Pour un débat politique, à gauche, autour de l’économie sociale et solidaire

À l’occasion de la rencontre « ESS et transformation sociale » le 25 mars à Saint-Denis, Jean-Philippe Milesy revient sur le caractère profondément politique de l’engagement des acteurs de l’ESS et appelle les forces progressistes à s’emparer de la question.

Jean-Philippe Milesy  • 14 mars 2017
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Pour un débat politique, à gauche, autour de l’économie sociale et solidaire
© photo : BERTRAND LANGLOIS / AFP

Comment des femmes et des hommes peuvent-ils devenir, collectivement et démocratiquement, les protagonistes de leur santé, de leur logement, de leur travail, de leur culture ? Comment, face à un capitalisme financier insoutenable, économiquement, socialement, écologiquement et démocratiquement, et face aux impasses des systèmes étatistes, faire émerger des alternatives de transformation sociale ?

L’économie sociale était, disait-on, « fille de la nécessité », mais elle était avant tout une composante du mouvement social. C’est ce que voulait affirmer Fernand Pelloutier quand, au sein des Bourses du travail, il associait les formes émergentes du syndicalisme, les mutuelles ouvrières, les coopératives de productions et de consommation, les associations d’éducation populaire.

La révolution néolibérale, avec l’émergence de nouveau besoins et le démantèlement progressif de l’État du compromis social, tel qu’il avait émergé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ont provoqué l’apparition des formes renouvelées de l’économie solidaire qui sont souvent venues bousculer les formes instituées en voie de banalisation.

Aujourd’hui l’économie sociale et solidaire (ESS), ce n’est pas tant les chiffres magiques trop souvent ressassés (10 % du PIB, 12 % des emplois privés…), car ceux-ci intègrent des structures comme les grandes banques coopératives que nous devons aujourd’hui contester et/ou réinvestir.

Ce sont des valeurs fondatrices, liberté, égalité, solidarité gravement mises en causes et auxquelles il s’agit de donner des contenus concrets.

Ce sont des dynamiques innovantes ancrées dans les territoires, des nouvelles formes d’appropriation démocratiques parmi lesquelles on trouve des entreprises reprises, des monnaies locales, le renouveau de l’habitat coopératif. L’ESS, ce sont des coopératives d’activité et d’emploi (CAE) et les réponses qu’elles apportent à la désagrégation du travail, des sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) en réponse aux problématiques des « communs », des associations et coopératives développant les logiciels libres, mais aussi des centres de santé pour répondre aux inégalités dans l’accès aux soins, aux déserts médicaux. Ce ne sont pas des entreprises marginales de réparation, mais l’esquisse de formes nouvelles de prise en charge collective, démocratique et solidaire des besoins.

Sous toutes ces formes, l’ESS, réinvestissant l’engagement, les valeurs et principes de ses créateurs, constitue, au-delà d’un « entreprendre autrement », que trop de ses structures peinent à s’imposer, la base d’une résistance culturelle et politique aux diktats libéraux.

C’est dans ce sens qu’un débat sur « ESS et transformation sociale » et qu’une interpellation des représentants ESS des candidats et des forces de gauche est apparue comme une nécessité aux yeux des promoteurs des Rencontres de la Plaine (Plaine Commune, le GOEES, l’EMI-CFD et Rencontres sociales) qui auront lieu le 25 mars, à la Maison des sciences de l’homme de Saint-Denis avec le soutien de Politis, de L’Humanité, du Journal de Saint-Denis et du Collège des études mondiales.

À lire >> ESS, transformation sociale et échéances politiques

Ces promoteurs s’étaient retrouvés durant le mouvement contre la loi El Khomri pour s’opposer aux dérives de certaines institutions de l’ESS, ayant visiblement oublié ce qui la fondait et la justifiait. Avec ces rencontres largement ouvertes, ils ont voulu réaffirmer le caractère profondément politique de leur engagement. Il appartiendra aux représentants de Benoît Hamon, de Jean-Luc Mélenchon, des Verts, d’Ensemble !, du Parti communiste et de tous ceux qui, à gauche, voudront rejoindre l’initiative, d’exprimer leurs visions, leurs engagements, pour faire de l’ESS le levier de la transformation sociale à laquelle nous aspirons.

Les Rencontres de La Plaine se tiendront le samedi 25 mars 2017 (9h30-17h) à la Maison des sciences de l’homme Paris-Nord, 20, avenue George-Sand, 93210 Saint-Denis (métro Front populaire, ligne 12)

À l’initiative de : François Longérinas – CFD/EMI –, Jean-Philippe Milesy – Rencontres sociales –, Jack Potavin – Groupement des organismes employeurs de l’ESS (GOEES) –, Patrick Vassallo – conseiller territorial de Plaine-Commune.

Contacts : rencontresdelaplaine.ess@gmail.com / Jean-Philippe Milesy milesy@rencontres-sociales.org ; 06 85 56 38 58.

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Tribunes

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