Sivens : Une nouvelle bataille commence

L’option d’un barrage plus petit et l’évacuation de la ZAD ne mettent pas fin au conflit.

Patrick Piro  • 12 mars 2015 abonné·es
Sivens : Une nouvelle bataille commence
© Photo : AFP PHOTO / PASCAL PAVANI

Deux ouvrages d’une grande pertinence viennent de sortir sur cette affaire exemplaire. Avec Sivens, un barrage contre la démocratie (Les Petits matins, 9 euros), c’est l’exposé détaillé, factuel et analytique de deux ans de contestation pacifique, rédigé par Ben Lefetey, porte-parole du collectif associatif d’opposants. Quant au journaliste Grégoire Souchay, il témoigne de près de deux ans de couverture de l’affaire pour Reporterre.net, partenaire du Seuil pour l’édition de Sivens, le barrage de trop (10 euros) écrit avec Marc Laimé, grand spécialiste de la politique de l’eau en France.

Une retenue deux fois moins volumineuse, mais un barrage quand même : le 6 mars, le conseil général du Tarn a fait son choix, à la suite de la très forte opposition suscitée par le projet initial et de la mort du jeune militant Rémi Fraisse, le 26 octobre dernier, tué par la grenade offensive lancée par un gendarme. Un rapport rendu mi-janvier à la ministre de l’Écologie avait corroboré les chiffres des opposants : le barrage était largement surdimensionné. EELV se félicite donc de son abandon, mais souligne que ce choix « ne règle rien sur le fond », car « rien ne dit que les doutes juridiques sur le respect de l’environnement seront levés ». Et quelle nécessité de prendre une décision avant les élections départementales ? Le Parti de gauche du Tarn fustige « une décision qui prive la prochaine assemblée de sa souveraineté » et qui ne procède d’aucun débat clair sur les différentes options mises sur la table. A fortiori sur celles que proposait le Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, qui rejette le nouveau barrage et l’autre solution proposée par le ministère – trois petites retenues collinaires, projet plus onéreux et plus long à réaliser. Pour le Collectif, il aurait été plus pertinent de tirer parti des dizaines de petites retenues privées existantes mais sous-utilisées.

La FNSEA, qui a tenté de calmer la fraction d’agriculteurs venus s’opposer aux derniers zadistes (évacués), se satisfait de la décision du conseil général et appelle « au début des travaux sans délai ». Illusoire : il faudra reprendre à zéro toute la procédure de décision, dont les opposants ont démontré combien elle avait été viciée par les élus locaux et les conflits d’intérêts. Pas de coup de pioche avant deux ans, donc, et une nouvelle bataille prévisible de la part des opposants, floués par cette fausse conclusion en queue de poisson et par l’absence de cette « démocratie participative » promise par le Président pour que le drame de Sivens ne se reproduise pas.

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