Macron : Un bon coup de « points » aux retraites

Même s’il s’en défend, Emmanuel Macron veut remplacer le système actuel de retraite par répartition par un système individualisé.

Erwan Manac'h  • 8 mars 2017 abonné·es
Macron : Un bon coup de « points » aux retraites
© photo : JEAN-FRANCOIS MONIER/AFP

C’est dit avec le sourire, mais c’est bel et bien un big bang qu’Emmanuel Macron propose sur le dossier des retraites. Le candidat d’En marche ! a défendu, jeudi 2 mars, avec sa rhétorique habituelle, floue et ampoulée, « un système universel de retraite » pour mettre fin à la complexité et à « l’injustice » du modèle actuel, garantir « les mêmes droits pour tous », sans un euro de baisse des pensions ni le moindre report de l’âge légal de départ à la retraite. Mais, entre les lignes, il propose de faire table rase du système à l’œuvre depuis soixante-dix ans, vers une « retraite à la carte » pour tous.

Même s’il s’en défend, Emmanuel Macron veut remplacer le système actuel de retraite par répartition (les salariés actifs payent pour les retraites) par un système individualisé (chacun épargne pour lui-même, en cumulant des points pendant sa vie professionnelle). Toutes les caisses de retraite n’en font plus qu’une. Un système qui se veut plus adapté aux aléas d’une vie professionnelle plus « flexible », faite de boulots salariés et de travail indépendant, le leitmotiv du candidat d’En marche !.

« Le lien entre celui qui travaille et le retraité est rompu. C’est la fin de l’idée de solidarité », s’inquiète Gérard Filoche, conseiller national du PS et ancien inspecteur du ­travail. Même la notion d’« âge légal » de départ devient secondaire, chacun gérant son compte retraite comme il l’entend.

Ce système marque surtout la fin des « régimes spéciaux », qui prennent en compte la pénibilité du travail. Le montant du « point retraite » sera en effet identique pour les cadres et pour les ouvriers, même si ces derniers ont une espérance de vie plus courte de cinq ans et demi en moyenne.

Plus choquant encore, avec ce système par points, c’est le retraité qui doit payer les ajustements, lorsque le financement des retraites devient déficitaire en raison de l’allongement de la durée de la vie. La valeur du point pourrait en effet baisser en fonction de l’espérance de vie, notamment. Ainsi, « plus besoin de réformes successives », claironne l’équipe d’En marche !. Les baisses de pension sont automatiques. C’est la fin des conflits sociaux récurrents, et le montant de votre retraite ne dépend plus du montant de votre salaire mais de la valeur du point au moment où vous quittez la vie active.

Dissimulé derrière des non-dits et des affirmations contradictoires, Emmanuel Macron vient donc d’ouvrir un débat colossal pour l’avenir du modèle social français. Il se donne « environ dix ans » pour atteindre son objectif.

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