Union ou autonomie

Le Front de gauche est suspendu dans plusieurs villes au choix que feront les communistes de partir ou non avec le PS aux municipales.

Michel Soudais  • 12 septembre 2013 abonné·es

Les municipales divisent le Front de gauche. Si la plupart des formations qui le composent souhaitent, à l’instar du Parti de gauche (PG), présenter des listes autonomes vis-à-vis du PS, la direction du PCF n’exclut pas de partir sur des listes d’union avec les socialistes. Avant tout pour préserver son réseau d’élus. Malgré des revers lors des scrutins précédents, le PCF et ses apparentés administrent encore 806 communes. Et comptent environ 13 000 élus locaux, dont de nombreux adjoints au maire dans des équipes socialistes ou radicales de gauche.

Le Parti communiste gère 38 villes de plus de 20 000 habitants. Dans ces communes, le maire sortant a la main sur le programme que sa liste défendra ; la recherche d’une entente avec le PS y est donc l’option prioritaire. Dans toutes les autres communes, en revanche, les adhérents du PCF ont jusqu’à fin octobre pour décider de présenter des candidats sur des listes conduites par le PS ou de participer à des listes autonomes Front de gauche, parfois en association avec le NPA ou EELV. Cette ligne d’autonomie a déjà été retenue, selon nos informations, par les sections communistes de 23 villes au moins. Onze d’entre elles sont actuellement détenues par la droite : Nice (Alpes-Maritimes), Marseille et La Ciotat (Bouches-du-Rhône), Lisieux (Calvados), Chartres (Eure-et-Loir), Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), Cholet (Maine-et-Loire), Calais (Pas-de-Calais), Tarbes (Hautes-Pyrénées), Toulon (Var), Avignon (Vaucluse). Dix sont dirigées par le PS : Carcassonne (Aude), Dijon (Côte-d’Or), Brest (Finistère), Grenoble (Isère), Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), Pau (Pyrénées-Atlantiques), Strasbourg (Bas-Rhin), La-Roche-sur-Yon (Vendée), Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), Cergy (Val-d’Oise). Et deux sont administrées par un maire EELV : Montreuil et Sevran (Seine-Saint-Denis).

Conserver ces acquis est pour la direction du PCF une priorité. Pragmatique, elle laisse ses sections choisir entre les deux options. Officiellement, dans chaque commune, les communistes vérifient « si toute la gauche est capable de se rassembler sur le refus de l’austérité ». Ils ne se détermineraient donc que sur « des projets locaux » et la place accordée aux élus PCF. Dans les faits, cette logique locale intègre des considérations plus électoralistes. À Bourges, le PCF pourrait ainsi partir avec le PS si celui-ci soutient la mairie communiste de Vierzon, l’autre grande ville du Cher, reconquise en 2008. Même cas de figure à Tours, où le PCF entend conserver la ville voisine de Saint-Pierre-des-Corps. Au bout du compte, ce sont toutefois les adhérents communistes qui tranchent lors d’un vote en section. La plupart de ces consultations seront organisées en octobre, mais, dans une vingtaine de villes, le PCF a déjà fait le choix de l’autonomie (voir encadré ci-contre), parfois au terme d’un conflit entre ses élus, favorables à la reconduction de l’union de la gauche, et ses militants, hostiles à l’idée de faire campagne avec les socialistes. De quoi redonner le sourire à Jean-Luc Mélenchon. Depuis les Estivales, le coprésident du PG, soucieux de ne pas cristalliser les divergences de vues entre son parti et le PCF, explique qu’il serait présomptueux de « décider que les communistes sont tous du même avis ». Tout en affirmant ne pas vouloir se mêler des municipales, où, rappelle-t-il régulièrement, il n’est pas candidat, le député européen ne manque pas une occasion de faire valoir ses arguments en faveur de la constitution de listes autonomes : cohérence et honnêteté ( « On ne peut pas faire une manifestation contre le ministre le samedi, et aller voter le dimanche pour lui ou ceux qui le soutiennent. » ). Avec l’espoir à peine dissimulé d’influencer le vote des communistes, dont il dit croire qu’ils « trancheront dans le sens de l’autonomie ».

Publié dans le dossier
Front de gauche : Pourquoi ça coince
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