Procès à charge

Un recueil de chroniques judiciaires parues entre 1882 et 1894 dans le Figaro.

Jean-Claude Renard  • 7 mai 2015 abonné·es

Né vers 1862, un jeune ouvrier tisseur tire sur un patron du textile lors d’une grève à Roanne. Il manque sa cible mais devient un symbole pour les militants anarchistes, dont certains lancent une souscription pour lui offrir un « revolver d’honneur ». Au Figaro, Albert Bataille couvre son procès. Pour lui, Pierre Fournier est « un enfant perdu de la révolution sociale », « qui en est déjà à l’assassinat quand les travailleurs n’en sont encore qu’à la grève ». Le journaliste y va sans ambages, dénonçant les « théoriciens de la chasse aux patrons ! » et les « journaux révolutionnaires » qui agitent « les cerveaux faibles », méprisant la classe ouvrière.

Fournier sera condamné à huit ans de travaux forcés. Le journaliste s’en félicite dans une longue chronique ouvrant ce recueil d’articles passionnant, présenté et annoté par l’historien Stéphane Vautier, Quand on jugeait les anarchistes. Un recueil d’articles publiés entre 1882 et 1894, consacrés aux procès que suivait Bataille pour le quotidien, réanimant toute une période, avec ses têtes d’affiche (Ravachol, Louise Michel, Santo Caserio, Auguste Vaillant) et ses mouvements, dans une France plongée dans l’industrialisation. Qui montre combien les anars dérouillaient sous la justice, et combien une certaine presse ultra-conservatrice les jugeait, alimentant à la fois les peurs et les haines, rassurant le bourgeois.

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