Avignon « in » : Faire la fête sur un brasier

Le Festival d’Avignon entame sa 77e édition dans un climat mouvementé. Se posent les questions de son devenir et de celui du théâtre. Cette interrogation est relayée par l’un des spectacles d’ouverture : le passionnant Extinction de Julien Gosselin, créé en juin au Printemps des comédiens. 

Anaïs Heluin  • 5 juillet 2023 abonné·es
Avignon « in » : Faire la fête sur un brasier
Tiago Rodrigues revendique l’héritage de Jean Vilar, fondateur du festival : l’utopie d’un théâtre populaire.
© Joël Saget / AFP.

Lorsque nous apprenions, en 2021, sa nomination à la tête du Festival d’Avignon, pour succéder à Olivier Py, qui en assurait la direction depuis neuf ans, Tiago Rodrigues présentait dans la Cour d’honneur du Palais des papes sa mise en scène de La Cerisaie de Tchekhov. L’auteur et metteur en scène portugais, directeur depuis 2015 du Teatro Nacional Dona Maria II à Lisbonne, était alors loin d’être un inconnu au sein de ce rendez-vous considéré comme le plus ancien et le plus célèbre de France – et l’un des plus grands au monde. Il y avait déjà présenté deux de ses créations : Antoine et Cléopâtre en 2015 et Sopro en 2017. Il est aussi un grand connaisseur du paysage théâtral français, où son travail a depuis longtemps sa place. Il est toutefois le premier artiste étranger à diriger ce festival créé en 1948 par Jean Vilar, auquel il fait référence par le titre qu’il donne à l’édition qui se déroule du 5 au 25 juillet : « Avignon réunira ».

Tiago Rodrigues revendique ainsi l’héritage de l’utopie développée par le fondateur du festival : celle d’un théâtre populaire, d’un art de service public. Il se place dans la continuité des directions précédentes en invitant dans sa première programmation des artistes déjà venus à Avignon à plusieurs reprises, comme les metteurs en scène Julien Gosselin, Milo Rau et Philippe Quesne, ou encore la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker. Le choix de Julie Deliquet avec Welfare, adaptation du documentaire homonyme de Frederick Wiseman, pour ouvrir le festival dans la Cour d’honneur du Palais des papes indique toutefois un désir d’ouverture à des nouveaux venus. Notamment à des femmes, qui représentent cette année plus de la moitié des artistes. Grâce à un fil rouge consacré à la langue anglaise – chaque édition mettra une langue à l’honneur –, nous pourrons aussi découvrir des personnalités peu connues sur le sol français. Des Britanniques bien sûr, comme Tim Crouch ou l’auteur Alistair McDowall, mais aussi des Australiens, des Nigérians, etc.

Conflits, polémiques et questionnements

Une ombre plane cependant sur cette 77e édition, depuis qu’a été annoncée l’annulation de l’un des spectacles les plus attendus : Les Émigrants, du Polonais Krystian Lupa, d’après le roman de l’Allemand W. G. Sebald, dont le festival a accueilli bien des spectacles. En cause, un conflit entre le metteur en scène et ses collaborateurs et l’équipe technique de la Comédie de Genève, coproductrice du spectacle, où celui-ci devait être créé début juin. Sans précédent pour une création de cette ampleur, le phénomène a d’abord massivement suscité la colère du monde

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Théâtre
Temps de lecture : 8 minutes