Un héritage sud-africain

L’Europajazz du Mans rend hommage au Brotherhood of Breath, de Chris McGregor.

Ingrid Merckx  • 4 mai 2016 abonné·es
Un héritage sud-africain
© DC Martin

Le 24 juillet 1964, le -Festival d’Antibes accueille les Blue Notes d’Afrique du Sud. Les membres du groupe ont quitté leur pays avec un visa de sortie et un aller simple pour un Blanc et cinq Noirs, ils ne peuvent donc plus s’y produire. Après bien des tribulations, cinq de ces musiciens se fixent en Europe et participent activement au développement d’une nouvelle musique improvisée engendrée par le jazz.

Les Blue Notes forment l’ossature d’un grand orchestre rassemblé à partir de 1967 par leur pianiste, Chris McGregor : le -Brotherhood of Breath. Cette formation va profondément marquer le jazz européen des années 1970-1980. Le contrebassiste Didier Levallet, artisan avec le pianiste François Raulin de l’hommage qui sera rendu au Mans, se souvient que Brotherhood apporte alors « un vent libertaire et corrosif -faisant voler en éclats une conception trop policée du jazz. Ceci surtout dans la première époque, les années 1970, qui voit la collision entre les tempéraments sud-africains et l’avant-garde, essentiellement britannique, produire une bombe musicale qui a laissé des souvenirs incandescents ».

L’orchestre européen n’est pas la première tentative de Chris -McGregor en ce domaine. En 1963, il a eu l’occasion de réunir une quinzaine de musiciens pour enregistrer Jazz, The African Sound (qui vient d’être réédité). Sur la base d’un langage ellingtonien, il combine les harmonies du jazz aux structures des polyphonies vocales de sa région d’origine, le Transkei, en Afrique du Sud. Il reprendra cette organisation dans Brother-hood, en la démultipliant par l’introduction d’improvisations libres. La fusion d’une écriture orchestrale aux nuances colorées et d’une ouverture sur l’aventure débridée donne naissance à une musique « surprenante et explosive », explique Didier Levallet.

Le concert du Mans ne sera pas un hommage nostalgique, mais une véritable (re)création susceptible de faire entendre, dans les langages d’aujourd’hui, ce que le jazz doit à Chris McGregor et à l’Afrique du Sud.

Musique
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