Le Drian, profiteur de guerres

Ainsi la France s’arrime à l’Arabie saoudite, une stratégie dangereuse.

Pouria Amirshahi  • 11 avril 2018
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Le Drian, profiteur de guerres
© photo : AFP PHOTO / SAUDI ROYAL PALACE / BANDAR AL-JALOUD

Ainsi la France s’arrime à l’Arabie saoudite, l’un des régimes politiques les plus rétrogrades du monde, indirectement lié au terrorisme islamiste et directement impliqué dans la guerre au Yémen, avec ses milliers de victimes civiles. Emmanuel Macron en a reçu en grande pompe le prince héritier, « MBS », alias Mohamed Ben Salmane.

Cette alliance se traduit notamment par des ventes d’armes et légitime une stratégie dangereuse pour la paix et la sécurité du monde : l’alignement sur l’axe Washington-Tel Aviv-Ryad contre l’Iran. Les signes d’un rapprochement inédit entre Israël et l’Arabie saoudite se sont en effet multipliés ces derniers temps, sous parrainage états-unien (partage de renseignements militaires, acceptation de fait de la reconnaissance unilatérale de Jérusalem-capitale d’Israël par Trump, relégation de la Palestine à une question de voisinage, etc.).

Dans ce changement de pied des uns et des autres, toutes les mauvaises fois sont autorisées. Ainsi MBS s’est-il permis d’affirmer lors de sa visite aux États-Unis, la semaine dernière, que l’Iran était responsable du terrorisme international, alors que chacun sait la genèse sunnite d’Al-Qaïda et de Daech. Jean-Yves Le Drian, quant à lui, déclarait le 29 mars, sur RTL, que « le problème au Yémen, c’est que l’Arabie saoudite se sent agressée régulièrement par les houthis, qui sont eux-mêmes fournis en armes par l’Iran », prenant un parti jusque-là interdit.

Or, s’il est légitime de vouloir contenir le rôle de l’Iran au Liban et en Syrie, nous aligner sur les Saoudiens est une faute politique majeure.

Il faut dire que Jean-Yves Le Drian a ses critères à lui, et les ventes d’armes ne sont pas le dernier. Déjà, en 2015, il se félicitait dans le rapport au Parlement sur les exportations d’armes que celles-ci « constituent chaque jour un peu plus des relais de croissance importants pour nos entreprises ». En 2016, lors de ses vœux aux armées, il se réjouissait d’avoir « réalisé le chiffre historique de 17 milliards d’euros d’exportations ». Et annonçait fièrement « un nouveau sommet avec plus de 20 milliards d’euros de prises de commandes » pour l’année suivante. Les clients ? L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis (mais aussi l’Égypte et la Chine, ne boudons pas notre plaisir).

Deux ans plus tard, devenu ministre des Affaires étrangères, l’homme a gardé sa clientèle… et toute sa morgue. Au mépris de la paix et de nos intérêts.

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