États-Unis : Trump fait feu sur la protection de l’environnement

La nouvelle administration américaine livre l’agence fédérale en charge des questions environnementales aux climatosceptiques et fait tout ce qu’elle peut pour l’empêcher de fonctionner.

Claude-Marie Vadrot  • 19 mars 2017 abonné·es
États-Unis : Trump fait feu sur la protection de l’environnement
© photo : JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

La dislocation de la politique environnementale des États-Unis, à l’intérieur du pays comme au niveau planétaire, vient de commencer avec la mise au pas de l’EPA, l’Agence américaine de protection de l’environnement. Elle était annoncée, puis redoutée ; elle a commencé par la nomination à la tête de l’agence de l’ex-« ministre de la Justice » (state attorney general) de l’Oklahoma, Scott Pruitt.

À l’actif de ce climatosceptique revendiqué : une ignorance assumée des questions de protection de la nature, de nombreuses actions juridiques contre les textes régissant la préservation de l’environnement et la pollution des rivières, des procès sans fin contre la législation environnementale fédérale, des textes visant à remettre en cause le droit à l’avortement et des diatribes contre les homosexuels.

On peut y ajouter ses liens avec la très conservatrice Alliance américaine pour l’énergie – un groupe d’expert présidé par un certain Tom Pyle, proche du président Trump, « avocat » des énergies fossiles et adversaire « de toutes ces théories sur les effets nocifs du CO2, avec lesquelles le président Obama a trompé beaucoup d’Américains, notamment en imposant son Clean Air Act ».

Retentissante démission

Face à ces perspectives, Mustafa Ali, l’un des plus hauts responsables de l’EPA depuis vingt-quatre ans, a envoyé sa lettre de démission à Scott Pruitt. Il lui expliquait qu’il ne supportait pas que le gouvernement américain se dispose « à tuer tous les programmes de protection » de l’agence « qui lutte depuis des années pour alléger le poids des pollutions de l’air et de l’eau frappant essentiellement les villes et les régions déjà affectées par la pauvreté ».

Il a ajouté, dans une interview qui a rapidement fait le tour de la communauté scientifique et du monde associatif lié à la nature ou à l’environnement, que « venir au secours des communautés les plus fragiles et les plus pauvres, celles qui sont les plus vulnérables faisait partie des préoccupations cruciales de notre agence. Or nos nouveaux responsables n’ont pas donné le moindre signe qu’ils s’intéressaient au sort de ces gens […], pas plus qu’ils n’ont manifesté le moindre intérêt pour la protection de la nature. Mes valeurs et mes priorités semblent si différentes de celles de nos nouveaux dirigeants que je préfère aller exercer mes talents ailleurs. »

L’environnement abandonné aux États

Cette lettre n’a pas reçu de réponse, sauf par les décisions qui, depuis quelques jours, commencent à démanteler l’EPA. D’abord une première réduction de 30 % de son budget et l’annonce que, dans un premier temps, au moins un quart du personnel serait licencié. En attendant le possible démantèlement de cette agence. Car elle paraît désormais vouée à disparaître. Les questions de la pollution de l’air, de l’empoisonnement des cours d’eau, des rejets industriels, de la préservation des parcs et des réserves sont de plus en plus dévolues exclusivement aux États, y compris pour leur financement.

Il faut aussi noter que le responsable, lorsqu’il était « ministre de la Justice », a organisé la plupart des procès contre l’agence qu’il dirige désormais, visant à mettre en cause toutes les réglementations fédérales pour réduire les pollutions.

Opération de « nettoyage » et de censure

Par ailleurs, tous les rapports liés à la protection de la nature et de l’environnement produits ou financés par l’EPA disparaissent progressivement du site de l’agence et ne sont plus accessibles au public ou aux scientifiques. Opération de « nettoyage » et de censure qui a évidemment commencé par tous les éléments liés aux modifications climatiques et notamment à la montée des eaux marines.

À lire aussi >> La NASA alerte sur le réchauffement, Trump veut couper ses budgets

Désormais, la voie est totalement libre aux États Unis pour les activités des industriels, de l’extraction du charbon au recours aux énergies fossiles. Comme un retour au Far West des débuts de l’ère industrielle.

Écologie
Temps de lecture : 4 minutes

Pour aller plus loin…

Loi Duplomb : comment le gouvernement éteint les voix paysannes
Décryptage 30 juin 2025 abonné·es

Loi Duplomb : comment le gouvernement éteint les voix paysannes



La « loi Duplomb » est discutée en commission mixte paritaire à partir de ce lundi 30 juin. Le texte ne bénéficiera qu’à une poignée de gros agriculteurs et invisibilise celles et ceux qui défendent une agriculture paysanne et vertueuse.
Par Vanina Delmas
Les cadeaux de Macron à l’agro-industrie
Agriculture 30 juin 2025

Les cadeaux de Macron à l’agro-industrie

La loi Duplomb offre de nombreux cadeaux aux défenseurs de l’agriculture productiviste. Cette générosité a émaillé les deux quinquennats d’Emmanuel Macron notamment en matière de pesticides, de fermes-usines et de mégabassines.
Par Vanina Delmas
« Stop aux marchands de mort » : au blocage de l’usine Phyteurop, avec les opposants aux pesticides
Reportage 27 juin 2025 abonné·es

« Stop aux marchands de mort » : au blocage de l’usine Phyteurop, avec les opposants aux pesticides

Plusieurs centaines de militants, paysans et habitants ont bloqué ce 27 juin cette usine de produits agrochimiques, à Montreuil-Bellay, dans le Maine-et-Loire. À quelques jours du vote de la loi Duplomb, ils dénoncent un système agricole toxique qui empoisonne les corps, les sols et les récits.
Par Maxime Sirvins
VivaTech : le salon des start-ups écocides
Reportage 13 juin 2025 abonné·es

VivaTech : le salon des start-ups écocides

Paris accueille Viva Technology, le plus grand salon européen dédié au secteur de la tech et aux start-ups. Dans ce temple de la sacro-sainte innovation, l’écologie est l’éternelle absente, cantonnée à de néfastes inventions technosolutionnistes.
Par Thomas Lefèvre