Pas d’amalgame(s), s’il te plaît

Frau Boutin donne fort l’impression d’être à l’aise auprès d’un député pénique.

Sébastien Fontenelle  • 25 avril 2013 abonné·es

Comme l’a très justement relevé le pétulant philosophe de télévision Alain F. dans le cours de l’un des multiples talk-shows d’haut niveau où ses scintillances lui valent d’avoir son rond de serviette – et où il venait successivement de dire son irritation que des centaines de millions de collégiens puissent désormais frapper leurs profs à grands coups d’essuie-glaces sans que personne n’y trouve à redire (à moi, Jacqueline de Romilly, c’est la sixième qu’on assassine), puis son offuscation devant l’évidence que des billiards de musulmanes avaient investi les crèches perdues de la République sans que nul(le) sauf lui ne s’en émeuve ( where the fuck is Charles Martel ?), puis (enfin) qu’il n’en pouvait quant à lui plus d’entendre Maximilien Marie Isidore de Mélenchon exiger toujours plus de décollations – les amalgames, c’est pas bien, Adrien. C’est pas bien du tout, même. **

Aussi voudrais-je ici te prier, au lendemain (matin) de la manifestation homophobe (liste non exhaustive) où Frau Boutin (comme d’autres) a défilé flanc contre flanc avec le député pénique Gilbert C. – envers qui Frau Tellenne, dite Barjot, organisatrice de ce happening, ne semble pas éprouver que de la rancœur –, de ne point te laisser aller, s’il te plaît, à ses incommodantes facilités. (Aux facilités de l’amalgame, donc : j’aimerais bien, aussi, que tu suives, au lieu de gueuler qu’avec mes phrases de cent kilomètres de long pleines de virgule tu comprends plus rien à ce que je dis.) **

Car en effet, te connaissant comme je te connais, je te vois venir d’assez loin, et je pressens que t’es sur le point de m’expliquer, sur le docte ton que tu prends à chaque fois que tu dispenses des leçons de bien-pensisme altruiste, que c’est quand même intéressant de constater que Frau Boutin, qui est officiellement d’une droite « républicaine », donne fort l’impression d’être à l’aise dans la proximité d’un député d’un parti – pénique – dont l’actualité nous a depuis deux ans montré qu’il continue d’attirer des jeunes gens versés dans cette forme particulière de nostalgie, tu sais, où le combat pour les valeurs (actuelles) s’ancre (aussi) dans l’exhibition de croix celtiques (ou gammées), et que d’ailleurs les mêmes sont précisément comme des poissons dans l’eau dans les manifs où la droite boutino-« républicaine » dit sa haine des gays, et que tout ça, mis bout à bout (et en perspective) commence à faire beaucoup, etc. **

Et je te le dis franchement : ces considérations ne t’honorent pas. Je ne voudrais pas me faire plus finkielkrautiste que je ne suis, mais cette façon que tu as de suggérer – hypocritement – que le fait que des Versaillais de l’UMP se mélangent si facilement avec des fafs des rues (FDR) est quand même un peu incommodant me rappelle les heures sombres du stalinisme, quand le général Gaulle ne pouvait plus faire un pas sans endurer les amalgames de Jacques Duclos. Lis plutôt le Figaro, où un appliqué chroniqueur va toutes les semaines narrant que les FDR sont des êtres humains comme les autres, un peu vifs peut-être – mais ne dit-on pas qu’il faut que jeunesse (patriote) se passe ? Ça te guérira de tes mesquineries.

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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