« Othello » : le sourire cruel du grand William

Avec en son centre le tandem Adama Diop-Nicolas ­Bouchaud dans les rôles d’Othello et de Iago, la mise en scène de Jean-François Sivadier révèle avec bonheur le comique qui loge dans la tragédie de Shakespeare. Et lui donne ainsi une vie intense.

Anaïs Heluin  • 5 avril 2023 abonné·es
« Othello » : le sourire cruel du grand William
© Jean-Louis Fernandez.

La leçon qui ouvre l’Othello de Jean-François Sivadier n’est pas présente chez Shakespeare mais en introduit finement les personnages et les enjeux. Adama Diop, dans le rôle-titre, en est le maître et Émilie Lehuraux, qui joue Desdémone, est son élève. En enseignant à sa future épouse et fille du sénateur Brabantio (Cyril Bothorel) des bribes de wolof, le Maure, ancien esclave devenu général à Venise, est montré dans une position de pouvoir qui ne va pas durer.

Cela rend sa chute imminente d’autant plus abrupte pour le spectateur, à qui le cours inaugural est adressé autant qu’à la jeune amoureuse. Dès l’entrée en scène de Nicolas Bouchaud, en effet, il est clair que le destin d’Othello est scellé. Complice de la première heure de Jean-François Sivadier, soit dès Italienne, scène et orchestre (1997), le comédien incarne ici un Iago – compagnon d’armes d’Othello, qui lui a préféré un dénommé Cassio (Stephen Butel) pour lieutenant – capable d’élever la traîtrise et la manipulation au rang d’art.

Dans cette mise en scène fondée sur la traduction de Jean-Michel Déprats et émaillée d’ajouts divers qui sont autant de délicats anachronismes, Iago-Bouchaud offre un concentré de tous les registres que Shakespeare entremêle dans sa pièce. Alors que les autres personnages ont tendance à s’en tenir à la ligne de conduite qui leur est tracée dès leurs premiers mots, lui ne cesse de se promener de la tragédie à la comédie.

L’humour

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Théâtre
Temps de lecture : 4 minutes