De qui Bayrou est-il le non ?

Courtisé par Nicolas Sarkozy et François Hollande, le président du MoDem refuse de s’aligner, prétendant incarner une troisième voie.

Michel Soudais  • 8 décembre 2011 abonné·es

François Bayrou est un homme heureux. Vétéran des candidats à la présidentielle, il assure ne pas avoir éprouvé d’angoisse au moment d’officialiser sa troisième candidature. L’ancien ministre juge aussi sa situation « plus prometteuse » qu’elle ne l’était à l’automne 2006, avant son envol dans les sondages et ses 18,57% au 1er tour de la présidentielle de 2007.

Courtisé à droite par un Nicolas Sarkozy convaincu qu’il va lui « apporter des voix de gauche » , le président du MoDem est aussi dragué par François Hollande, qui s’est dit prêt à l’intégrer dans sa future majorité. Flatté de tant de sollicitude, le député du Béarn refuse pour l’heure de choisir entre ces deux candidats. Contrairement à 2007, il ne se dérobera pas, assure-t-il. Mais le moment ne viendra qu’après le premier tour. Et s’il ne parvient pas à convaincre assez d’électeurs qu’il faut au pays « une majorité centrale ».

D’ici là, François Bayrou entend bien marteler ce leitmotiv et continuer à refuser « l’affrontement PS/UMP ». Reste aux électeurs à deviner lequel des refus de ce « centriste » sera le plus fort. Quel non l’emportera, du non à « Nicolas Sarkozy, dont on connaît les échecs, les changements de cap et les insuffisances » , ou du non à « la candidature de François Hollande, désormais enfermée dans des négociations de partis » .

L’exercice n’est pas aisé. Car si François Bayrou estime que la vie politique est confisquée par une oligarchie, ce « système de connivence » est, selon lui, « implanté dans les deux partis principaux » . Ses urgences institutionnelles le rapprochent de la gauche : « séparation des pouvoirs » , rétablissement d’ « un Parlement digne de ce nom » , avec un siège sur cinq pourvu à la proportionnelle, une justice indépendante, une presse qui ne soit pas sous influence directe du pouvoir… Sur le nucléaire, « énergie de transition » qui constitue la solution au réchauffement climatique pour encore « trois à quatre décennies » , il n’est pas plus pronucléaire que François Hollande. Mais sa dénonciation constante des 35 heures –  « une erreur grave »  –, son opposition à tout rétablissement de la retraite à 60 ans, l’ancre parmi la droite.

Pour répondre à la crise, François Bayrou, qui rappelle qu’il avait fait de la dette le thème central de sa campagne en 2007, demandant même d’inscrire le déficit zéro dans la Constitution, fait de la surenchère à l’austérité : baisse des dépenses publiques de 5 % (20 milliards pour l’État, 20 milliards pour la Sécurité sociale et 10 milliards pour les collectivités locales) dès 2012 ; augmentation des recettes de 50 milliards, essentiellement supportée par les plus hauts revenus.

Son agenda 2012-2020 pour refaire de la France un pays productif s’inspire de celui du chancelier socialiste allemand Gerhard Schröder pour réduire, par des mesures structurelles, les dépenses de l’État providence. Ce que François Hollande ne peut ignorer. Mais peut-être est-ce le projet (encore) secret du candidat du PS.

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