Réautorisation du glyphosate : mauvaise nouvelle pour la santé et l’environnement

Les États membres viennent de prolonger de cinq ans l’utilisation du glyphosate. Une décision condamnée par les organisations écologistes.

Politis.fr  et  AFP  • 27 novembre 2017
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Réautorisation du glyphosate : mauvaise nouvelle pour la santé et l’environnement
© photo : EMMANUEL DUNAND / AFP

Les États membres ont accepté lundi de réautoriser pour 5 ans le glyphosate lors d’un comité d’appel après plus de deux ans de débats intenses sur cet herbicide controversé. C’est une surprise, à trois semaines de la date d’expiration de la licence actuelle, tant les divisions semblaient insurmontables, le glyphosate étant devenu une question sociétale après son classement comme « cancérogène probable » en mai 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (un organe de l’OMS).

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Les neuf pays qui avaient déjà dit non au cours d’un premier vote le 9 novembre sont restés sur leur position, selon des sources européennes, le scrutin se déroulant à huis clos. La France notamment a réitéré son opposition. Dimanche, la secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique Brune Poirson avait confirmé l’engagement de Paris en faveur d’une sortie progressive du glyphosate et d’une durée plus courte d’autorisation.

« Ce n’est pas un signal clair pour une élimination progressive du glyphosate. Le combat doit continuer », a tweeté lundi après-midi la ministre luxembourgeoise de l’Environnement Carole Dieschbourg :

Cette fois, 18 pays ont soutenu la proposition de la Commission – contre 14 au tour précédent –, permettant tout juste d’atteindre le seuil de plus de 65 % de la population de l’UE nécessaire pour une majorité qualifiée.

Le changement de cap de l’Allemagne, qui a voté Oui alors qu’elle s’était abstenue le 9 novembre, a pesé dans la balance. Selon une source proche du dossier, Berlin avait demandé des modifications au texte proposé en lien avec des restrictions sur l’usage privé du glyphosate et le respect de la biodiversité. La ministre allemande de l’Environnement Barbara Hendricks, membre du Parti social-démocrate (SPD), s’est aussitôt émue de ce vote dans un communiqué. Elle explique avoir signifié une nouvelle fois son opposition à une nouvelle autorisation, « même sous certaines conditions » à son homologue à l’Agriculture, qui appartient lui aux conservateurs de la CSU. « Il était clair que l’Allemagne devait s’abstenir », a estimé Mme Hendricks.

Ce vote contesté au sein même du gouvernement allemand a fait basculer le scrutin en faveur du maintien du glyphosate. La même chose est vraie de celui du Royaume-Uni, qui a également voté en faveur de la prolongation alors qu’il est en instance de départ de l’Union européenne suite au Brexit. Sans son vote, la décision n’aurait pas obtenu la majorité qualifiée.

Colère des ONG

La décision a provoqué la colère des ONG et organisations écologistes qui se sont battues farouchement contre une réautorisation.

« Cinq années de glyphosate supplémentaires mettront notre santé et l’environnement en danger, et c’est un revers majeur pour les méthodes agricoles plus durables », a tempêté Adrian Bebb de Friends of the Earth Europe.

De son côté, Europe Écologie Les Verts a estimé que « malgré la volonté affichée de Nicolas Hulot, force est de constater que la force de la France au niveau européen reste malheureusement du domaine de l’affichage et pas de l’effectivité ».

Générations Futures, foodwatch et la Ligue contre le cancer ont aussi condamné cette décision :

En accordant un sursis supplémentaire à Monsanto, Bayer et compagnie, la Commission européenne balaie le principe de précaution et la santé du revers de la main, de même que la voix des millions de citoyens qui ne veulent plus de l’herbicide le plus controversé de la planète ».

Les trois organisations se sont en revanche félicitées « que la France ait maintenu son opposition au renouvellement de cinq ans. Le gouvernement doit maintenant mener le pays vers une sortie du glyphosate, en accompagnant les agriculteurs, comme il s’y est engagé et ce, indépendamment du verdict de la Commission européenne ».

Semblant les satisfaire, Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a indiqué sur Twitter que la « France reste déterminée à sortir du glyphosate en moins de 5 ans ».

Mais après les multiples reculades du gouvernement sur le front de l’écologie, il devient difficile de trop espérer.

Écologie
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