« Une société qui sacrifie son enfance se condamne »
À l’occasion de la journée internationale des droits de l’enfant, la députée communiste Elsa Faucillon invite à se questionner sur le traitement politique de l’enfance.

© Thomas Lefèvre
Trente-six ans après l’adoption de la Convention internationale des droits de l’enfant (Cide) il est difficile de ne pas s’alarmer : la reconnaissance pleine et entière de chaque enfant comme sujet de droits demeure loin d’être acquise.
Ce qui devait être une évidence, c’est-à-dire la protection, la dignité et la participation de tous les enfants, reste trop souvent un horizon lointain.
À l’échelle mondiale, le constat est sévère : le délaissement de l’enfance comme sujet politique se généralise. Les États ne tiennent pas les engagements qu’ils ont solennellement pris et certains semblent même s’en éloigner davantage. Les coupes drastiques dans l’aide au développement de plusieurs pays, dont la France, ou encore la dissolution de l’USAID par l’administration Trump, exposent des millions d’enfants à des dangers immédiats.
Ces décisions ne sont pas abstraites : elles condamnent des existences entières, compromettent l’accès à l’éducation, à la santé, à la protection, à la sécurité.
On ose parfois justifier ces choix au nom de « priorités nationales » au détriment de l’intérêt supérieur de l’enfant. Non seulement cet argument piétine l’esprit et la lettre de la Cide, mais il révèle surtout un autre constat alarmant : chez nous non plus, les enfants ne sont pas une priorité.
Aujourd’hui, l’histoire se grippe et c’est tout sauf une bonne nouvelle.
Il suffit d’observer l’état de notre école publique, l’explosion du taux de pauvreté chez les enfants, le nombre croissant d’enfants contraints de dormir à la rue, les retards dramatiques dans la prise en charge de la santé mentale des jeunes, l’augmentation des dispositifs répressifs lorsqu’ils se mobilisent, le recul progressif des principes protecteurs de l’ordonnance de 1945, les dysfonctionnements dangereux de l’aide sociale à l’enfance (ASE)… À cela s’ajoute la faible promotion de la participation des jeunes à la vie publique, la remise en cause de la parole des enfants victimes de violences sexistes et sexuelles (VSS), ainsi que la faiblesse de la réflexion face aux dangers auxquels ils sont exposés sur les réseaux sociaux.
Et ce délaissement touche plus particulièrement les enfants de milieux populaires – précarisés ou exploités en filière professionnelle, plus encore les enfants d’ascendance immigrée et les enfants étrangers arrivant seuls ou en famille sur le sol français.
La Cide a marqué un tournant historique : l’enfant reconnu comme sujet de droits, enfin. Aujourd’hui, l’histoire se grippe et c’est tout sauf une bonne nouvelle. L’enfance est non seulement reléguée au second plan, très loin du mythe d’une société de l’enfant roi, mais elle est l’objet de contrôle, de peur et de surveillance.
Une société qui sacrifie son enfance se condamne. Un monde qui accepte ce recul se dirige vers un futur sans horizon, un futur à +4 °C, peut-être plus, un futur que personne ne devrait accepter.
Des contributions pour alimenter le débat, au sein de la gauche ou plus largement, et pour donner de l’écho à des mobilisations. Ces textes ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction.
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un DonPour aller plus loin…
Le 22 novembre, nous ne marcherons ni avec l’extrême droite ni avec les sionistes !
Prix des médicaments : refuser la prise d’otage de l’industrie pharmaceutique !
Journée internationale des migrant·es : organisons une grève antiraciste