SNU : le gouvernement recule face à la pression de la jeunesse

Elisabeth Borne a appelé Sarah El Haïry, pour lui annoncer que l’obligation sur temps scolaire du SNU n’était plus, pour l’instant, d’actualité.

Hugo Boursier  • 29 mars 2023
Partager :
SNU : le gouvernement recule face à la pression de la jeunesse

La vague de contestation des jeunes contre la réforme des retraites a englouti l’une des promesses phares d’Emmanuel Macron : l’obligation du Service national universel en temps scolaire. Du moins pour le moment.

D’après une source gouvernementale, Elisabeth Borne a appelé Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargé du SNU, jeudi 23 mars après-midi, en pleine massive neuvième journée de mobilisation, pour lui indiquer que la nouvelle version du SNU, dont nous révélions le plan d’attaque, était mise entre parenthèse.

L’exécutif craint que ce dispositif impopulaire redouble la détermination des jeunes.

« Quand on enlève l’obligation, cela signifie que l’on reste au système actuel du volontariat », explique la même source. « L’exécutif craint que ce dispositif impopulaire et compliqué politiquement redouble la détermination des jeunes ».

Preuve en est, Emmanuel Macron n’a pas dit un mot sur le SNU lors de son interview télévisée, mardi 21 mars, alors que des annonces sur le sujet étaient attendues depuis plusieurs mois. Envisagés comme un nouvel élan d’engagement pour la jeunesse, selon le gouvernement, les séjours de cohésion n’ont pas été évoqués par le président lorsqu’il détaillait ses « caps », dont figure « l’ordre républicain ».

Sur le même sujet : SNU : comment Macron veut mettre la jeunesse au pas

Contacté, le cabinet de Sarah El Haïry botte en touche en affirmant que « toutes les hypothèses, dont l’obligation, sont encore sur la table ».

Caractère abrasif

Le chef de l’État a aussi renoncé à son déplacement à Toulon, prévu mercredi, où devait se tenir une réunion sur le SNU, d’après une information de BFM. Selon une source proche du dossier, des annonces auraient dû être faites sur le SNU lors de cette visite.

Au-delà de l’implication de la jeunesse dans le mouvement social, notamment suite à l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution, c’est aussi le caractère politiquement abrasif du SNU qui coince. Alors qu’une ligne budgétaire de la version obligatoire et sur temps scolaire devait figurer dans la loi de programmation militaire, qui entre en conseil des ministres début avril, le sujet aurait fait tâche d’huile parmi les parlementaires. « Emmanuel Macron a besoin d’un vote consensuel sur ce projet de loi. Il ne veut pas de débat sans fin sur le SNU », poursuit cette même source. 

Sur le même sujet : Macron et le SNU : la démocratie au garde-à-vous

Une autre difficulté concernait l’application du SNU. « Si un mouvement de jeunes assure qu’il ne fera pas le SNU, avec des appels au boycott lancés sur les réseaux sociaux, que fait le gouvernement ? Va-t-il interdire à tous les contestataires de passer le bac ? C’est trop risqué », ajoute ce fin connaisseur du dossier.

Prudence, toutefois : ce recul ne signe pas l’arrêt définitif de ce dispositif. Emmanuel Macron pourrait très bien revenir dessus dans les prochains mois. « Cela signale surtout les atermoiements du gouvernement sur ce projet phare du président de la République », dit-on en coulisse. Et du niveau de pression engagé par les mouvements de jeunesse.

Recevez Politis chez vous chaque semaine !
Abonnez-vous
Société
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Je ne veux pas être déportée » : au CRA d’Oissel, la mécanique de l’enfermement
Reportage 27 novembre 2025 abonné·es

« Je ne veux pas être déportée » : au CRA d’Oissel, la mécanique de l’enfermement

Si le centre de rétention administrative (CRA) d’Oissel-sur-Seine, situé en pleine forêt, n’existe pas dans la tête des gens habitant aux alentours, l’enfermement mental et physique est total pour les femmes et les hommes qui y sont retenus. Politis a pu y rentrer et recueillir leurs témoignages.
Par Pauline Migevant
« À Paris, les manifs pour la Palestine doivent être à la hauteur des autres capitales européennes »
La Midinale 26 novembre 2025

« À Paris, les manifs pour la Palestine doivent être à la hauteur des autres capitales européennes »

Anne Tuaillon, présidente de l’association France Palestine Solidarité, est l’invitée de « La Midinale ». Ce samedi 29 novembre, 85 organisations dont LFI, le PS, le PCF, les Écologistes, la CGT et beaucoup d’autres, organisent une grande mobilisation pour la défense des droits du peuple palestinien sur la base du droit international.
Par Pablo Pillaud-Vivien
L’affaire Tran, exemple malheureux d’une justice à deux vitesses
Décryptage 25 novembre 2025

L’affaire Tran, exemple malheureux d’une justice à deux vitesses

112 plaignantes, 1 gynécologue… et 11 ans d’instruction. En 2027, le docteur Tran sera jugé pour de multiples viols et agressions sexuelles. Plaintes ignorées, victimes oubliées, délais rallongés… Cette affaire témoigne de toutes les lacunes de la justice en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Par Salomé Dionisi
« J’étais bloquée face à son pouvoir de médecin »
Entretien 25 novembre 2025 abonné·es

« J’étais bloquée face à son pouvoir de médecin »

Julia* fait partie des nombreuses patientes qui accusent le médecin gynécologue Phuoc-Vinh Tran de viols et d’agressions sexuelles. Treize ans après les faits, elle souhaite prendre la parole pour dénoncer les dégâts que causent les lenteurs de la justice.
Par Hugo Boursier