France 2 débarque son fossoyeur !

Jean-Claude Renard  • 21 octobre 2013
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C’est fait, et bien fait. Enfin ! La rumeur courait depuis deux ou trois semaines : Philippe Vilamitjana a été officiellement débarqué de son poste de directeur des programmes de France 2. Il paye la rentrée catastrophique de la chaîne, une rentrée qu’il a lui-même mise en place. A commencer par l’émission quotidienne de Sophia Aram, mal baptisée « Jusqu’ici tout va bien », pitoyable, attirant à peine 3 % de téléspectateurs (et qui ne devrait pas survivre aux vacances de la Toussaint). Sophia Aram, mais pas seulement : les deux programmes qui l’entourent sont autant d’échecs. « Dans la peau d’un chef », sur la cuisine, comme « Y a pas d’âge », court fiction d’avant le 20 heures. Le défaut d’audience n’aurait pas de conséquences s’il ne s’accompagnait pas de rentrées publicitaires en chute libre. La chaîne, dont on sait qu’elle est privée de réclames après 20 heures, aurait déjà perdu depuis la rentrée 150 000 euros de recettes par semaine (sachant que la quotidienne de Sophia Aram coûte environ 90 000 euros par jour).

C’est trop, c’est beaucoup trop, selon Rémy Pflimlin qui a décidé de se débarrasser de Vilamitjana. Mais rappelons que ce dernier, en poste il y a dix-huit mois, était déjà responsable du calamiteux programme soi-disant humoristique « Roumanoff et les garçons », fin 2012, supprimé après seulement quelques semaines d’antenne ; tout comme « Vous trouvez ça normal ? ! », talk show présenté par Bruce Toussaint, pour le coup bazardé faute d’audience, après deux mois, sans lui laisser le temps de s’installer.
Mais l’ensemble de son œuvre ne s’arrête pas là. Au printemps dernier, c’est lui qui avait décidé de supprimer « Taratata », présenté par Nagui, et « Des mots de minuit », ce magazine culturel audacieux animé par Philippe Lefait, constitutif de l’identité de la chaîne, au prix de 64 000 euros le numéro par semaine, celui-ci réunissant, à plus d’une heure du matin près de 150 000 téléspectateurs – quand Sophia Aram en rassemble à peine 300 000 entre 18h15 et 19h15. « J’ai la chance de faire le plus beau job de Paris à la télévision en ce moment » , déclarait Vilamitjana, toujours au printemps. De fait, le « plus beau job » est chargé. Surtout quand on regarde en arrière : alors patron de France 5, en 2007, Philippe Vilamitjana est aussi celui qui avait supprimé « Arrêt sur images », de Daniel Schneidermann. Vilamitjana, ou le fossoyeur du service public. Ou le moins-disant culturel, le mieux-disant vacuité. Aujourd’hui, Philippe Lefait et Daniel Schneidermann sauront apprécier.

Depuis l’été 2010, et la nomination de Rémy Pflimlin à la tête de France Télévisions, Vilamitjana est le quatrième patron de France 2 à tenir les rênes de la première chaîne du service public ; à sortir du rang aussi (après Claude-Yves Robin, Bertrand Mosca et Jean Réveillon). Sinon d’avoir réussi à faire l’unanimité des syndicats (l’intersyndicale a posé un préavis de grève pour le 7 novembre, s’opposant à un nouveau plan de « départs volontaires » de 361 salariés), c’est là sûrement la meilleure décision de Pflimlin depuis le début de son mandat. Une bonne décision tempérée par la nomination du successeur de Vilamitjana : Thierry Thuillier, patron de l’info sur France Télé, ex TF1 et LCI, oui ouiste convaincu au référendum, artisan de la fusion des rédactions entre France 2 et France 3. Là encore, le tableau de chasse est chargé.

Temps de lecture : 3 minutes
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