À Toulouse, pour François Piquemal, « la victoire passe par l’union »
Candidat à Toulouse pour les prochaines municipales, le député insoumis de Haute-Garonne promet de faire des quartiers populaires une priorité de campagne. Et appelle à l’union de la gauche derrière lui.
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Municipales : entre LFI et le PS, la guerre totale est lancée Municipales : une opération à hauts risques pour les écolos À Marseille, la guerre des gauches aura bien lieu aux municipalesMilitant de longue date au sein des quartiers populaires, François Piquemal revendique la légitimité des insoumis à conduire une liste aux municipales. Dans ses projets pour Toulouse : davantage de logements, plus accessibles et salubres, et une sécurité améliorée par le déploiement d’une police de proximité au lieu de l’actuelle vidéosurveillance, dispendieuse et inefficace.
Pour ces municipales, les insoumis portent le concept de communalisme. Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ?
Nous voulons faire de la commune l’un des échelons de décision et d’autonomie politique dans le pays. L’État ne peut pas décider de tout, et les Toulousains ne peuvent rien attendre de ce gouvernement macroniste. Il faut donner davantage de pouvoir aux habitants au sein de leur ville. À Toulouse, nous avons vu l’émergence de listes municipalistes, comme celle des « Motivés » en 2001, qui avait recueilli plus de 12 % alors que la plupart des observateurs ne se préoccupaient que du duel entre le Parti socialiste (PS) et le Rassemblement pour la République (RPR, ex-Les Républicains).
Toulouse est l’une des rares grandes villes à ne pas avoir candidaté à l’encadrement des loyers alors qu’ils y augmentent très fortement.
Cette liste a inspiré d’autres initiatives, notamment issues des quartiers populaires comme aujourd’hui l’Assemblée des quartiers. Dans notre ville, il existe donc un espace pour ces mouvements. Je me réclame de ce communalisme et de ce municipalisme.
Vous êtes un ancien militant du Droit au logement (DAL). Que comptez-vous faire en ce qui concerne le logement à Toulouse ?
Toulouse est l’une des rares grandes villes à ne pas avoir candidaté à l’encadrement des loyers alors qu’ils y augmentent très fortement, comme partout. Nous le ferons. Sous Jean-Luc Moudenc, nous sommes passés de 4 000 à 8 000 logements indignes. Ce maire a livré la ville aux promoteurs. Nous devons également lancer les chantiers de rénovation thermique des logements parce que nous sommes face à des passoires thermiques. Dans plusieurs quartiers, des immeubles menacent de s’effondrer. Les propriétaires doivent être contrôlés.
L’effondrement de ces immeubles est aussi causé par le dérèglement climatique. Enfin, nous voulons relancer la construction de logements publics adaptés aux ressources des demandeurs et des familles. 2 300 familles quittent Toulouse car elles ne trouvent pas un logement accessible. C’est anormal. Mais la ville ne peut pas tout faire toute seule. Il faut que les institutions, et notamment l’État, nous accompagnent. Et nous espérons qu’un gouvernement de planification écologique soit élu d’ici là.
Vous engagez-vous à réquisitionner les logements vacants ?
Il y a 24 000 logements vacants à Toulouse. C’est un levier que nous souhaitons actionner. Nous pouvons accompagner les petits propriétaires en difficulté pour rénover ces logements. Et pour ceux qui sont, de manière anormale, vacants depuis plus de deux ans, nous gardons la possibilité de les réquisitionner ou de les préempter. Ce sera un combat à mener face au gouvernement, nous y sommes prêts.
Jean-Luc Moudenc a officialisé sa candidature sur le thème de la sécurité. S’il est réélu, il a annoncé que chaque rue toulousaine serait dotée d’au moins une caméra de vidéosurveillance. Qu’en pensez-vous ?
Sur la sécurité, son bilan est médiocre : + 43 % pour les coups et blessures, + 112 % pour les violences sexistes et sexuelles, + 130 % pour le trafic de stupéfiants. Jean-Luc Moudenc est le maire de l’insécurité. Il ne parle que de vidéosurveillance. Mais sa politique ne fonctionne pas. Nous, nous voulons protéger les Toulousains, avec une police municipale exemplaire, au service de la population, une police de proximité.
Nous voulons, dans chacun des 84 quartiers de la ville, 4 policiers municipaux dont les Toulousains connaissent le prénom. Cela nécessite le recrutement de 100 agents supplémentaires et coûterait l’équivalent de tout l’argent que met la mairie actuelle dans la vidéosurveillance. Mais la question de la sécurité ne se résume pas à la police : nous voulons faire de la prévention, donc nous recruterons des éducateurs de rue par exemple.
Seuls les insoumis sont présents sur le terrain dans les quartiers populaires.
Les quartiers populaires sont souvent les grands oubliés des municipales. Vous engagez-vous à inscrire leurs habitants en position éligible ?
Mon histoire militante est liée à l’histoire des quartiers populaires. J’ai milité au sein du mouvement des « Motivés », qui travaillait aux côtés du Mouvement de l’immigration et des banlieues (MIB), ou de Justice pour le Petit-Bard à Montpellier. Nous avons créé le premier forum social des quartiers populaires. En février, les insoumis ont organisé les rencontres nationales des quartiers populaires. C’est un impensé pour le reste de la gauche. Seuls les insoumis sont présents sur le terrain dans les quartiers populaires. C’est comme cela que nous devons reconstruire la confiance. Et je le dis depuis le début de ma campagne : il faut que tous les habitants de Toulouse, quel que soit leur quartier, soient représentés, et en position éligible.
En 2020 à Toulouse, La France insoumise (LFI) avait soutenu une liste d’alliance réunissant les Écologistes, Place publique, des dissidents socialistes, communistes et de Génération·s. Aujourd’hui, vous défendez votre propre liste face au reste de la gauche. Pourquoi ce changement de stratégie ?
En 2020, les résultats électoraux à Toulouse qui précédaient les municipales donnaient des indications contradictoires : Jean-Luc Mélenchon avait fait 32 % à la présidentielle de 2017, les écologistes avaient atteint 21 % aux européennes de 2019 et le PS n’était pas dans une forme olympique. La plateforme Archipel citoyen avait réussi à rassembler toutes ces forces de gauche pour que nous puissions nous accorder sur une incarnation.
À ce moment-là, les écologistes vivaient leur moment politique. Aujourd’hui, la donne n’est plus la même. En 2022, Jean-Luc Mélenchon a obtenu 37 % des voix à Toulouse. Aux dernières européennes, notre liste a recueilli presque 20 %, juste derrière Place publique. Les insoumis sont aujourd’hui la principale force politique dans ma ville. Quand avons-nous le droit de revendiquer le fait que les insoumis puissent conduire une liste ? Nous avons créé les conditions de l’union de la gauche en 2022 et 2024, nous avons fait campagne pour d’autres, nous sommes fidèles au programme du Nouveau Front populaire (NFP).
Nous savons tous que la victoire passe par l’union.
Au vu de ces résultats, il nous paraît légitime que nous proposions de mener une liste d’union de la gauche. Et même si les socialistes ont dit publiquement qu’ils refusaient de faire une liste commune avec nous, je continue d’appeler à l’union. Mais ce choix stratégique est aussi une question d’équilibre entre toutes les formations de gauche. Les écologistes, les socialistes et les communistes dirigent des mairies. Pas les insoumis. Au regard de la situation politique, Toulouse peut être insoumise l’année prochaine.
Après le premier tour, seriez-vous prêt à vous unir avec les socialistes ?
La liste de gauche arrivée en tête sera chargée d’organiser l’union autour d’elle, nous y sommes préparés et tendrons la main à la liste socialiste, sur des bases programmatiques claires. Nous savons tous que la victoire passe par l’union. Me concernant, j’ai été élu avec la Nupes et le NFP, je sais donc ce que nous devons à l’union, j’ai même démissionné du conseil municipal pour laisser ma place à un socialiste en 2022, qui est aujourd’hui le candidat du PS…
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