Courrier des lecteurs 1096

Politis  • 1 avril 2010 abonné·es

La finance a mis l’imagination au pouvoir pour faire de l’argent : subprimes, titrisation, CDS, stock-options, parachutes dorés… Sans compter le cumul des mandats et les jetons de présence. Quant à ceux qui ne sont pas au pouvoir, ils n’ont pas besoin d’imagination. Ils paieront les impôts cassés pour les autres !

Paul Oriol, Versailles (78)


Erratum

Dans la lettre sur le PSU de Vladimir Claude Fisera, publiée dans le n° 1093 de Politis, au lieu de « Mitterrand n’aurait jamais dû adhérer », il fallait lire « Mitterrand n’aurait jamais pu adhérer ». Mitterrand n’a jamais été au PSU, et c’est à cause de sa pratique en Algérie comme ministre que le PSU s’est créé en 1960 ! Toutes nos excuses à l’auteur.

Précisions

À la suite de l’article « Explosion antinucléaire » ( Politis du 17 mars), je tiens à apporter les précisions suivantes.
Les accusations portées contre moi (menaces, insultes) sont purement diffamatoires. Aucune preuve n’est apportée… et pour cause : il n’y en a pas ! Les « rappels à l’ordre » dont j’ai été l’objet ont tous été initiés par le directeur, qui, sans jamais l’avouer, me reproche en réalité de vouloir maintenir dans le Réseau Sortir du nucléaire une ligne véritablement antinucléaire alors que lui veut institutionnaliser le Réseau et privilégier la question du climat. À ce sujet, contrairement à ce qui est écrit dans l’article, le Réseau n’a hélas pas retiré sa signature de l’appel Ultimatum climatique, appel qui donne la priorité à la lutte contre le changement climatique au détriment de la lutte antinucléaire. Pire : alors que l’assemblée générale des 6 et 7 février a adopté une motion – que j’ai proposée moi-même – qui interdit la signature par le Réseau de textes sur le climat qui n’écartent pas explicitement le recours au nucléaire, le directeur a refusé le retrait d’Ultimatum climatique au prétexte que la motion… ne serait pas rétroactive.
Enfin, je précise que j’ai de moi-même renoncé depuis le 7 février à porter la parole du Réseau tant qu’un fonctionnement démocratique n’aura pas été rétabli. Mais, depuis le 1er mars, je suis mis à pied, mon e-mail @sortirdunucleaire.fr a été résilié… et des accusations diffamatoires ont été portées contre moi.

Stéphane Lhomme


« L’événement » sur les Jeux olympiques paru dans le n° 1091 de Politis me fait réagir. Selon moi, le gros problème du sport est qu’il est, dans la quasi-totalité de ses manifestations, indissociable de la compétition (à tel point que, lorsqu’on dit sport, on entend généralement sport de compétition). Et cette compétition, si bien mise en valeur, idéalisée, est au cœur même du capitalisme. Devrait-on alors éviter d’en parler ? Faire comme si la compétition était naturellement bénéfique et stimulante ? Ne pas se demander si elle n’est pas plutôt destructrice, génératrice d’inégalités et d’opposition permanente ? Je suis moi-même, comme (me semble-t-il) Michel Caillat, profondément anti-compétition. Je rêve d’un monde où l’on verrait chaque être humain, quelle que soit sa nationalité, comme quelqu’un avec qui collaborer plutôt que comme quelqu’un à dépasser. Et je n’ai pas l’intention d’imposer mes idées, plutôt d’en débattre. Aussi je ne vois pas pourquoi on devrait faire taire tous les gens que la compétition écœure, avilit, fait souffrir ou tout simplement questionne en les accusant de vouloir « faire le procès du sport » . Le débat sur le sport et sur la compétition me semble on ne peut plus légitime et inévitable. Cher Alain Lormon, si vous aimez le sport, osez le défendre pendant de longues pages et ne pas vous contenter de quelques formules lapidaires. Je serais intéressé, sincèrement, par vos arguments. Sur ce thème, ce sont généralement toujours les mêmes clichés caricaturaux que l’on rabâche mécaniquement. Offrez-nous donc autre chose ! Chers amis de Politis, au lieu d’éteindre le débat après l’avoir allumé, faites-le vivre ! […]

Thierry Schalck, Soignolles-en-Brie (77)

Vous avez, raison, cher lecteur. Nous avons prévu de rouvrir le débat à la veille de la prochaine Coupe du monde de football.


J’ai été invitée, comme de nombreux écrivains, à la semaine de la poésie de Clermont-Ferrand. Je me suis rendue dans les écoles et collèges de la région, j’ai rencontré de formidables élèves et professeurs. Mercredi 17 mars, j’ai participé, au Crous Dolet, à une rencontre intitulée « Étrange, étrangère, étrangeté ». […]
Nous devions, les étudiants et moi-même, évoquer le sort de ceux que les lois de plus en plus strictes privent de titres de séjour sur les territoires français et européens, ceux que l’on appelle donc des « sans-papiers ».
Nous devions le faire à partir des témoignages que j’ai recueillis lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention à Bayonne, et qui, accompagnés de réflexions, ont été réunis sous le titre Entre chagrin et néant (voir Politis n° 1060, NDLR).

Nous devions le faire surtout à partir des témoignages des étudiants, ceux qui se bagarrent pour que leurs camarades poursuivent en France les études qu’ils y ont commencées et ceux qui, démunis de titre de séjour pour un module d’enseignement raté une année, risquent l’expulsion.
Ziyed Tlili est de ceux-là. Après l’obtention d’un DUT, il termine cette année une licence d’informatique. Il lui a manqué, l’an dernier, deux modules. La circulaire Monteil permet pourtant à un étudiant français qui accomplit, pour financer ses études, un travail salarié d’adapter le rythme de son parcours à sa situation. À un étudiant français…
Si les étudiants et leurs professeurs avaient si bien compris qu’il est des chemins et des lieux sans frontières, ils étaient les seuls : Ziyed, qui devait nous rejoindre mercredi 17 mars au Crous Dolet, fut arrêté la veille, placé en garde à vue et conduit au centre de rétention de Lyon, après qu’on eut essayé, pensant qu’il possédait un passeport, de lui trouver le jour même un bateau au départ de Sète. […]

Le mardi 16 mars, un coup de téléphone avertissait Ziyed d’un rendez-vous destiné à « l’aider ». Il se rendait sur le lieu du rendez-vous. Trois policiers en civil l’arrêtaient. Au commissariat, il découvrit, épinglées au mur, plusieurs photos de lui. On lui avait tendu un piège.
La rétention de Ziyed Tlili a été prolongée de quinze jours le jeudi 18 mars devant le JLD. […]

Je suis rentrée à Bayonne, et l’absence scandaleuse de Ziyed parmi ses camarades étudiants à l’université de Clermont Ferrand m’obsède.
Une vie est arrêtée là, fermée dans un camp d’internement pour étrangers, loin de ses camarades, de ses professeurs et de ses études.
Dans le contexte de la semaine de la poésie, l’absence de Ziyed à l’université de Clermont-Ferrand, consécutive à notre projet de rencontre au Crous Dolet, rend absurde et triste la volonté pourtant si enthousiaste que nous avons eue, organisateurs et poètes invités, d’interroger devant des étudiants ce que sont les déplacements des genres, des mots, des corps, les glissements de sens, les métamorphoses, le travail incessant et les trajets sans fin
– tout ce que l’on s’est plu, pendant cette semaine, à dire poésie. Comment supporter de voir se clore, à l’endroit même où l’on dit tous les chemins possibles, celui de l’un d’entre nous ?
Comment accompagner d’une part enfants et adolescents à la recherche d’une voix et d’une voie singulières (c’est bien ce que nous avons modestement tenté de faire en allant dans les classes) et assister impassibles, au même moment, à l’affirmation spectaculaire et brutale du fait qu’il n’y a pas de voie singulière d’étude ?

Comment imaginer que l’on puisse mesurer à l’obtention de telle quantité de modules la qualité d’une recherche et d’un travail mené ? Comment ne pas voir que trajet de vie et trajet d’étude sont intimement liés ? Et qu’ils sont, bien heureusement, singuliers ? […]
Comment supporter que l’université ne soit pas souveraine quand il s’agit de juger des compétences d’un étudiant ? Qu’elle ne parvienne pas à imposer que reste en France l’étudiant à qui elle a permis pourtant de poursuivre ses études ? Comment supporter que l’État, en la personne du préfet, s’en mêle ?
Que la police s’en mêle ?

Marie Cosnay

Courrier des lecteurs
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