Un cadeau de 40 milliards

Pauline Graulle  • 12 juin 2008 abonné·es

Autre point significatif de la loi de modernisation de l’économie (LME), la libéralisation du Livret A, en cours d’examen à l’Assemblée nationale, permettra aux Français d’ouvrir dès 2009 une telle épargne dans n’importe quelle banque.

Mais la mesure suscite de vives inquiétudes. « À peu près tout le monde, parlementaires et sénateurs de droite comme de gauche, est contre les modalités de la réforme du Livret A » , assure Nicolas Galepidès, syndicaliste à SUD-PTT et membre du collectif Pas touche au Livret A. Ce collectif, qui lançait en janvier son appel « Non à la privatisation de l’épargne populaire ! », dénonce le cadeau supplémentaire fait au capitalisme bancaire. Il estime que la fin du monopole du Livret A, jusqu’alors réservé aux Caisses d’épargne, à La Poste et au Crédit mutuel (sous la forme du Livret bleu), permettra aux banques privées de récupérer plus de 40 milliards d’euros de liquidités. Un pactole qui tombe à pic en ces temps de crise financière ! « L’épargne populaire va servir à financer les opérations spéculatives, enrage Jean-Baptiste Eyraud, président de Droit au logement. Et tout ça sur le dos des petits épargnants et du logement social. »
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Depuis 1818, les fonds épargnés par le Livret A sont centralisés à la Caisse des dépôts et consignations (CDC), organisme d’État proposant des prêts avantageux aux organismes HLM. Un mode de financement efficace qui a servi à construire ou à rénover 80 % du parc des logements sociaux. En supprimant l’obligation de centraliser la totalité des encours à la CDC, la LME menace à terme le financement du logement social. Le collectif a beau dénoncer l’un des plus grands transferts de richesses jamais opérés en France, ni les syndicats ni la gauche ne sont parvenus à faire émerger cette question en dehors de la sphère des spécialistes du secteur bancaire. *« La mobilisation n’est pas à la hauteur des enjeux,
regrette Jean-Baptiste Eyraud. Si on reste les seuls à se battre, on ne fera pas le poids en face des milliards qui sont en jeu ! » Pas découragé pour autant, le collectif a planté des tentes derrière l’Assemblée nationale mardi 3 juin dans l’espoir de se faire entendre. Et n’exclut pas de renouveler l’opération lorsque le texte passera au Sénat.

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