jeune, auto-dissoute huit mois plus tôt.
Par Camille Tribout
À Valence, l’extrême droite Vox surfe sur les inondations
Monde 28 novembre 2025 abonné·es

À Valence, l’extrême droite Vox surfe sur les inondations

Un an après la crue meurtrière d’octobre 2024, les habitants de Paiporta sont amers de la gestion de la tragédie par les autorités qui a dévasté la ville. Le parti d’extrême droite Vox a su tirer parti de ce désarroi.
Par Pablo Castaño
En Guyane, le mastodonte logistique de l’orpaillage illégal
Reportage 26 novembre 2025

En Guyane, le mastodonte logistique de l’orpaillage illégal

Près de 80 % des activités liées à l’extraction illicite de l’or en Guyane se concentrent sur le Haut-Maroni. Depuis la rive surinamienne, les garimpeiros – orpailleurs clandestins – ont édifié un système bien huilé pour exploiter le sol français.
Par Tristan Dereuddre