Metaleurop, un passé empoisonné
L’État a été négligent dans le suivi du site de métallurgie ultra-polluant, dans le bassin minier du Pas‑de‑Calais. Un cas d’école et une lutte sans relâche des riverains. Reportage.
dans l’hebdo N° 1509 Acheter ce numéro
Sa haute cheminée ne trouble plus le paysage et ne recrache plus de fumée âcre. Et sa tour cubique ne fabrique plus de billes de grenaille de plomb de chasse. Les deux emblèmes de la fonderie Metaleurop-Nord ont disparu en 2006 lors des travaux de réhabilitation du site, fermé trois ans plus tôt. Seul le terril reste visible. Si la partie émergée de l’usine n’existe plus, une autre plus pernicieuse perdure sous les pieds des habitants. Le sol de Metaleurop et de ses environs renferme toute l’histoire du bassin minier : des obus de la guerre aux produits chimiques de l’ère industrielle. La négligence des services de l’État face à cette pollution historique et titanesque pourrait les conduire devant le tribunal administratif en cas de refus de faire leur mea culpa et d’indemniser les habitants contaminés.
Les hauts fourneaux de Metaleurop ont commencé à chauffer en 1894 à Noyelles-Godault et à Courcelles-lès-Lens (Pas-de-Calais), et sont devenus les garants de l’indépendance française en métal. La fonderie produisait chaque année 130 000 tonnes de plomb et 100 000 tonnes de zinc, et 830 salariés ont été laissés sur le carreau lors de l’annonce de la fermeture en 2003, annoncée par un simple communiqué. Le « patron voyou » dénoncé par Jacques Chirac, c’était celui de Metaleurop.
Cette dépendance économique a créé une omerta profonde, voire un déni, s’agissant de la pollution des sols. « Pourtant, les cheminées fumaient à longueur d’année, la poussière de plomb était partout, et cela a créé une pollution sur plus de 200 hectares aux alentours », glisse Bruno