Iter : Un budget en ébullition

La facture d’Iter avoisine désormais 15 milliards d’euros, sur fond de critiques croissantes.

Patrick Piro  • 25 avril 2013 abonné·es

Le projet du réacteur thermonucléaire d’expérimentation internationale (Iter, en anglais) doit étudier s’il est techniquement possible d’utiliser la fusion nucléaire comme source d’énergie. À terme, la filière fournirait de l’électricité en reproduisant la réaction qui se déroule au cœur du Soleil. Projet international signé en 2006, Iter semble aujourd’hui surtout promettre la Lune pour un coût faramineux. Cahier des charges : le réacteur devra confiner pendant cinq minutes un plasma d’atomes de tritium et de deutérium chauffé à 200 millions de degrés. Au prix d’une dépense énergétique initiale considérable (chauffage et création d’une « enveloppe » magnétique de confinement) que la réaction thermonucléaire doit théoriquement compenser. En régime industriel (pas avant 2060), la fusion « produira », selon ses chantres, une énergie « inépuisable, propre et bon marché ».

L’intérêt s’est un peu accru après la catastrophe de Fukushima : la filière fusion ne fait pas peser de risques aussi considérables que la fission atomique actuellement exploitée dans quelque 440 réacteurs nucléaires dans le monde. Iter présente cependant des risques avec le tritium – diffusion dans l’environnement (il est radioactif) ou détournement (il entre dans la composition des bombes thermonucléaires). Cependant, la grande incertitude concerne la faisabilité même de l’expérimentation. À supposer qu’Iter parvienne à son objectif, plusieurs physiciens doutent, entre autres, qu’il soit possible de contrôler un jour les brutales instabilités dont le plasma est spontanément le siège.

Et, d’ores et déjà, le budget d’Iter (qui ne produira pas un kilowattheure d’électricité) est passé à 15 milliards d’euros environ, soit un triplement de l’estimation initiale de 5 milliards d’euros. « Nous ne sommes pas parvenus à empêcher le Parlement européen de voter une rallonge », indique l’eurodéputé MoDem (et ex-Verts) Jean-Luc Bennahmias, qui suit le dossier. L’Union, qui a soutenu l’implantation du projet à Cadarache, est très lourdement engagée, en charge de 45,5 % du financement [^2]. Et la préoccupation monte de voir le gouffre Iter assécher les fonds de recherche pour l’énergie, pour un résultat très incertain et éloigné, quand d’autres filières, comme les renouvelables, sont bien plus prometteuses et à court terme.

[^2]: Les autres pays (Chine, Corée du Sud, États-Unis, Inde, Japon, Russie) participent à hauteur de 9,1 % chacun.

Écologie
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