Hollande se décide à riposter à Sarkozy

Michel Soudais  • 24 février 2012
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Illustration - Hollande se décide à riposter à Sarkozy

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En meeting hier soir au Mans , devant quelques 2.000 militants et sympathisants qui n’avaient pas pu tous trouver une place assise dans l’amphithéâtre du Palais des congrès, François Hollande a répété n’avoir « qu’ un adversaire, la finance, la finance folle » . La salle fait mine d’y croire. Pourtant il n’est pas besoin d’être un auditeur attentif pour flairer le mensonge. Non à cause de cet embarrassant papier du Guardian dans lequel il expliquait que la City n’avait pas à craindre son arrivée au pouvoir. Mais, avec l’entrée en campagne de Nicolas Sarkozy, le candidat du PS (et du PRG) en a au moins un autre. Et c’est de lui dont il a surtout parlé hier au cours d’un périple qui l’a conduit de la préfecture de la Mayenne à celle de la Sarthe.

Au point d’ignorer tout autre adversaire ou concurrent. Un dédain un brin hautain que même l’ironie peine à masquer : « Des candidats se déclarent, il était temps. D’autres se retirent… je ne les connaissais même pas. » Satisfait d’être enfin de plain-pied dans la compétition présidentielle, après déjà un an de campagne, le député de Corrèze construit l’essentiel de son discours sur ce qui le différencie du « candidat sortant » , qui est aussi « le candidat de la droite » , mais dont il ne prononce jamais le nom. A ses yeux, les Français auraient « le choix entre deux conceptions » de la France mais aussi de la présidence de la République. D’un côté donc celle de la droite qui consiste à « faire peur au pays » avec « un candidat distillant l’idée que nous n’aimerions pas la France » . De l’autre, la sienne qui veut lui « redonner confiance »  ; d’un côté un candidat qui ne pense qu’à « diviser » les Français quand lui ne se préoccupe que de les « rassembler » .

Illustration - Hollande se décide à riposter à Sarkozy


Le décor ainsi posé, François Hollande hausse le ton contre le chef de l’Etat. Il est décidé prévient-il à ne pas laisser se reproduire « les façons de faire de 2007 » . «La présidentielle, c’est un engagement. Cela ne peut pas être un faux-semblant, un artifice, une illusion, une nouvelle façon de tromper le peuple.» Voilà pour la méthode. Viennent ensuite les répliques aux propositions de Nicolas Sarkozy. Les référendums sur l’immigration et le chômage ? « Il faut arrêter de chercher des boucs émissaires, de stigmatiser, de monter les gens les uns contre les autres » , avertit-il. Le président des riches se présente en « candidat du peuple »  ? « Le peuple n’appartient à personne, c’est lui qui en toute liberté décide qui va le représenter. » La valeur travail ? Elle « n’est pas l’apanage d’une famille politique » , tonne-t-il avant de rappeler le bilan du sortant : hausse du chômage, jeunes sans travail, stagnation du pouvoir d’achat, capital moins taxé…

La veille, sur France 2, Nicolas Sarkozy a proposé d’augmenter les bas salaires de 1.000 euros par an grâce à la suppression de la prime pour l’emploi. Cela fait « trois euros pour un smicard » grince François Hollande qui a « fait ses comptes » . Obliger les bénéficiaires du RSA à travailler 7 heures par semaines ? Ce n’est pas cela qu’ils demandent, moque-t-il *, « ils veulent un contrat d’insertion, un emploi, une dignité »* . La suppression des parachutes dorés ? «On croit rêver, on se pince» , ironise-t-il enrappelant l’ancienneté de cette promesse parce que «la démocratie n’est pas une amnésie » .

Le matin sur France inter, le député de Corrèze avaient déjà testé ses répliques. Puis de nouveau le midi, à Laval, où l’attendaient plus d’un millier de se partisans autour d’un verre de l’amitié. Là, tout à son duel avec Nicolas Sarkozy, François Hollande s’était présenté à ce public militant comme « le candidat de la gauche » . « Je n’ai pas oublié ce qui s’est passé il y a dix ans » , a-t-il une nouvelle fois rappelé comme pour mieux marteler que « c’est au premier tour que tout se joue » . Cet appel au « vote utile » ne tire plus argument du risque de voir Marine Le Pen le devancer (l’hypothèse n’est plus crédible), mais se fonde sur l’idée (démentie par l’histoire électorale des présidentielles) que pour l’emporter un candidat doit virer en tête au premier tour.

Illustration - Hollande se décide à riposter à Sarkozy

Jusque-là François Hollande assurait vouloir ne faire qu’une campagne en positif : exposer et expliquer ses propositions, se faire connaître auprès des électeurs. La vigueur des attaques de Nicolas Sarkozy contre lui l’a convaincu de rendre les coups. Tout en se gardant, assure son entourage, d’être à la remorque de l’agenda de Nicolas Sarkozy et du rythme que le candidat de l’UMP imprime à la campagne. Hier, entre Laval où une « déambulation » avait été programmée dans les rues de la ville par son staff de campagne, et Le Mans, où une séance de dédicace était organisée dans une librairie de la ville – il vient de publier Changer de destin chez Robert Laffont –, François Hollande a visité une exploitation laitière en Mayenne. A trois jours de l’ouverture du salon de l’Agriculture, cette campagne aux champs, bottes aux pieds, avait pour objectif defaire connaître les propositions du candidat en matière agricole, sur fond d’images rurales. Une opération de com’ devenue l’ordinaire de la campagne présidentielle.

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