Courrier des lecteurs Politis 973

Politis  • 25 octobre 2007 abonné·es

Pour une société de décroissance

Je feuillette mon nouveau Politis (le n° 971), et, tout à coup, je m’agace : un entretien avec Liêm Hoang-Ngoc est intitulé « Un budget inefficace pour la croissance », ce qui est pour le moins litigieux, sinon absurde.

Je ne demande pas à Politis de remplacer les journaux la Décroissance ou Silence , mais considérer et laisser à penser qu’il faudrait poursuivre la croissance économique est inacceptable. Vous avez beau considérer M. Liêm Hoang-Ngoc comme un économiste à contre-courant, il n’en demeure pas moins comme beaucoup d’autres dans la lignée de la pensée unique sur ce sujet. On peut discuter de tout, sauf de la croissance, seule pensée possible ! Et gare aux hérétiques ! Cette pensée unique, d’un autre temps, conservatrice et funeste, ne devrait plus avoir sa place dans Politis .

Certes, une société de croissance fonctionnerait mal sans croissance ; c’est pourquoi il nous faut d’urgence, mais de manière raisonnée, créer une société de décroissance ; D’ailleurs, « la question n’est pas de savoir si décroissance il y aura, car décroissance il y aura, mais de savoir si celle-ci se déroulera dans le totalitarisme et la barbarie, ou si celle-ci sera voulue et maîtrisée dans un cadre humaniste et démocratique (1) » . Pouvons-nous nous permettre d’attendre ?

Rappelons que la décroissance ne signifie pas ascétisme et retour à la bougie ! Au-delà du choix imposé, la décroissance constitue la voie de l’épanouissement de chacun, en privilégiant l’être à l’avoir.

De nombreuses contributions publiées dans Politis , notamment dans le dernier hors-série, montrent certaines pistes à suivre pour se diriger vers une société de décroissance. La revue Entropia (éd. Parangon) est également précieuse pour cela.

Christophe Gibiat, Brive (Corrèze)

(1) La Décroissance, n° 1, mars 2004.

La Constitution européenne

Au sujet du TCE, si j’ai bien compris, chaque pays avait pour se prononcer trois possibilités : le référendum contraignant, le référendum consultatif ou le vote du Parlement.

Nous avons été très peu d’électeurs à avoir été consultés par la voie référendaire contraignante.

Afin de permettre à ceux qui, comme moi, essayent de diffuser des informations éclairantes (trouvées dans Politis et le Diplo ), ne pensez-vous pas que la diffusion d’un tableau complet montrant comment les peuples ont été consultés serait utile ?

Cela nous permettrait de corriger le discours ambiant. Pas plus tard qu’hier, sur une radio du service public, j’entendais dire que les autres peuples ont voté pour accepter ce fameux TCE.

Cet outil serait le bienvenu.

Malgré vos appels, je ne suis toujours pas abonné à Politis et je n’ai donc pas accès à l’ensemble du site sur Internet.

Nous sommes deux dans mon village (sur 5 000 habitants) à lire Politis . Je n’achète mon numéro que le dimanche matin, en espérant que quelqu’un l’ait acheté avant moi, et qu’ainsi je sois contraint d’aller au village d’à côté pour le trouver, ce qui arrive quelquefois. En même temps, le dimanche matin, je commande les livres dont je trouve la référence dans Politis , alors que je pourrais les commander sur Internet. Non seulement je préfère entretenir un lien social avec mon marchand de journaux, mais aussi dépenser localement.

Une deuxième demande me vient à l’esprit : envisagez-vous de publier les archives de Politis en CD ? Ce serait un autre outil utile.

Merci pour votre travail.

Dominique Heutte (courrier électronique)

Du débat nécessaire

Que doit-on voter, lorsque le choix consiste à se résoudre à une gauche molle, moindre mal, mais qui a pris son parti de nous faire avaler la pilule libérale sans même s’en rendre compte, ou à une gauche de convictions qui se voit représentée à chaque scrutin par trop de candidatures ? Que savons nous de ce qu’un élu local PCF, LCR, Verts, Alternatifs, et je ne sais quoi encore, ferait (réaliserait, créerait, inventerait) de si différent de l’autre qui justifie pléthore de candidats ? Sans verser dans la naïveté béate, en connaissance des spécificités théoriques de chacun, que nous pouvons considérer comme une nécessité, il semblerait que la pratique ne mérite pas les divisions, les concurrences, donc les échecs de tous.

Si je considère que le libéralisme n’a pas de vertu, je ne rejette ni l’écolo, ni le syndicaliste politique, ni le marxiste, ni l’altermondialiste, ni le libertaire, ni l’autogestionnaire, ni le militant de la cause de son association… Mais je considère qu’ils ne seront efficaces qu’ensemble. En attendant une refondation incertaine, qui ne pourra être l’émanation que d’une exigence citoyenne, tant les partis chercheront jusqu’à leur dernier souffle à préserver leur pré carré.

Et si nous rendions possible que, dans les conseils généraux, siègent en toute liberté des élus Verts, altermondialistes, LCR, Alternatifs, représentants d’associations pertinentes, aux côtés de ceux qui y sont actuellement, par des accords intelligents au moment des élections ?

Et si des listes métissées, aux membres complémentaires, voyaient le jour aux municipales ? Certes, il y aurait du débat, mais n’est-ce pas justement ce qui manque aujourd’hui ? Cela ne répondrait-il pas aux attentes citoyennes, à celles des électeurs de gauche, et plus largement de tous ceux qui ne savent plus ou qui n’ont jamais su « où ils campent » ?

Cela semble en tout cas le seul moyen de permettre une réelle alternative politique à cette droite qui nous pourrit la vie.

Nadja Flank (courrier électronique)

Guy Môquet et Léon Bérard

Qui aurait l’idée saugrenue de vouloir associer ces deux personnages ?

L’un est mort en 1941, à 17 ans, sous les balles nazies pour son engagement au parti communiste. L’autre est mort en 1960, à 84 ans, en ayant réussi à faire oublier son engagement anti-juif au service du maréchal Pétain.

L’initiative du président de la République de commémorer le souvenir de Guy Môquet dans les lycées a suscité un intéressant débat sur les usages et les « mésusages » de la mémoire. Elle aura aussi placé en porte-à-faux nombre d’enseignants tiraillés entre le refus de valider une injonction présidentielle non dénuée d’arrière-pensées politiciennes et l’acceptation de la lecture du texte émouvant d’ « un jeune homme de 17 ans qui donne sa vie à la France… » (Nicolas Sarkozy).

Il n’aura pas échappé à certains que l’hommage ainsi rendu à la jeunesse résistante de la période des « années noires » (1940-1944) occulte la collaboration du régime de Vichy avec les nazis. Ce tour de passe-passe, s’il ravit idéologiquement des courants politiques qui n’ont pas envie que l’on revienne sur une période durant laquelle ils se sont perdus, ne nous a pas surpris.

Cela fait six ans que le collège de Saint-Palais (dans les Pyrénées-Atlantiques) réclame l’abandon de sa dénomination « Léon-Bérard ». Que ce personnage ait accepté, en tant qu’ambassadeur du maréchal Pétain auprès du Vatican, de défendre les mesures discriminatoires contre les Juifs, prises à Vichy en octobre 1940, puis durcies en juin 1941, ne choque pas le conseil général des Pyrénées-Atlantiques et son président, M. Jean-Jacques Lasserre. Que Léon Bérard ait été, à la Libération, condamné par contumace à dix ans d’inéligibilité laisse sans voix et sans réaction le chef de file de Jean-Jacques Lasserre, l’ex-présidentiable François Bayrou. Quant à l’opposition socialiste du conseil général, elle consulte ses historiens…

Le chef de l’exécutif, s’il recherchait l’Union sacrée autour de la figure de Guy Môquet, n’a pas à s’inquiéter de l’état d’esprit des Pyrénées-Atlantiques. L’Union sacrée y est indéfectible pour défendre la mémoire de Vichy et de sa politique antisémite. Qu’elle est généreuse et consensuelle cette Éducation nationale capable d’associer hommage à un jeune résistant et honneur rendu à un soutier de l’antisémitisme vichyssois !

Robert Garat, Saint-Palais
(Pyrénées-Atlantiques)

Un secours précieux

Il y a quelques semaines, je vous écrivais pour vous raconter un incident ­ ma nièce avait sorti une « phrase sarkozienne » en toute inconscience ­, et je vous demandais comment faire pour qu’elle puisse prendre conscience de sa place dans la société, sans me renvoyer à la polémique « gauchiste ». […]

Avec votre série d’articles sur « ces questions qui fâchent à gauche », vous m’êtes d’un secours précieux pour faire en sorte que ma nièce n’ait pas peur de lire Politis .

Je tiens à vous témoigner ma reconnaissance pour le rôle que vous remplissez afin d’empêcher cette société de basculer définitivement dans une société de marché « à l’américaine ».

William Peterson, Gère-Belesten
(Pyrénées-Atlantiques)

Commission Attali

Dans son éditorial de Politis du 24 octobre, Denis Sieffert mentionne que la commission Attali préconise plusieurs mesures, dont la suppression de la trêve hivernale. Or, j’ai entendu Attali jurer le contraire sur France Culture. Pourriez-vous m’éclairer ?

Pour le reste, tout est, malheureusement, conforme à ce que mentionne Denis Sieffert, et je suis de son avis.

Merci et bravo pour le journal dans son ensemble.

Michelle Lecolle, Metz

Pour répondre à votre interrogation, je cite le rapport d’étape, tel que cité par l’AFP, qui énumère les principales propositions de la commission~: «~Mieux protéger le propriétaire-bailleur en sécurisant la réappropriation de son bien~; raccourcir les délais réels et effectifs d’expulsion.~» Toutes les associations ont compris que derrière ce verbiage technocratique il s’agissait de faire sauter ce qui préserve le locataire d’une expulsion hivernale.

D. S.

Courrier des lecteurs
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