Innovation menacée

Saint-Cyr-Le-Chatoux (Rhône) se bat contre la fermeture de sa classe unique, pratiquant les pédagogies alternatives.

Ingrid Merckx  • 9 mars 2016 abonné·es
Innovation menacée

C’est un peu l’histoire d’Être et avoir, mais dans le Rhône, à Saint-Cyr-le Chatoux, village de 140 âmes dont la petite école de 13 élèves est menacée. À la rentrée, ses trois CM2 entreront en 6e. « Le comité départemental de l’Éducation nationale ne compte qu’à partir de la grande section, explique Loïc Alexandre, père de trois élèves. Officiellement, la classe ne compterait donc plus que 7 élèves. L’inspecteur d’académie utilise cet argument pour décider de la fermeture de l’école. »

Selon l’inspection, en effet, les mairies doivent s’organiser en regroupement pédagogique intercommunal. « Les autres écoles sont à une dizaine de kilomètres sur une route sinueuse. Cela signifie du trajet pour les familles ou du ramassage scolaire, qui représente un certain coût. » Si les élus sont contre la fermeture de l’école, son entretien, le poste d’Atsem et la cantine ont un impact sur le budget de la mairie, « mais se passer de cette école, c’est supprimer une activité clé, martèle Loïc Alexandre. Sans école, aucune chance que de jeunes familles s’installent dans le village. »

Il est d’autant plus motivé que l’établissement pratique les pédagogies alternatives, notamment depuis l’arrivée, il y a cinq ans, de son enseignant, Philippe Ruelen. Si elle ne séduisent pas forcément tout le village, Loïc Alexandre estime qu’elles ont sauvé son fils : « À la limite de l’échec scolaire, il a repris confiance en lui. » En outre, ces méthodes attirent des enfants de villages alentour. « Nous réclamons le label école innovante. Nous avons réuni 3 000 signatures. Nous ne sommes pas un cas isolé », ajoute-t-il.

« Les petites écoles à une, deux ou trois classes sont dans le collimateur, confirme Philippe Ruelen. Elles sont pourtant l’avenir de l’école, de même que les classes multi-âges. Des parents déçus de l’école traditionnelle créent d’ailleurs des petites écoles privées associatives sur ce modèle. » Enseignant depuis vingt ans les pédagogies alternatives au sein de l’Éducation nationale et membre d’un réseau qui fonctionne via la liste « Pratiques de classe » et les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives, il s’interroge : « Tous mes élèves réussissent et sont contents de venir. Si cette école ferme, cela voudra dire qu’on ne peut plus faire de pédagogies innovantes au sein de l’Éducation nationale. »

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