Quel est le problème, docteur ?

La généralisation du tiers-payant est mal accueillie par les médecins libéraux, qui ont reconduit leur mouvement de grève.

Ingrid Merckx  • 8 janvier 2015 abonné·es
Quel est le problème, docteur ?
© Photo : AFP PHOTO / PHILIPPE HUGUEN

Problème administratif ou symbolique, la généralisation du tiers-payant ? Cette mesure, qui permettrait en 2017 à tous les patients de ne pas avancer de frais sur une partie des consultations, a provoqué une grève à rebonds chez une bonne part des médecins libéraux. Le mouvement, commencé les 23 et 24 décembre (environ 75 % de grévistes), a été reconduit les 5 et 6 janvier, assorti d’une « guérilla administrative » : plus de télétransmissions à la Sécurité sociale et retour aux feuilles de soins, provoquant un engorgement des services et un retard de remboursement pour les patients. D’après un sondage Ifop-JDD (4 janvier), 58 % des Français soutiendraient ce mouvement.

Pourtant, la généralisation du tiers-payant que propose la nouvelle loi santé, bientôt en discussion à l’Assemblée, est présentée comme une vraie mesure sociale. Elle figurait d’ailleurs parmi les quarante propositions du rapport parlementaire sur l’accès aux soins présenté en octobre 2013 par la sénatrice Aline Archimbaud. Le constat étant qu’un nombre croissant de personnes renonce à des soins pour des raisons économiques. Mais la généralisation du tiers-payant n’a pas suffisamment fait l’objet de négociations entre l’assurance maladie et les complémentaires. Conséquences : les grévistes redoutent de devoir « courir après les mutuelles » pour réclamer leur dû. Si certains estiment que la mesure pourrait libérer la relation patient-médecin de certaines contingences (paiement à l’acte, à l’objectif…), d’autres considèrent qu’elle risque de déresponsabiliser les patients et d’entraîner des raids de consultations « gratuites », ainsi qu’une « mise sous tutelle de la Sécurité sociale » via « une forme de salariat forcé » .

Ce mouvement se greffe sur le désarroi des généralistes, dont les tarifs, bloqués à 23 euros, les pénalisent par rapport aux spécialistes (25 euros), d’autant qu’ils sont soumis à des temps de travail souvent délirants. La solution ? Un tiers-payant « simplifié », avec la Sécu comme interlocuteur unique pour les médecins, suggère le syndicat MG France. Cette grève vient surtout rappeler le désengagement de la Sécu au profit des complémentaires, les dépassements d’honoraires scandaleux, les déserts médicaux…

Société Santé
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Aux États-Unis, l’habit fait le trumpiste
Analyse 12 décembre 2025 abonné·es

Aux États-Unis, l’habit fait le trumpiste

Entre exaltation d’une féminité à l’ancienne, nostalgie d’une Amérique fantasmée et stratégies médiatiques, l’esthétique vestimentaire se transforme en arme politique au service du courant Maga. Les conservateurs s’en prennent jusqu’à la couleur rose d’un pull pour hommes.
Par Juliette Heinzlef
Naturalisation : des Palestiniens sous pression de la DGSI
Enquête 11 décembre 2025 abonné·es

Naturalisation : des Palestiniens sous pression de la DGSI

Convoqués par la Direction générale de la sécurité intérieure alors qu’ils demandaient la nationalité française, trois Palestiniens racontent les entretiens durant lesquels on leur a suggéré de fournir aux Renseignements des informations sur le mouvement associatif palestinien.
Par Pauline Migevant
« La surveillance des Palestiniens en Europe est très répandue »
Entretien 11 décembre 2025

« La surveillance des Palestiniens en Europe est très répandue »

En Europe, les Palestiniens sont de plus en plus ciblés par les surveillances numériques ou les fermetures de comptes bancaires. Layla Kattermann, responsable de la veille pour l’European Legal Support Center, revient sur ce standard européen de surveillance.
Par William Jean
À la frontière franco-britannique, la parade de l’extrême droite, entre associations inquiètes et forces de l’ordre passives
Reportage 6 décembre 2025 libéré

À la frontière franco-britannique, la parade de l’extrême droite, entre associations inquiètes et forces de l’ordre passives

Sur la plage de Gravelines, lieu de départ de small boats vers l’Angleterre, des militants d’extrême droite britannique se sont ajoutés vendredi 5 décembre matin aux forces de l’ordre et observateurs associatifs. Une action de propagande dans un contexte d’intimidations de l’extrême droite. Reportage.
Par Pauline Migevant et Maxime Sirvins