Courrier des lecteurs Politis 1035

Politis  • 15 janvier 2009 abonné·es

Élections européennes

Àquelques mois du renouvellement des députés européens, je serais d’accord pour une liste de candidats de partis ou d’associations anticapitalistes. La seule condition est de se tenir à un manifeste ou un accord immuable stipulant certains principes. […]
Ce texte doit contenir certaines exigences. La solidarité doit être une valeur et une norme de l’Union. Les services publics doivent être inscrits comme objectifs de l’Union et affranchis des règles de la concurrence. Il faut empêcher la marchandisation de la culture, de l’éducation et de la santé ; la politique commerciale commune doit faire l’objet d’un contrôle démocratique. Il est nécessaire de lutter contre le dumping social et fiscal ; la politique économique et monétaire doit promouvoir la croissance de l’emploi. Nos prud’hommes doivent être maintenus, pour le principe de non-régression des droits. La Banque centrale européenne et les banques centrales nationales doivent rendre des comptes aux gouvernements et aux élus. L’Union doit pouvoir contrôler les mouvements des capitaux. Pas de privilèges pour les églises, l’Union doit être laïque. L’Otan ne doit pas être une institution européenne. Un véritable droit d’initiative des citoyens dans les politiques de l’Union doit être instauré. Le traité doit réellement pouvoir être révisé.
Je pense que l’élaboration d’un projet alternatif de la gauche anticapitaliste n’est pas une utopie politique hors de portée des capacités militantes rassemblées. […]
C’est un mensonge de faire croire que des acquis sociaux aussi élémentaires que le droit à la retraite par répartition, les services publics, la santé et l’éducation pour tous, mis en place à la Libération, quand le pays était détruit, sont devenus des luxes impossibles à financer, quand le pays est plus riche qu’il ne l’a jamais été. […]
C’est aussi un mensonge de faire croire que l’on pourrait changer la vie du plus grand nombre sans changer la répartition de la valeur ajoutée. […]
C’est une erreur démagogique de dénigrer l’unité et l’indivisibilité de la République comme une mutation de la légitime spécificité des terroirs, et de stigmatiser la laïcité comme une limitation de la liberté individuelle, jusqu’à […] ce que le primat de l’intérêt général ait disparu dans l’arbitrage contractuel des intérêts particuliers. […]
Mais la décision dans tous ces domaines ne se partagera jamais tant qu’il n’y aura pas des institutions politiques voulues, contrôlées et organisées par les citoyens eux-mêmes.
C’est bien pourquoi nous dénonçons un lien de cause à effet très étroit entre l’abandon de la conscription et la réintégration de la France dans l’Otan.
Car, quoi qu’en pense M. Sarkozy, nous nous soumettons au droit de veto des États-Unis pour toute intervention, même de faible ou de moyenne intensité, y compris sur le sol de l’Europe.
C’est à nous d’être les héros d’une bataille, celle de critères de convergence sociaux qui permette une harmonisation sociale du vieux continent par le haut. La Commission ne doit pas avoir le monopole de l’initiative des lois européennes.

Serge Fournier, LCR, initiateur du NPA

La « garde » des enfants

La bergère garde ses blancs moutons ; en partant en vacances, je mets mon chien en garde ; à la gare, je mets mes bagages en garde. On parle de garde-barrière, de garde-boue, de garde-chiourme… Dans le langage courant, le mot garde évoque une action passive de surveillance.
Alors, quand on emploie le même mot à propos des enfants, veut-on dire qu’on les met en dépôt le temps où l’organisation de la société ne permet pas aux parents de s’occuper d’eux ? N’enlève-t-on pas tout sens éducatif au travail des assistantes maternelles ? N’est ce pas faire des enfants des objets ? Ne devrait-on pas bannir définitivement cette association de mots : « faire garder ses enfants » ?
On met ses enfants à la crèche pour leur apprendre à vivre en société, pour leur transmettre un savoir… La crèche n’est pas une consigne.

Alain Brunel, Bégard

Une année liberticide

Lois sur la prévention de la délinquance et sur la rétention de sûreté, fichier Edvige, effets d’annonce sur le dépistage de la délinquance chez les enfants de maternelle, et à présent réforme de l’hospitalisation psychiatrique qui amalgame maladie mentale et dangerosité potentielle : toutes ces lois (et j’en oublie) […] sont autant d’outils de répression répondant à une justice d’élimination. Nous assistons ainsi à un démantèlement du lien social, et par extension à une paralysie du fonctionnement démocratique, qui s’effrite dans la généralisation des droits individuels, des libertés privées au détriment de ce qui fait la force et la cohérence d’une société, sa capacité à renforcer les libertés individuelles dans un espace collectif, sociétal. En favorisant le repli sur soi, en désorganisant les liens d’appartenance et les solidarités, l’État et son chef entérinent la casse d’un modèle social qui a favorisé l’émancipation humaine depuis la Révolution de 1789. La crise financière et, au-delà, la crise de l’ensemble du système participent de cette oraison funèbre car il ne peut y avoir de libertés sans la liberté de se construire dans une société plus juste, égalitaire, fraternelle sur le plan professionnel, personnel et social… […]
Cette année 2008 fut bien une année liberticide : pour les agriculteurs, qui perdent la liberté d’exploitation de leurs terres au profit de la demande des marchés ; pour les enseignants, qui dans un sursaut éthique sont condamnés pour refuser l’absurdité des règlements et autres décrets-programmes imposés ; pour ces jeunes qui pourrissent dans les geôles de la République en raison de soupçons même pas avérés […]. Cette année 2008 est, plus que tout autre, une année de privation des libertés individuelles et collectives, mais pour autant devons-nous accepter ce recul de nos droits ou faudra-t-il que nous coiffions une fois encore le bonnet phrygien ? Faudra-t-il une fois de plus que nous réclamions l’application de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen comme en 1936, 1945 ou 1968 ? Peut-être, mais pour cela il ne peut y avoir qu’une forme de réponse, la vôtre, la mienne, la nôtre pour de meilleurs lendemains, pour que nous vivions une année 2009 à la hauteur de nos espérances. Bonne année !

Maximilien Reynès-Dupleix

La vache a-t-elle mangé l’esprit critique de Politis ?
[
L’article sur Cuba->5184] publié par Politis dans le n° 1032-1033 (« L’espérance était verte, la vache l’a mangée ») a provoqué mon indignation, en particulier par les formules suivantes mises en exergue : « Un système généralisé de surveillance et de répression » , « un modèle de combines et de débrouillardises, de détournements et de vols plus ou moins institués ». Ces formules résument effectivement les partis pris systématiques et outranciers de l’auteur, mais Politis semble ainsi les reprendre à son compte.
Ayant enseigné de nombreuses années dans le continent américain et ayant voyagé à travers Cuba en 2008, j’ai quant à moi été amené à constater que Cuba est un des pays du sud du continent américain où l’on est le moins confronté à la misère et à la ségrégation sociale. C’est aussi un pays où se manifeste une grande joie de vivre, avec ses musiciens, où tous les enfants sont scolarisés et où les gens vous invitent à entrer chez eux pour boire un café et parler de tout et de rien. Cuba est certes confrontée à de sérieux problèmes, entre autres aux désastres provoqués par une série d’ouragans, que Gérard Ponthieu semble vouloir ignorer. Mais ce dernier semble surtout chercher à valider des points de vue imposés par les médias qui sont au service de l’impérialisme états-unien.
Or, si les problèmes de Cuba sont complexes et doivent être examinés dans leur complexité, il ne faut pas oublier ou nier une réalité fondamentale : Cuba est d’abord victime du terrorisme des États-Unis et de leur blocus, et pour qui tous les moyens sont bons pour tenter de rétablir leur domination sur Cuba (ainsi qu’ils l’avaient fait sur le Chili).
Cela dit, Cuba, son peuple et ses dirigeants cherchent aujourd’hui à surmonter les problèmes réels qui pèsent sur le socialisme cubain. […]

Didier Lemaire, Villiers-sur-Loir (Loir-et-Cher)

Défense de l’hôpital public

À la suite des accidents qui révèlent les conséquences négatives de la politique du ministère de la Santé, le comité de soutien et de défense de l’hôpital intercommunal de Cavaillon et Lauris nous a demandé de publier le communiqué de presse suivant.

« En moins d’une semaine, un petit garçon et un homme de 53 ans sont morts. Nous partageons la douleur des familles et nous nous posons la question : pourquoi ? Nous pensons que les véritables responsables ne sont ni l’infirmière ni les urgentistes, mais le gouvernement. Celui-ci, par des choix politiques de réduction de moyens pour l’hôpital public (postes et moyens budgétaires), place les soignants devant des difficultés insurmontables, comme le prouvent malheureusement les deux derniers drames.
Notre département aussi est touché par cette réduction des moyens. À Pertuis : fermeture de la chirurgie, en cours pour la maternité ; à Valréas : chirurgie et maternité en cours de fermeture ; à Cavaillon et à Orange : fusion public/privé en cours sur le modèle de Carpentras.
Ces fusions mettent en danger le service public hospitalier. De tels drames peuvent donc se renouveler ailleurs, dans notre département, notre ville. Dans ce contexte de logique marchande, nous demandons le retrait du projet de loi « Hôpital, patients, territoire », qui en l’état actuel accroîtrait les risques.
Nous appelons tous les citoyens à la mobilisation contre la casse du service public de la santé, et à nous rejoindre dans la manifestation du jeudi 29 janvier à Avignon. »

Courrier des lecteurs
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