«L’appel de Goodyear» à François Hollande

Chloé Dubois (collectif Focus)  • 13 janvier 2016
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«L’appel de Goodyear» à François Hollande
© Photo : AFP / FRANCOIS NASCIMBENI Le 14 octobre 2011, François Hollande s'était rendu à Amiens auprès des salariés de l'entreprise Goodyear.

La décision de justice condamnant les huit travailleurs de Goodyear à deux ans de prison, dont neuf mois fermes, pour «séquestration» continue de faire réagir, tant la lourdeur de la peine est inédite. Afin de soutenir les prévenus, la CGT Goodyear Amiens-Nord lance un appel d’envergure par l’intermédiaire d’une pétition adressée à François Hollande. Cette pétition a dores et déjà recueilli plus de 19.000 signatures. (Actualisation du 14 janvier à 12h: la barre des 40.000 signatures est dépassée!)

Si le manifeste appelle à «un grand rassemblement solidaire» , il exige par ailleurs l’arrêt total des poursuites à l’encontre des anciens salariés de Goodyear qui ont retenu les 6 et 7 janvier 2014, deux cadres dirigeants de l’entreprise. À la barre, les prévenus ont reconnu «un coup de colère» non prémédités, mais face à une direction qui  «n’apportait aucune réponse»  à la  «détresse sociale» des 1.143 salariés de l’entreprise, fermée quelques jours après.

Lire > Prison ferme pour 8 anciens salariés de Goodyear

Puisque c’est du fait du procureur de la République que les poursuites ont été maintenues, l’entreprise et les deux cadres retenus ayant retiré leur plainte avant le procès, de nombreuses personnalités de gauche ont dénoncé un procès politique visant les huit salariés, dont cinq syndicalistes CGT. Certains n’hésitant pas à inviter sur les réseaux sociaux à signer, comme les syndicalistes, cet «Appel des Goodyear» .

C’est «tout le mouvement syndical qui est attaqué », estime le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, qui juge la décision du tribunal d’Amiens «scandaleuse et injuste» .

«Le procureur de la République a décidé seul de demander une peine d’emprisonnement. Il est le porte-parole du gouvernement et la lourdeur de la condamnation peut nous interroger sur le fait que cette demande a été faite au plus haut niveau de l’État, de l’Élysée ou de Matignon.»

De même, Gérard Filoche, membre du bureau national du PS a dénoncé ce mercredi sur France Inter «une société à deux vitesses» :

«Dans quel pays on est pour que pareille décision soit prise par un juge ? Ce juge n’a jamais connu l’histoire des mouvements sociaux en France? Il n’a jamais regardé 1936, 1945, 1968, 1995 et même, les dernières années, comment les grandes conquêtes se sont faites ?»

André Chassaigne, président (PCF) du groupe des députés GDR, a quant à lui estimé ce jugement «ignoble»  :

«C’est une honte […] Que l’on puisse condamner à neuf mois de prison ferme des salariés qui ont défendu leur outil de travail, qui soi-disant ont fait preuve d’une forme de violence, alors que d’autres au jour le jour pratiquent une violence autour du tapis vert pour supprimer des centaines, des milliers d’emplois, je trouve que c’est véritablement une décision judiciaire qu’on ne peut pas accepter.»

En réaction à ce jugement d’une extrême sévérité, les sénateurs du groupe Communiste, républicain et citoyen (CRC) ont demandé l’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale de leur proposition de loi d’amnistie pour les militants syndicaux. Ce texte avait été adopté par la majorité du Sénat le 27 février 2013. Mais à l’Assemblée nationale, le PS s’y était opposé et avait obtenu le vote d’une motion de renvoi.

Lire > Amnistie sociale. « Subterfuge » et « trahison »

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