Pour Raphaël Glucksmann, une jeunesse éprise de changement ?

Fondateur de Place publique et eurodéputé depuis 2019, Raphaël Glucksmann publie un essai optimiste sur la jeunesse qui, selon lui, est loin d’être apathique.

Olivier Doubre  • 1 septembre 2021 abonné·es
Pour Raphaël Glucksmann, une jeunesse éprise de changement ?
© Maxime Leonard/Hans Lucas/AFP

Peut-être empreint de naïveté, ce livre de Raphaël Glucksmann est néanmoins un livre d’espoir. Bien conscient des impasses, des renoncements et du manque de volonté de nombreux responsables politiques en place, en particulier européens, l’essayiste se désole du statu quo actuel à l’heure du dérèglement climatique toujours plus impitoyable et de l’accroissement des inégalités. Toujours au nom de sacro-saints profits et d’une incapacité à nous décider à emprunter une autre voie. Ce monde va si mal que beaucoup, paraissant parfois parmi les plus lucides, semblent se résigner à voir se rapprocher la perspective d’un effondrement général de la civilisation, voire de notre planète. Celui qui est aujourd’hui président de la sous-commission des Droits de l’homme du Parlement européen se refuse à une telle éventualité, se tournant vers la jeunesse d’aujourd’hui, loin de ces trop fréquents clichés qui la décrivent désabusée, inculte, ultra-individualiste, voire narcissique, rivée et passive derrière ses écrans…

De récents mouvements montrent, selon lui, combien cette jeunesse est « solidaire, active, investie, mobilisée ». Et de souligner que son propos n’est point une simple « incantation », parce que cette jeunesse, loin d’être « zemmourisée » est capable de se mobiliser contre la xénophobie. Ainsi, lorsque le boulanger de Besançon a entamé une grève de la faim pour que son apprenti venu d’Afrique puisse rester ici, contre la décision inique de l’administration française qui voulait l’expulser, des centaines de milliers de jeunes de France ont soutenu ce combat sur Internet…

Raphaël Glucksmann prend aussi l’exemple de l’homophobie à l’œuvre dans certains pays de l’est de l’Europe (comme la Hongrie ou la Pologne) pour fustiger l’inaction des dirigeants européens qui choisissent de renoncer à se battre pour des principes qui sont pourtant ceux de l’Union. Contrairement à tant de jeunes du Vieux Continent qui, eux, se mobilisent contre de telles inepties. Et il cingle pareillement la « volonté d’impuissance » des dirigeants à Bruxelles, refusant de s’opposer au pouvoir chinois, coupable du génocide en cours des Ouïgours, au nom d’un supposé « réalisme économique ». Or l’Europe, premier marché mondial en termes de population et de pouvoir d’achat, a les moyens de faire reculer, sinon plier, la puissance chinoise, ne serait-ce qu’en lui rappelant cette réalité – et d’abord en imposant une taxe douanière à l’entrée du continent.

On ne peut in fine que regretter que l’auteur ait choisi de rejoindre le groupe socialiste au Parlement de l’UE qui, si souvent, a renié ses engagements au nom de ce même « réalisme » et de cette « complexité » (géopolitique) qu’il dénonce à juste titre. Jusqu’à refuser parfois de suivre la discipline de vote de ce groupe parlementaire, dans une démarche un peu brouillonne – qui se ressent un peu dans cet ouvrage pourtant courageux…

Lettre à la génération qui va tout changer éd. Allary, 192 pages, 18,90 euros.

Idées
Temps de lecture : 3 minutes

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