Live : Politis au cœur de « Bloquons tout »
Le mouvement « Bloquons tout » s’est lancé, ce 10 septembre. Pour contrer le récit des médias dominants, Politis a proposé son live, toute la journée, avec des reportages, interviews et analyses, depuis les rassemblements et lieux de blocage pour comprendre les revendications de leurs participant·es.

On y est. Deux mois après les premiers messages évoquant, en juillet, une nébuleuse journée de mobilisation le 10 septembre, le mouvement « Bloquons tout » se lance enfin. Une journée inédite, préparée lors des nombreuses assemblées générales tenues un peu partout en France depuis la présentation de la politique austéritaire de François Bayrou cet été, dont le sort a été réglé ce lundi.
Protection des services publics, justice sociale et fiscale, abolition de la réforme des retraites, augmentation du Smic, VIe République… Les revendications, éparses et étalées selon un degré de radicalité très divers, sont surtout portées par la gauche, bien que celle-ci, ainsi que la plupart des syndicats, restent timides.
À Caen, à Saint-Denis, dans la Nièvre et bien d’autres territoires, des centaines de personnes participent à des réunions préparatoires. Le profil des participants est hétérogène : lycéens, précaires, syndicalistes, parents, retraités ou encore anciens gilets jaunes. C’était ce que nous racontions dans ce dossier.
L’objectif du 10 septembre n’est pas seulement de manifester, mais de frapper plus largement les flux – marchandises, travail, consommation – à travers des grèves, des blocages, des actions locales et symboliques. La mobilisation portera nécessairement un écho puissant après le départ de François Bayrou, comme l’anthropologue Alain Bertho l’expliquait dans la Midinale de Regards et Politis.
Dans un paysage politique fracturé, où l’extrême droite continue de progresser et où les institutions apparaissent de plus en plus déconnectées des urgences sociales, cette initiative témoigne au moins d’un fait : la colère est là, diffuse, profonde – et elle cherche ses formes. Le politiste Laurent Jeanpierre s’est prêté au jeu des sept différences avec le mouvement des gilets jaunes.
Pour les entendre, et les comprendre, Politis organise un live toute la journée, avec un traitement bien différent de celui qui est proposé par les chaînes d’info en continu, dégoulinant de violences – mais surtout pas des forces de l’ordre ! – et d’éléments de langage tout droit venus des usines à lexique macroniste. Interviews des participant·es aux actions, reportage depuis les blocages, analyses de personnalités, d’universitaires, de militant·es ou d’artistes : tout sera fait pour vous embarquer avec nous et vivre ce 10 septembre avec le regard d’un média indépendant.
« Bloquons tout », c’est aujourd’hui ! Toute la journée, ce live vous fait vivre ce mouvement inédit. Il est tenu par Salomé Dionisi et Hugo Boursier. Ses contenus sont relus par Pascale Bonnardel, Louis Bolla et Guillaume Deleurence. Toute la rédaction de notre média indé est sur le terrain.
18 h 45. Fin du live !
Alors que les rassemblements (175 000 personnes selon le ministère de l’Intérieur, 250 000 selon la CGT) se dispersent un peu partout en France – souvent moyennant l’usage de gaz lacrymogènes ou par des charges poussives des forces de l’ordre – nous mettons fin à ce live et vous invitons à retrouver notre dossier de ce soir sur cette journée de mobilisation. Demain : analyses et entretien pour comprendre ce qui se joue dans la séquence qui s’ouvre. Merci de nous avoir suivis !
18 h 21. Au nord-est de Paris, place à la fête
Le programme était annoncé depuis plusieurs jours : de 16 h à 19 h, c’est le bal populaire de la place des Fêtes, à Paris, dans le 19e arrondissement. « Je voulais emmener mes enfants, donc j’ai choisi de venir à place des Fêtes, indique Natacha, enseignante au lycée et habitante de l’arrondissement, en grève aujourd’hui. J’ai eu peur d’aller à République ou à Châtelet, quand on voit la répression policière. »
Au cours de l’après-midi, plusieurs activités étaient organisées avant le bal populaire : coloriages sur le sol, match de foot improvisé, animé notamment par Les Dégommeuses, une association qui milite contre toutes les formes de discriminations dans le sport. « On se plaint souvent que les mobilisations se font sans les classes populaires, donc c’est bien d’organiser des choses ici », se réjouit Laurence, une collègue de Natacha, elle aussi en grève.
Dès 16 h, la place se remplit de plusieurs milliers de militant·es, selon les organisateurs de l’événement, alors que les premiers concerts commencent sur la scène installée pour l’occasion. L’ambiance est joyeuse et festive, malgré les averses intermittentes. Les concerts sont entrecoupés de prises de parole de différents collectifs, tels que l’association LGBT Divines, ou encore le Syndicat des gilets jaunes, accueilli par les acclamations de la foule, qui entonne des chants populaires entre deux discours.
Ça fait du bien de voir du monde se réunir pour passer un bon moment.
Capucine
Quelques habitant·es du quartier, curieux, s’arrêtent pour écouter, tandis que les habituels stands improvisés de vente de nourriture et de boissons proposent leurs produits à la sortie du métro.
Capucine, maquilleuse en grève, est venue accompagnée de son amie Lola, étudiante, après avoir participé au rassemblement place de la République en début d’après-midi. « Ça fait du bien de voir du monde se réunir pour passer un bon moment », souffle Lola, qui a décidé de rejoindre le bal populaire après avoir vu plusieurs posts sur les réseaux sociaux. C’est aussi le cas de Simon, employé de commerce dans la vingtaine : « Je suis venu pour faire la fête, j’avais pas vraiment envie de me faire taper et gazer. »
17 h 20. Visage de la mobilisation, place de la République, à Paris : Michel
Michel Ben Youcine, franco-marocain âgée 73 ans. « Depuis 35 ans, je tiens mon stand de sandwichs et boissons dans les manifestations. Je vois passer le monde entier, je parle, j’échange. C’est ma façon d’être là, de participer, d’apporter quelque chose, même si on ne me remarque pas toujours. »
17 h. « La seule solution, c’est que Macron s’en aille »
C’est un mouvement qui en a ras-le-bol de l’ordre établi, d’un président qui n’écoute pas le peuple.
A. Belouassa-Cherifi
Les insoumis jouent gros. Ardents défenseurs d’une destitution du président, Jean-Luc Mélenchon et les siens misent sur la réussite de cette mobilisation pour resserrer l’étau autour d’Emmanuel Macron. À la place Guichard, à Lyon, la députée insoumise Anaïs Belouassa-Cherifi insiste : « Les mots d’ordre sont clairs : “Macron dégage” ou “Lecornu démission”. C’est un mouvement qui en a ras-le-bol de l’ordre établi, d’un président qui n’écoute pas le peuple. La seule solution, c’est que Macron s’en aille et qu’il donne de nouveau la possibilité aux Français de s’exprimer. En juillet dernier, ils ont demandé un changement de politique et leur vote n’a pas été respecté. »
16 h 42. Visage de la mobilisation, place de la République à Paris : Benjamin
Benjamin Beraud, journaliste indépendant, couvre régulièrement les révoltes et les mobilisations sociales. Pour lui, être présent dans la rue est essentiel : « Le journalisme, c’est aussi raconter ce qu’il se passe en manifestation, montrer les différentes luttes et donner la parole à celles et ceux qui ne l’ont pas assez en recueillant leurs récits là où ils se font entendre. »
Être sur place, c’est confronter son métier à la vie réelle.
B. Beraud
Habitué à documenter les violences policières, il insiste sur l’importance de rester connecté à la réalité du terrain. « Quand on se contente d’écrire derrière un écran, on se déconnecte des gens. Être sur place, c’est confronter son métier à la vie réelle. »
16 h 35. L’humoriste, Lou Trotignon : « Nos voix, nos votes ne sont pas entendus »
16 h 30 : La réalisatrice Dominique Cabrera, à propos du 10 septembre
Dominique Cabrera, réalisatrice notamment de Corniche Kennedy (2016) et de Notes sur l’appel de Commercy (2019), à propos de la mobilisation d’aujourd’hui : « La colère monte et elle est légitime. Tant le mépris est manifeste. Et l’urgence sociale et écologique de plus en plus pressante. Les raisons de désespérer s’accumulent. Et l’avenir semble fermé. Que pouvons-nous espérer ? À nous à gauche et ailleurs de trouver les mots, les actes et les moyens pour que ce soit le partage et la fraternité qui l’emportent et pas le désespoir, la fermeture et le repli. Notre responsabilité est immense face au risque raciste et fasciste. Ce mouvement est une chance de ce point de vue. Une chance que la parole se libère et que des acteurs nouveaux apparaissent. »
16 h. À Paris, « toute la culture est dans la rue »
Un abonné nous a partagé ces images depuis le Pavillon Villette, la salle de spectacle du XIXe arrondissement de Paris. Sur place aussi, une syndicaliste de la CGT Culture précise le contour de cette action : « C’est le début d’une occupation permanente par toutes et tous les travailleurs de la Culture, dans ce lieu qui devait accueillir le projet de Rachida Dati ‘pavillon du freestyle' ».
16 h. Le député Abdelkader Lahmar à Vaulx-en-Velin
Les gilets jaunes, ce n’était pas qu’une seule journée.
A. Lahmar
Ce matin, le député insoumis Abdelkader Lahmar s’est rendu à deux points de blocage à Vaulx-en-Velin (Rhône), sur un rond-point et devant l’école de l’aménagement durable des territoires (ENTPE). « Dans les quartiers, c’est difficile de mobiliser. Perdre une journée de travail, c’est compliqué. Mais j’ai senti, et beaucoup plus qu’avant, une certaine forme de solidarité avec ce mouvement », explique-t-il. L’insoumis rêve déjà d’un acte II : « Quand on se mettait en grève avant, c’était des grèves illimitées. Et ensuite, petit à petit, la protestation est devenue plus ponctuelle. Ça ne suffit pas. Si on descend dans la rue un jour pour protester et que le lendemain on retourne au travail, on ne va peut-être pas atteindre les objectifs attendus. Les gilets jaunes, ce n’était pas qu’une seule journée. »
15 h 29. À Paris, les Halles et la place de République sont pleines
Depuis plusieurs heures, deux lieux à Paris sont devenus des points de rassemblement importants : le quartier des Halles et la place de la République. De nombreux collectifs y sont présents, ainsi que des partis politiques et des syndicats. Plusieurs milliers de personnes s’y trouvent. Des charges policières ont démarré aux Halles, alors que des cortèges se dispersent ailleurs.
15 h 22 : Du monde à Lille !
C’est un habitué de Politis qui nous envoie cette image à Lille, du côté de la porte de Paris :
10 septembre : les chiffres de la colère
Des inégalités qui se creusent. La pauvreté qui se renforce. Il suffit d’une poignée de statistiques pour comprendre à quel point la politique d’Emmanuel Macron a abîmé les conditions de vie de millions de personnes. Tout en favorisant les plus riches… Deux infographies pour comprendre cette situation :
« Bloquons tout » et gilets jaunes, même combat ?
« Si la composition du mouvement “Bloquons tout” et ses modes d’action sont éloignés de ceux des gilets jaunes, il obtient le même degré de sympathie auprès des habitants de quartiers populaires. Peut-être même davantage, comme si avec le temps le mouvement était devenu un repère politique », note Ulysse Rabaté, chercheur en sciences politique et acteur engagé dans la vie locale à Rennes.
Emmanuel Macron a structuré contre lui un bloc hétérogène mais qui a comme point commun une colère vive contre le mépris social et politique.
U. Rabaté
Pourquoi ? Parce qu’ils projettent « sur ce mouvement l’image d’une classe populaire qui lève la tête », analyse le président de l’association Rennes Commune. Alors même que les personnes qui ont participé ce matin aux blocages et aux rassemblements appartiennent majoritairement à des cercles de militants très engagés.
« Emmanuel Macron a structuré contre lui un bloc hétérogène mais qui a comme point commun une colère vive contre le mépris social et politique. » « Dans les quartiers, les gens qui soutiennent et qui n’ont pas la pratique des cortèges de manif réfléchissent à des manières de s’exprimer. » Sur ce sujet, le politiste, Laurent Jeanpierre, qui a travaillé sur le mouvement des gilets jaunes, nous a accordé un entretien dans dernier notre hebdo. C’est à retrouver ici.
14 h 20. Préfecture de l’Essonne
Devant la préfecture, Matthieu Trenel est venu représenter les travailleurs de l’énergie, en grève reconductible depuis le 2 septembre pour une revalorisation de 9 % de leur grille salariale. « Il y a du monde aujourd’hui mais on peut encore faire mieux », confie-t-il. Le cégétiste distribue des tracts appelant à la mobilisation interprofessionnelle le 18 septembre prochain. « On le sent, ça va prendre », assure celui qui reste aussi concentré sur la lutte dans son entreprise. « Nos employeurs nous ont envoyé un courrier pour qu’on se mette autour de la table pour négocier. C’est déjà une avancée. » Le rassemblement s’élance, direction le siège du Medef Essonne. « Le trajet est pensé pour interpeller le préfet, représentant de l’État, et le patronat », glisse un participant.
14 h 15. La pluie s’est invitée à Flers (Orne) mais la mobilisation ne s’essouffle pas
Une cantine militante, baptisée la Barrica frites s’installe au bord de la route pour nourrir la lutte : frites maison, falafel, tomates, café, thé… Une veganaise est fouettée avec une perceuse. Système D. Manon distribue des cornets de frites aux automobilistes stoppés par le barrage filtrant. Un couple d’Anglais accepte avec plaisir.
C’était important d’être présente sur un rond-point, et pas seulement dans les espaces militants habituels.
Manon
« J’ai décidé de faire grève aujourd’hui car je suis très inquiète par la situation économique et écologique, résume Manon, 31 ans, salariée dans une association locale. Pour moi, l’idée de convergence des luttes a un sens. C’était important d’être présente sur un rond-point, et pas seulement dans les espaces militants habituels. » Soudainement, une botte de foin est déposée sur la route et le foin étalé sur le bitume. « Macron nous met sur la paille, voilà le résultat ! » Les forces de l’ordre se rapprochent : ils signalent fermement que le délit d’entrave à la circulation et menacent les personnes présentes de garde à vue.
14 h. À Antibes
Alex, un lecteur de Politis, nous indique qu’à Antibes, la circulation est complètement bloquée par intermittence, par 100 à 150 manifestants. Une trentaine de policier est en observation, il n’y a pas de violences.
13 h 45. Rassemblement devant la CAF versaillaise
Loin du tumulte parisien, c’est devant la grille verrouillée de la CAF des Yvelines qu’une trentaine de personnes sont réunies depuis 11 h, à quelques mètres de la gare de Versailles-Chantiers, selon notre correspondant Thomas Lefèvre. « C’est bien qu’il y ait un truc à Versailles », lâche Elsa, qui a vu passer l’appel sur les réseaux sociaux, relayé notamment par le Mouvement des mères isolées.
« Les Yvelines, ce n’est pas vraiment un territoire de luttes », regrette Gilles, retraité du secteur de l’aérospatial et militant syndical à la CGT. « C’est souvent les mêmes personnes que l’on croise par ici lors des mobilisations », confirme Évelyne, libraire à la retraite. En début d’après-midi, toujours pas de drapeaux de syndicats à l’horizon. La plupart des sympathisant·es présent·es ont décidé de venir ici parce que c’était proche de chez eux et pour « éviter les violences policières à Paris », concède Évelyne.
Les Yvelines, ce n’est pas vraiment un territoire de luttes.
Gilles
De son côté, Cha, une habitante du département, a décidé de ramener une table en plastique et d’installer une « bibliothèque militante » avec des livres engagés qui traînaient chez elle. « Je ne fais pas partie du collectif, mais j’ai vu que le rassemblement était ouvert aux enfants, explique-t-elle. Je me suis dit que comme ça, ils pourraient bouquiner ! » Malgré la pluie fine de cette fin de matinée, la petite foule devant le centre administratif discute déjà de la suite du mouvement.
Une assemblée générale est prévue aujourd’hui à 18 h à Guyancourt (78), comme on peut le lire sur les tracts distribués aux passant·es. « On espère un 11, 12, 13 septembre… Voire des rendez-vous hebdomadaires ! », prévoit Delphine, travailleuse sociale au chômage, qui a découvert la mobilisation lors de l’assemblée générale de Trappes de samedi dernier. Alors que les rayons du soleil refont leur apparition aux alentours de 14 h, la foule commence à se disperser.
13 h 26. À Paris, des mères isolées devant la direction de France Travail
Rassemblement devant la direction de France Travail à l’initiative des mères isolées. Deux femmes sont venues en soutien, selon notre journaliste Pauline Migevant : « Il faut toujours avoir de l’espoir. Nous, nos enfants nous disent : “on n’est pas considérés comme français.” » Au micro, les prises de parole s’enchaînent. Une trentaine de personnes les écoutent. Nadia Meziane, du collectif Ligne de crêtes, affirme : « Je tiens à le dire les gens qui ont lancé le 10 septembre, c’est les précaires, ceux qui ne sont pas partis en vacances, la moitié des Français. » Un homme, habitant les Lilas, passe à côté du rassemblement. « Ah c’est bien ! Je suis handicapé à cause de mon dos, je peux plus bien marcher mais mon cœur est avec vous, toujours connecté. »
13 h 15. À Paris, place de la République
La place de la République est occupée par des centaines de personnes, en réponse à l’appel de la Marche des solidarités, des collectifs de sans-papiers et de mineur·es isolé·es. Dans ce camp de base antiraciste et antifasciste, différents collectifs sont présents. Notamment la Confédération nationale du travail (CNT) ou le Syndicat des travailleureuses du jeu vidéo (STJV). Pour ce dernier, être mobilisé aujourd’hui est la « suite logique d’un mouvement de grève initié en février dernier » dans leur secteur.
Un mouvement qui veut « dénoncer les mauvaises pratiques qui ne reversent rien de l’argent public aux salariés et sont contre toutes leurs formes d’expression ». Dénoncer aussi comment « les jeux vidéo sont utilisés pour répandre des idées fascistes ». Et finalement, « toutes les revendications se retrouvent ici » aujourd’hui. Le STJV proteste contre le budget qui offre « encore plus de cadeaux aux entreprises, en sacrifiant la santé ». Postes supprimés dans les hôpitaux, restriction des allocations allouées aux personnes handicapées. « Il n’y a plus de démocratie nationale. »
13 h. À Tarbes
À Tarbes (65), un rassemblement a lieu devant la mairie, nous explique notre correspondante Marie-Pierre Vieu. Des lycéens de Marie Curie ont débrayé dès 7 h, et des intermittents du spectacle et des gilets jaunes sont sur place. Des prises de paroles pour la Palestine, et des discours en occitan. Entendu sur place : « Depuis Sarkozy, on a appris à jalouser le plus pauvre que soi. Arrêtons », et « nous sommes les invisibles de la République. Celles et ceux à qui on ne donne plus la parole ».
13 h. Devant La Sorbonne, Paris
Depuis midi, nous indique notre journaliste Christophe Kantcheff, quelques centaines d’étudiants se sont réunis devant La Sorbonne pour défendre le droit à l’éducation et les services publics, dénoncer l’État policier et appeler à la grève générale et à la solidarité avec « les travailleurs du monde entier ». Le rassemblement se déroule dans une atmosphère festive, avec de la musique assurée par les étudiant.e.s. La police se tient discrète boulevard Saint-Michel.
13 h. « Il va falloir être plus créatif » : une passation sous hallucination
Passation très courte entre l’ancien et le nouveau premier ministre. « Il va falloir changer. Être surement plus créatif. Parfois plus technique et plus sérieux dans la manière de travailler avec nos oppositions. Mais il va aussi falloir des ruptures sur la méthode et sur le fond », a prévenu Sébastien Lecornu. Bayrou appréciera. C’est cadeau !
12 h 54. Les cheminots sortent d’une AG à gare du Nord
L’assemblée générale de Sud Rail est terminée. Anthony, agent SNCF, témoigne : « La gare du Nord, c’est chez nous (…) On est là parce qu’on veut qu’il y ait du changement, il faut que les travailleurs se mettent ensemble. C’est le début de quelque chose, il faut faire naître une flamme ! »
12 h 41. MC Danse pour le climat, de Planète boum boum : « On veut résister dans la joie »
Il y a certains sons qu’on n’oublie pas. « Planète brûlée », en pleine bataille contre la réforme des retraites, en fait partie. Mathilde, alias MC Danse pour le climat, du collectif Planète boum boum, l’une des autrices de ce banger, continue d’ambiancer les cortèges. Cette fois-ci, c’est pour le 10 septembre. Les techno-activistes ont proposé un kit sonore de mobilisation. « On veut amplifier les cortèges par la danse, le chant, parce que la fête permet d’occuper l’espace », explique-t-elle. « Contre ce système qui ne fait que nous oppresser, nous diminuer, nous silencier, on veut montrer que la résistance passe par la joie et la danse. »
12 h 13. À Montélimar, « McDo distribue 1 milliard par an à Israël »
Des nouvelles de la deuxième plus grande ville de Drôme, par un habitué de Politis. La journée a commencé dès 7 heures par des blocages de ronds-points. Ensuite, 600 personnes, assure notre source proche d’Attac, ont convergé devant le McDonald’s, afin de le bloquer et d’y dénoncer ses intérêts communs avec le gouvernement israélien. La foule s’est ensuite dirigée vers l’agence du Crédit agricole puis l’artère commerçante de la ville. D’autres actions sont prévues cet après-midi.
12 h. Brétigny-sur-Orge, arrivée devant Amazon
Le cortège vient tout juste d’arriver devant le piquet de grève d’Amazon. Selon les estimations de notre journaliste, Pierre Jequier-Zalc, près de 200 personnes sont venues prêter main forte au mouvement initié par les salarié·es d’Amazon, comme Rita. Elle est agente d’exploitation logistique chez Amazon depuis 6 ans. Ce 10 septembre, elle est en grève pour demander « des droits salariaux dignes ». « Elle aide beaucoup ses collègues », nous glisse l’une de ses camarades. Aujourd’hui, leur mouvement à deux cibles : « notre direction avant tout, et Emmanuel Macron », explique Rita. Au sein du cortège où flottaient des drapeaux Solidaires, Révolution permanente et France insoumise, le député LFI de la circonscription, Antoine Léaument, explique les raisons de sa présence.
Joseph, salarié chez Amazon, au micro : « Je veux parler de nos conditions de travail. Nous sommes dans une entreprise qui fait des bénéfices colossaux, dont les salariés ne voient pas la couleur. Nos salaires ne suivent pas. On nous met une pression forte avec des quotas à réaliser. Aujourd’hui, nous voulons crier notre ras le bol. Contre notre direction et aussi contre Emmanuel Macron. On l’a bien vu avec leur budget, ce sont toujours les salariés qui trinquent. Nous sommes les oubliés alors que nous nous levons à 3 h du matin, et que nous produisons des richesses. Nous ne lâcherons rien. »
11 h 53. À Flers, dans l’Orne
« C’est normal de ralentir le trafic, vous avez raison ! Tous les secteurs sont touchés par la crise. Faut repartir de la base de la pyramide », déclare Laurent* en ouvrant sa vitre pour récupérer un tract. Routier depuis plus de quinze ans, il a bien vu l’évolution de la situation économique et les conséquences de la désindustrialisation. « Aujourd’hui, je suis dans le transport de marchandises en camion frigorifique et c’est de plus en plus difficile, car les boîtes étrangères nous bouffent tout le marché. Comment on va s’en sortir ? », s’interroge-t-il, dépité.
Les prénoms suivis d’une astérisque ont été changés.
En soutien au mouvement, il s’arrête une bonne quinzaine de minutes pour discuter… Jusqu’à ce que la police vienne faire la circulation. « Merci pour le café ! Et montrez que cette mobilisation est bon enfant ! », clame-t-il en repartant tranquillement. Serge*, travailleur dans la santé, et Camille*, dans l’enseignement, sont sur le rond-point depuis ce matin. Ils acquiescent tout au long de la discussion. Depuis vingt ans, Flers et ses alentours sont touchés par la désindustrialisation, et cela continue. En avril dernier, l’équipementier automobile Forvia (ex-Faurecia) a annoncé la fermeture du site de Messei en décembre 2026.
On voulait avoir un impact local, pour montrer que personne ne cède à la peur et que ça bouge aussi dans les territoires semi-ruraux !
« C’est pour cela qu’il faut critiquer le budget de Bayrou. Les économistes disent bien qu’il faut investir des secteurs vitaux pour la société. Produire de l’armement ne ruisselle pas sur nous ! », lâchent Serge et Camille. Le slogan de la mobilisation du jour à Flers est : « Des milliards pour les bombes, des miettes pour nos vies. » Syndiqués tous les deux, ils sont venus en tant que citoyens, pour faire de la pédagogie et la jonction avec les personnes en dehors du monde syndical. « On voulait avoir un impact local, pour montrer que personne ne cède à la peur et que ça bouge aussi dans les territoires semi-ruraux ! » Ils espèrent être au jour 1 d’un mouvement sur le long terme.
11 h 53. Rachel Keke : « Ça commence le 10 mais ça ne doit pas s’arrêter »
L’ancienne députée du Val-de-Marne, connue pour son implication dans la bataille des retraites en 2023, forte de sa lutte victorieuse des femmes de chambre de l’hôtel Ibis-Batignolles, a répondu à quelques questions de Politis. « C’est très important d’être présente aujourd’hui. Cette mobilisation sert aussi à dire qu’il faut changer la manière de faire de la politique. » L’ex élue n’a pas été surprise de l’engouement du mouvement, « Bloquons tout ». « Quand on voit les hôpitaux, quand on voit les écoles, quand on voit que les jeunes galèrent et que les salaires n’augmentent pas, on ne peut pas s’étonner de la colère générale. Il faut s’unir, s’organiser, et bloquer ! », lance celle qui a créé une nouvelle association, D’invisible à visible.
11 h 31. Devant le ministère du Travail
Plus d’une centaine de syndiqués de la CGT sont mobilisés depuis 9 h 30 devant le ministère du Travail, où se trouve notre journaliste Caroline Baude. Coco a 54 ans, il est sur les lieux depuis plus d’une heure. Il y restera « longtemps ». Depuis quinze ans, il travaille dans la chimie pour un grand groupe. Le quinquagénaire s’est syndiqué en mars dernier, à force de constater des problèmes dans son entreprise. S’il est présent à ce rassemblement, c’est pour « que les puissants arrêtent de se protéger en tapant les plus petits. Je suis père de famille, je ne vais pas au travail pour faire n’importe quoi ».
Les prises de parole s’enchaînent sur une estrade montée pour l’occasion. L’objectif est de « transformer la colère en mouvement collectif » et réclamer à l’État ce qu’il doit aux travailleurs. Une dizaine de camions des forces de l’ordre bloquent la parcelle de route devant le ministère.
11 h 12. Des chiffres, des chiffres, des chiffres !
Bruno Retailleau est un ministre démissionnaire. Mais les services de l’Intérieur bossent toujours. Le ministère égraine quelques chiffres pour faire le point de la situation à 9 h 30. Selon Beauvau, il y aurait plus de 200 interpellations partout en France et 48 actions de déblocage. « Les manifestants sont particulièrement revendicatifs dans les grandes agglomérations », note la communication de l’Intérieur. Dans le viseur du ministère : Rennes, Nantes, Grenoble, Lyon, Lille, Caen et Toulouse. Ah, ces dangereux bloqueurs ! À la fin de la journée, aurons-nous le bilan des violences policières ?
11 h 07. Direction Amazon !
Pour une fois, ce n’est pas un colis qui va sortir de l’entrepôt, mais des dizaines de militants qui vont le rejoindre. Devant la gare de Brétigny-sur-Orge (Essonne), le cortège va partir en manifestation vers le site Amazon où un piquet de grève doit débuter (normalement) à midi. Ambiance bon enfant.
11 h. À Paris, place de la République, les premiers manifestants prennent place sous la fine pluie
Sous les premières gouttes de pluie, la place de la République s’anime. Le rassemblement s’ouvre sur un chant, l’hymne national des travailleurs : « Liberté, égalité, fraternité, solidarité aux sans-papiers ! » Parmi les initiateurs de cette Marche des solidarités, Ousmane Sissoko, porte-parole et membre actif de l’inter-collectif des sans-papiers d’Île-de-France, revient sur l’origine du blocus du 10 septembre au sein du mouvement. « C’est nous, le mouvement des sans-papiers, qui avons ramené cette discussion à la Marche de Solidarité », explique-t-il.
Ne pouvant pas bloquer le pays ni gêner les transports pour des raisons de sécurité, ils ont trouvé une solution : organiser un rassemblement autorisé de 11 h à 20 h sur la place de la République. « C’est une manière de se mobiliser tout en restant protégés, et cela permet aux sans-papiers comme aux autres manifestants de se retrouver et de se faire entendre », précise-t-il.
À 12 h, le soleil revient et la foule s’épaissit. Le ciel se dégage et la place se remplit progressivement. Jeunes isolés, sans-papiers, jeunes, et sympathisants rejoignent le rassemblement pancartes à la main. L’objectif reste clair : demander le départ du gouvernement et de Macron, la régularisation de tous les sans-papiers et la libre circulation pour toutes et tous.
Parmi les participants, Abdourahmane, membre du collectif des jeunes du parc de Belleville, explique leur démarche : participer au bloc du 10 septembre dans le cadre d’une manifestation autorisée est une manière de « faire le blocus » sans mettre en danger le collectif ni les autres immigrés présents. Pour lui, il s’agit aussi de « dénoncer le racisme, le fascisme et l’islamophobie, tout en revendiquant l’égalité des droits ».
Rayane étudiante âgée de 19 ans, est venue soutenir la mobilisation. Elle explique que sa présence n’est pas simplement symbolique : il s’agit d’exiger de vrais changements politiques. Pour elle, changer le visage du premier ministre ne suffit pas « si les mêmes politiques d’austérité continuent de peser sur la jeunesse et les classes populaires » explique-t-elle, pointant Macron comme le « patron des milliardaires ».
13 h : arrivée des collectifs et manifestants voisins. Les manifestants de l’hôpital Tenon arrivent sur la place aux côtés d’urgence Palestine. La foule s’intensifie, drapeaux et fumigènes. Le rassemblement se poursuivra jusqu’à 20 heures, et plusieurs collectifs ont annoncé sur les réseaux sociaux qu’ils allaient rejoindre la manifestation. L’énergie sur la place ne s’éteint pas et promet de durer jusqu’à la fin de la journée. « La lutte doit continuer », conclut Abdourahmane.
10 h 43. Hôpital Tenon, Paris 20e
Dès les premières heures de la matinée, un cortège de manifestants s’est rassemblé devant l’entrée principale de l’hôpital. La mobilisation, annoncée depuis plusieurs jours, a réuni soignants, patients, élus, jeunes et habitants du quartier. Tous étaient venus défendre un même objectif, selon notre journaliste sur place Kamélia Ouaïssa : soutenir un système de santé en difficulté et exiger des conditions de travail dignes.
Des pancartes brandies affichent des messages sans équivoque : « Rendez les budgets », « Santé en lutte ». Pour Éveline, aide-soignante, cette mobilisation traduit « un ras-le-bol de la politique Macron ». Son collègue Nicolas, technicien de laboratoire, témoigne des coupes budgétaires, des fermetures de lits et du manque criant de matériel, qualifiant la situation d’« inadmissible ».
Clémentine Autain, députée NFP de Seine-Saint-Denis, a rejoint le rassemblement et décrit la présence des élus comme « essentielle », surtout après « l’annonce du premier ministre Lecornu, clone de M. Bayrou », ironise-t-elle. Pour elle, « les enjeux de santé sont primordiaux et maltraités depuis trop longtemps. Il était donc important de venir soutenir les grévistes de l’hôpital public ce matin. Parmi les premiers à subir de plein fouet l’austérité budgétaire. Ils rappellent ce que signifie faire société ».
À 10 h 43, le service hospitalier occupe désormais la cour de l’hôpital, accompagné d’une fanfare. « Ce mouvement, il n’est pas pour les fascistes, il n’est pas pour les racistes », scande un manifestant, en réponse aux attaques contre l’aide médicale d’État (AME). Mais tous les soignants n’ont pas pu se joindre au mouvement. Certains, assignés à leurs postes, expriment leur frustration. « La colère est grande à l’hôpital », explique Hugo, aide-soignant. Nicolas dénonce quant à lui « une honte que les cadres et chefs de service ne libèrent pas leurs équipes. Eux-mêmes devraient descendre manifester ». « Nos dirigeants sont totalement déconnectés », estime encore Nicolas. « Il faudrait que des soignants siègent au gouvernement. »
La solidarité avec la Palestine s’est aussi invitée dans la mobilisation, avec slogans et drapeaux rappelant l’importance de lier les luttes. Pour de nombreux soignants, ce 10 septembre marque un point de départ. « Aujourd’hui n’est que le commencement, les politiques doivent comprendre que les soignants sont à bout », résume Nicolas. Certains manifestants invitent à la grève dès la semaine prochaine.
10 h 34 : « À chaque budget, c’est la culture qu’on sabre »
Manon Boltansky, militante CGT Culture à la Bibliothèque nationale française, nous évoque la situation dégradée dans le secteur culturel. À écouter ci-dessous.
10 h 10. Le lapsus de Retailleau
Le ministre démissionnaire de l’Intérieur tient une conférence de presse, place Beauvau, et évoque la nature de la mobilisation : « Ça n’a rien d’une mobilisation citoyenne. Elle a été détournée, confisquée, captée par la mouvance de l’extrême gauche, de l’ultra gauche, appuyée par le mouvement des insoumis. C’est très clair dans les modes opératoires et les modalités. On a des groupuscules aguerris, souvent masqués, cagoulés, ou l’on remarque la marque, l’ADN, la mouvance de l’extrême droite… euh de l’extrême gauche. »
Des photos de la mobilisation à Paris
Notre journaliste et photographe Maxime Sirvins nous fait parvenir ces clichés.
Ça ressemble à quoi, l’extrême centre ? L’historien spécialiste de la Révolution, Pierre Serna, s’est penché sur la question. Il en a fait un livre percutant, en faisant remonter ce mouvement politique depuis 1789 jusqu’à… Emmanuel Macron. Et la répression actuelle du mouvement du 10 septembre illustre parfaitement la thèse de l’auteur de L’Extrême centre ou le poison français, 1789-2019 (Champ Vallon, 2019). Il nous racontait tout ceci dans cet entretien, libéré par nos abonnés.
9 h 43. Des caddies à Chambéry
L’image parle d’elle-même. Elle nous a été transférée par un proche de Politis. C’est à au rond-point de la zone commerciale de Chamnord, à Chambéry.
9 h 42. À Flers, dans l’Orne
À Flers, dans l’Orne, le rendez-vous était donné sur le parking du Décathlon, dans la zone commerciale, à l’entrée de la ville où s’est rendue notre journaliste Vanina Delmas. L’idée était de s’organiser pour la suite. Après 20 minutes de discussions, l’idée émerge d’aller sur le rond-point le plus proche pour distribuer des tracts aux automobilistes et les inciter à rejoindre le mouvement. « Mais on nous a dit que si on bloquait la route, les forces de l’ordre feraient usage de la force », glisse Florian*. La cinquantaine de personnes se déploie sur le rond-point et opte pour le barrage filtrant. Deux jeunes s’arrêtent avant de repartir travailler. « Promis, je n’achète rien aujourd’hui ! », déclare l’une d’elles. Beaucoup de routiers klaxonnent en soutien.
Les prix augmentent tellement qu’on n’a quasiment plus rien dans le caddie pour 100 € !
Au bout de quelques minutes, les forces de l’ordre estiment qu’un axe est bloqué depuis trop longtemps. Les sommations de dispersion tombent puis une bonne dose de lacrymogène. « C’est honteux de charger 50 personnes ! C’est la première fois que je vois ça ici alors que je manifeste dans le coin depuis des années ! » s’indigne Sylviane, 62 ans, auxiliaire de vie retraitée depuis quinze jours. « Il faut se sentir concerné ! Les prix augmentent tellement qu’on n’a quasiment plus rien dans le caddie pour 100 € ! » Le pire, dit-elle, c’est l’essence.
L’entreprise dans laquelle elle travaillait ne remboursait le carburant qu’à partir du quinzième kilomètre. « Tout était arrangé pour qu’on fasse moins, donc c’était de notre poche. J’ai été obligée de prendre un autre boulot pour payer mon essence. » Elle a évidemment participé aux gilets jaunes et aux manifestations des retraites. Elle se mobilise encore aujourd’hui car elle pense à l’avenir de ses enfants et ses petits-enfants, mais regrette de ne pas même plus pouvoir manifester sereinement.
8 h 55. Quartier Villejean, à Rennes
Ça bouge fort à Rennes, aussi. Au rond-point stratégique de la route de Bresse, des grenades lacrymogènes ont été lancées par la police. Régine Komokoli, co-fondatrice du collectif Kuné, qui réunit des mères isolées, y était. « C’est important, nous les mères solo, d’être présentes. Ce mouvement représente pour nous une occasion d’être écoutées. La politique du gouvernement nous précarise et nous stigmatise dès qu’il y a un problème. » « On entend les discours de l’extrême droite qui nous traitent d’“assistées”, pendant que le gouvernement nous demande “où sont les pères ?”, au lieu de s’attaquer aux vraies inégalités », ajoute l’élue écologiste au département. Les personnes présentes à ce rond-point vont ensuite se diriger vers la dalle Kennedy, puis naviguer dans le quartier avant de rejoindre le centre-ville.
8 h 39. Blocage au lycée Monet, à Paris
Au lycée Monet, où se trouve notre journaliste Pauline Migevant, environ 240 élèves bloquent le lycée. Pour Rayan*, 14 ans, en seconde, c’est son premier blocus : « Les politiciens se moquent de nous, c’est le NFP qui avait gagné. Ils ne nous respectent pas avec le premier ministre que Macron a encore choisi. » Cette année, il est allé à deux manifestations antiracistes et une pour la Palestine. Il ajoute : « C’est très grave que notre pays soutienne Israël. » Il porte un maillot de la Palestine qu’il précise avoir caché quand il est passé devant les voitures de police aux abords du lycée.
On a appris qu’il y avait eu au moins 65 interpellations alors qu’il est que 8 h 35. Si après ça on dit que la France est encore un état de droit, on se trompe.
À côté de lui, Chloé*, 15 ans, en seconde elle aussi. « Ça nous concerne tous ce qui se passe », déclare-t-elle. Au micro Théo*, étudiant aux Grands Moulins (Université Paris Cité), les félicite : « Bravo les jeunes pour votre mobilisation ! » Il a eu des échos de la répression : « On a appris qu’il y avait eu au moins 65 interpellations alors qu’il est que 8 h 35. Si après ça on dit que la France est encore un État de droit, on se trompe. La répression policière est partout. On applaudit ceux qui ont été arrêtés par la police. » Tous applaudissent.
Les prénoms suivis d’une astérisque ont été modifiés.
8 h 35. Portrait de Jérôme, menuisier
Jérôme habite Orsay. Il tient un lieu de « vie commune » dans la ville. Aujourd’hui, il est venu avec sa bicyclette des années soixante-dix pour « imiter Rémi Gaillard » et ralentir la circulation « tout en faisant rire ». Après plus d’une heure de tour de rond-point, il s’arrête, prend un sac-poubelle et ramasse les déchets. Une pancarte traîne au sol : « Start up for kids ». Il souffle : « C’est dingue quand même non ? » Cela fait plus d’une semaine qu’il fait des assemblées générales (AG) pour préparer la mobilisation. Manifester n’est pas forcément son habitude même s’il reste engagé au quotidien. Pourquoi est-il venu aujourd’hui ? « Pour évacuer Macron. Le rayer de l’histoire de France, tout simplement. »
8 h 23. Le regard d’Olivier Besancenot
Notre secrétaire de rédaction, Louis Bolla, a posé quelques questions à l’ancien porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste.
Du pareil au même. Mardi 9 septembre, dans la soirée, Emmanuel Macron a nommé un de ses plus proches fidèles, l’ex-ministre des Armées, Sébastien Lecornu, au poste de premier ministre. Qu’incarne cet homme loué pour sa discrétion et son sens politique ? L’ombre du chef de l’État. Le co-directeur de Politis, Pierre Jacquemain, s’est fendu un parti pris à ce sujet. C’est à lire ici.
8 h 19. À Lyon, l’École normale supérieure est bloquée
Pas de cours à l’ENS ! C’est un habitué de Politis qui nous rapporte l’information. Dans un mail qui nous a été communiqué, la directrice générale des services annonce que « les enseignements ne pourront avoir lieu en présentiel pour la journée ».
8 h 08. À Orsay, la technique du vélo
Pierre Jequier-Zalc, toujours le long de la N118, a capturé une stratégie roulante de ralentissement de la circulation. C’est à voir dans la vidéo ci-dessous. Juste avant, deux manifestants interrogés soufflaient : « On espère que ça va changer les choses, c’est un peu notre dernier espoir. » L’un est militant à Sud Santé. Il est venu sans gilet syndical, « pour voir ». Dans son hôpital, les gens étaient « très réceptifs à l’appel du 10 ». L’autre, munie d’un sombrero, explique s’être « réveillée » depuis la crise sanitaire. « Il faut bien qu’il se passe enfin quelque chose contre Macron ! »
7 h 47. Ivry-sur-Seine
À l’hôpital Charles Foix, à Ivry-sur-Seine (94), les personnels de l’hôpital distribue des tracts à leurs collègues entre le shift de nuit et de jour. Michel, agent administratif et membre du syndicat Sud et Audrey, infirmière et secrétaire générale de la CGT de l’établissement, expliquent que leurs collègues les soutiennent. Des grévistes ont été réquisitionnés pour que l’hôpital continue de fonctionner. « Mais grève ou non il manque toujours du personnel », expliquent-ils. Dans cet hôpital, 130 lits ont fermé, faute de personnel.
« La situation est alarmante, surtout pour la nouvelle génération de professionnels [du soin]. L’avenir est incertain à cause des conditions de travail. La charge de travail a été multipliée, c’est très compliqué pour les collègues de s’occuper des patients. »
7 h 35. Orsay
Le long de la N118, près d’Orsay, notre journaliste, Pierre Jequier-Zalc couvre un tractage réalisé par une trentaine de personnes. « Que pensez-vous du gouvernement ? », demande un jeune participant. « Pas beaucoup de bien », cingle un conducteur, avant de partir. Là-aussi, la présence policière est importante.
7 h 20. Porte de Montreuil, Paris
Après quelques barrières entreposées pour bloquer l’entrée vers le périphérique parisien, plusieurs dizaines de personnes se sont rassemblées, non loin du siège de la CGT. D’ailleurs, quelle est la position de la centrale par rapport au mouvement, « Bloquons tout » ? Pierre Jequier-Zalc, notre journaliste économie-social, donnait des précisions ici. Plus de 300 syndicalistes ont publié une tribune dans nos colonnes pour pousser à rejoindre activement le mouvement. Maxime Sirvins, toujours sur place, nous envoie cette vidéo :
7 h 00. Porte de Bagnolet, Paris
Il n’a fallu qu’une poignée de minutes pour que les premières interpellations commencent. À la porte de Bagnolet, une unité de la Brav-M, accompagnée d’une compagnie d’intervention (1-CI) a embarqué une quinzaine de personnes. À 7 h 00, plusieurs dizaines de personnes ont finalement été contrôlées. Ce dispositif policier n’est pas surprenant. Il a été annoncé clairement par un document interne du ministère de l’intérieur que nous avons pu consulter. Beauvau exige ainsi des « interpellations automatiques » afin « faire systématiquement l’objet d’un déblocage dans les plus brefs délais ». On vous en dit plus dans ce dossier concocté par notre spécialiste en maintien de l’ordre.
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