France insoumise : Une tribune parlementaire bien exploitée

Très actifs dans le travail parlementaire, les dix-sept députés de la France insoumise donnent à leur mouvement une visibilité importante à l’Assemblée nationale.

Michel Soudais  • 29 novembre 2017 abonné·es
France insoumise : Une tribune parlementaire bien exploitée
© PHOTO : Eric FEFERBERG/AFP

Malgré le poids prédominant du président de la République et la personnalisation excessive de la vie politique, l’Assemblée nationale reste la meilleure vitrine d’une formation politique. Sans député, un mouvement disparaît vite des radars médiatiques. Les écologistes d’EELV en font la cruelle expérience. Privés de cette tribune qui les avait consacrés frondeurs, Benoît Hamon et ses camarades du « M1717 » doivent se réinventer pour exister. Sans groupe, un parti peine également à se faire entendre. Marine Le Pen en sait quelque chose, elle qui a échoué à faire entrer les frontistes en nombre suffisant au Palais Bourbon. À l’inverse, les dix-sept députés de la France insoumise, avec à leur tête Jean-Luc Mélenchon, ont exploité au mieux cette tribune pour apparaître comme les premiers opposants à Emmanuel Macron.

Bien moins nombreux que Les Républicains (100 députés) ou les socialistes du groupe Nouvelle Gauche (31 membres), les insoumis ont su se distinguer d’entrée. D’abord par une arrivée collective sous les objectifs des caméras. Ensuite par leur refus de porter la cravate, signifiant ainsi symboliquement leur non-appartenance au « système » et leur proximité avec « les gens ». Puis en boycottant le discours d’Emmanuel Macron au Congrès pour dénoncer le caractère monarchique du régime et son emprise sur les élus du peuple. Ou encore en brandissant des codes du travail lors du discours de politique générale d’Édouard Philippe.

Avec le même sens de la communication, que n’a pas le groupe GDR dans lequel siègent les onze députés communistes, le groupe de Jean-Luc Mélenchon s’est vite employé à montrer sur les réseaux sociaux, grâce aux vidéos des principales interventions de ses députés, qu’il ne menait pas seulement un travail d’opposition, mais aussi de décryptage des mesures du gouvernement et de proposition. Contribuant ainsi à mettre en avant d’autres figures que son chef de file.

« Le groupe parlementaire de la France insoumise a fait le choix d’assumer, même à dix-sept, d’être très actif dans le travail parlementaire », explique Adrien Quatennens. Dimanche, à Clermont-Ferrand, le groupe revendiquait être intervenu plus de 2 200 fois dans l’hémicycle, plus de 900 fois en commission et d’avoir déposé près de 1 400 amendements. Dont « 70 % sont des amendements de proposition issus du programme “L’Avenir en commun” », souligne le jeune député du Nord. « Beaucoup de gens qui viennent nous encourager pour ce que nous faisons nous disent que les débats parlementaires leur semblent plus passionnants aujourd’hui », glisse-t-il.

Ce travail n’a toutefois rien d’une sinécure face aux 312 députés macroniens. Il s’est même révélé « harassant » lors de l’examen du budget, reconnaît Jean-Luc Mélenchon. Mais les députés insoumis n’entendent pas pour autant lever le pied. Par plusieurs biais, dont des « ateliers des lois » organisés par les groupes d’action de FI, ils ont fait part à Clermont-Ferrand de leur souhait d’y associer toujours plus les militants. Afin de continuer à tirer pleinement parti de cette tribune.

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