France-écologie, le tube de l’été en route pour l’Eurovision

Michel Soudais  • 10 juin 2009
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Comment expliquer l’étonnant score de la liste Europe-écologie? 16,48%, comme ça d’un coup, sans crier gare. Il y a forcément une explication. Depuis dimanche soir, comme beaucoup, je cherche à comprendre pourquoi cette alliance de la pipe José et du chichon Dany a si bien réussi. J’écoute, je lis, j’interroge…

On me répète que c’était les seuls à parler d’Europe et que c’est ça qui a payé. En France, peut-être. En Europe, beaucoup moins. Leur groupe au parlement européen comptaient 44 élus. Il en gagne 7 ou 8, dont 8 rien que chez nous. C’est France-écologie.

J’entends dire que les écolos, très fort sur l’urgence écologique ont sû mettre du social dans leur programme jusqu’à y réclamer un «bouclier social» . La clef du succès ce serait. Je me pince. C’est aussi crédible que Sarkozy rétablissant la police de proximité!
Parce que qui a dit « il faut admettre que les machines travaillent sept jours sur sept, donc admettre le travail du week-end » ? Ou encore « j’ai toujours été hostile aux horaires obligatoires d’ouverture des magasins » ? Cherchez avant de lire la réponse [^2]… Et puis combien d’électeurs lisent les programmes.

Ils lisent en revanche les bulletins de vote. Or le quotidien vespéral nous rappelle que le bulletin de vote du PS était «introuvable» quand celui de nos Verts élargis aux écologistes ni de gauche ni de droite était ostensiblement… vert. Ce qui expliqueraient que des électeurs se soient rabbatus dessus. Un peu tiré par les cheveux, non? D’autant que cela n’explique pas pourquoi 19% des électeurs de François Bayrou en 2007[^3] ont changé de crémier, alors que les bulletins de vote MoDem étaient franchement orange.

Non, s’il faut chercher une explication, elle est plus probablement sociologique. «Les personnes qui ont voté pour les listes Europe écologie sont surtout des habitants jeunes et diplômés de grandes villes» , peut-on apprendre dans Libération (9 juin) qui note qu’ «à Paris intra-muros, le duo Cohn-Bendit-Eva Joly fait carton plein dans les quartiers « bobos » (36% dans les IIIe et Xe arrondissements» . Si c’est le journal de Laurent Joffrin, installé précisément dans le IIIe arr., qui le dit, ce doit être vrai. D’ailleurs sans étiquetter aussi facilement les électeurs, Le Monde abonde dans le même sens: «Ce sont précisément ces classes moyennes auxquelles le PS ne fait plus envie qu’Europe-écologie est allé souffler au MoDem» , y déclare le directeur adjoint au département d’opinon de l’IFOP. Et à en croire son homologue du CSA, une partie de l’électorat socialiste ne s’est pas reconnu dans la campagne menée sur le thème du vote sanction contre Nicolas Sarkozy. C’est donc qu’ils s’accomodent de Sarkozy? Je ne peux pas le croire: on ne cesse de me répéter dans mon entourage que les écolos sont de gauche et… rien que de gauche. Il y a quelque chose qui cloche.

J’en étais là de mes recherches quand j’ai découvert sur internet l’arme secrète de nos euros-écologistes . Un truc qui a fait le buzz. Tant c’était moderne et dans l’air du temps. Un lipdub ça s’appelle. Mais regardez (et écoutez) plutôt.

Ne cherchez pas plus loin des explications à la percée fulgurante d’Europe-écologie dans les charts. Après 32 ans d’échec à l’Eurovision, nous avons enfin trouvé le groupe qui va faire gagner la France. Et moi je ne l’avais pas vu.
Puisque désormais la politique se fait autrement, c’est promis, demain je ferai moi aussi du journalisme politique autrement. Je regarderai la politique avec un regard neuf, moderne. Comme un chroniqueur de variété. D’ailleurs j’ai déjà commencé.


[^2]: Daniel Cohn-Bendit dans Une envie de politique (1998, La Découverte). Il y aura bien d’autres proclamations à ressortir de cet essai ancien mais bien moins vieux que Le Grand bazar (1975) exhumé par François Bayrou. Dany le rouge devenu Dany le vert sy déclairait « pour le capitalisme et l’économie de marché » .

[^3]: Le chiffre est de Denis Pingaud de l’institut Opinionway dans Libération, 9 juin.

Temps de lecture : 3 minutes
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