Du Mexique à Israël : les murs contre les hommes et la biodiversité

Les obstacles que le président Trump voudrait bâtir à la frontière mexicaine contre les migrants auraient aussi un impact dramatique sur la faune sauvage.

Claude-Marie Vadrot  • 2 mai 2017 abonné·es
Du Mexique à Israël : les murs contre les hommes et la biodiversité
© photo : JACK GUEZ / AFP

Le mur en projet entre les États-Unis et le Mexique inquiète évidemment les défenseurs des droits de l’homme, même si son avenir reste incertain. En effet, les parlementaires américains sont majoritairement réticents à le faire financer par les citoyens, et les Mexicains refusent évidemment d’y contribuer. Mais les protecteurs de la nature et de l’environnement militent également contre cette barrière menaçant la biodiversité qui prospère de chaque côté.

Des animaux sauvages (mouflons, jaguars, loups, antilopes et petits mammifères), souvent menacés, circulent librement d’un pays à l’autre grâce à des réserves et des espaces protégés s’étendant de chaque côté. Notamment dans le désert d’Altar, en Arizona, une zone qui est depuis longtemps classée au Patrimoine de l’humanité par l’Unesco. Pour l’instant, tout au long des 3 000 kilomètres de frontière, les clôtures en place ont été conçues pour faciliter le passage à la faune sauvage.

Barrière infranchissable

Or dans ces espaces, la mise en place d’une double et haute barrière métallique continue couperait les zones sauvages en deux parties et mettrait rapidement fin à la biodiversité. Cela signifierait à terme la disparition de nombreuses espèces, privées d’une partie de leurs territoires, et empêcherait les migrations régulières liées aux changements de saison, de températures et de pluviométrie. Les contacts entre des populations souvent menacées n’existeraient plus, entraînant de rapides disparitions. Et ce d’autant plus que l’érection du double mur va bouleverser l’écologie et l’écoulement des nombreux cours d’eau qui traversent ou longent la frontière désormais fortifiée, voire bétonnée et électrifiée.

Les associations de protection de la faune, déjà alarmées par la disparition ou l’affaiblissement de la réglementation des espaces protégés sur territoire américain décidé par Donald Trump, ont donc décidé de se joindre aux ONG humanitaires pour protester contre la mise en place du mur étanche promis par le Président.

Égout à ciel ouvert

Ce mur entre les États-Unis et le Mexique ne serait pas le premier à remettre en cause la survie de la biodiversité. L’exemple le plus ancien est celui qui sépare les territoires palestiniens et Israël : infranchissable par les hommes, il l’est également pour toute la faune sauvage, dans une région du monde où cette biodiversité avait déjà du mal à se maintenir. C’est particulièrement visible à Gaza où l’enfermement du territoire l’a pratiquement fait disparaître entièrement. Un territoire traversé par la rivière Wadi Gaza, qui fut il y a longtemps accueillante pour les oiseaux et qui n’est plus aujourd’hui qu’un égout à ciel ouvert dont les animaux, à plume ou à poils, n’osent plus s’approcher.

La crise migratoire a également incité des pays européens, comme les pays qui les bordent, à ériger des barrières de grillages et de barbelés. C’est le cas, évidemment, de la Hongrie, mais aussi d’autres nations qui se barricadent plus discrètement.

En revanche, l’espace militarisé et barricadé de plusieurs milliers de kilomètres carrés qui sépare la Corée du Sud et la Corée du Nord sur le 38° parallèle, et où les être humains ne peuvent circuler sans risque d’être abattu, est devenu une des plus belles réserves de faune d’Asie.

Pour aller plus loin…

Le changement climatique fait de plus en plus de victimes
Décryptage 3 novembre 2025 abonné·es

Le changement climatique fait de plus en plus de victimes

À l’approche de la COP 30, la crise climatique continue de s’aggraver. Si le phénomène s’intensifie, l’injustice climatique, elle, demeure. Pendant que les plus vulnérables sont en première ligne, une minorité d’ultra-riches continue d’alimenter ce dérèglement.
Par Maxime Sirvins
Dans l’archipel du Bailique, au Brésil : « Je crois qu’ici, tout va disparaître »
Reportage 3 novembre 2025 abonné·es

Dans l’archipel du Bailique, au Brésil : « Je crois qu’ici, tout va disparaître »

Au nord de Belem où se tient la COP 30, l’archipel du Bailique est en train de disparaître, victime de l’érosion des terres et de la salinisation de l’eau. Une catastrophe environnementale et sociale : les habitant·es désespèrent de pouvoir continuer à habiter leurs terres.
Par Giovanni Simone et Anne Paq
COP 30 : « L’accord de Paris est comme un phare, mais ce n’est pas une baguette magique »
Entretien 3 novembre 2025

COP 30 : « L’accord de Paris est comme un phare, mais ce n’est pas une baguette magique »

Marine Pouget, responsable « gouvernance internationale » pour le Réseau Action Climat, souligne le manque d’ambition des États en matière climatique et appelle à changer le modèle des COP pour aller vers plus de concret.
Par Vanina Delmas
Marie Toussaint : face à la destruction de l’Europe verte, « tenir le coup et se battre »
Entretien 21 octobre 2025

Marie Toussaint : face à la destruction de l’Europe verte, « tenir le coup et se battre »

L’eurodéputée écologiste raconte les coulisses du détricotage en cours du Pacte vert orchestré par la Commission européenne et appelle à une prise de conscience en France.
Par Caroline Baude et William Jean