Brésil : Un fasciste aux portes du pouvoir

Jair Bolsonaro est arrivé en tête du premier tour, dimanche 7 octobre, avec 46 % de votes.

Patrick Piro  • 10 octobre 2018 abonné·es
Brésil : Un fasciste aux portes du pouvoir
© photo : Mauro PIMENTEL/AFP

La présidentielle brésilienne a basculé dans le pire des scénarios : Jair Bolsonaro, candidat d’extrême droite fascisant (Parti social-libéral, PSL), est arrivé en tête du premier tour, dimanche 7 octobre, avec 46 % de votes, bien au-delà des ultimes projections. Déjà extrême, la polarisation du scrutin s’est donc encore accentuée dans les isoloirs. Elle a aussi profité à Fernando Haddad (Parti des travailleurs, PT, gauche). Adoubé par Lula, il a grimpé en un mois de 4 % à 22 % des intentions, pour finir avec 29,3 % des voix.

La campagne de second tour (28 octobre) s’annonce des plus tendues, nourrie chez les soutiens de l’ex-militaire Bolsonaro par une haine du PT (et de Lula), et par l’exécration du fascisme (racisme, machisme, homophobie, etc.) au sein de la gauche. Bolsonaro, qui a déjà annoncé qu’il ne reconnaîtrait pas le résultat en cas de défaite, accuse le PT de fraudes qui l’auraient privé d’une victoire au premier tour.

La dynamique de ce premier tour est telle qu’elle dément tous les pronostics d’avant le 6 octobre, qui voyaient Bolsonaro battu par n’importe lequel de ses principaux adversaires. D’autant que les deux candidats disposent désormais d’un temps de parole égal lors du programme électoral télévisé. Parti mineur, le PSL était jusque-là très peu audible sur les canaux officiels. Mais Bolsonaro en a-t-il besoin ? L’essentiel de sa propagande électorale, fréquemment nourrie de fausses informations et de dénigrements, passe par les réseaux sociaux.

Les chances de Haddad apparaissent donc réduites. Au nom d’une union sacrée pour « sauver la démocratie », il tentera de mobiliser les abstentionnistes (20,3 %) et, au sein d’une gauche dispersée, les déçus de la gestion PT (sous Lula puis Dilma Rousseff). Ciro Gomes (12,5 %, PDT, gauche) a pris position contre Bolsonaro. Mais Haddad devra aussi entraîner des électeurs de Geraldo Alckmin (4,8 %) dont le parti (PSDB, centre-droit) fut le principal adversaire du PT lors des deux dernières décennies. Et auxquels Bolsonaro a déjà tendu la main.

On votait aussi pour renouveler les députés. À l’échelon fédéral, tous les partis traditionnels sont en recul (gauche, centre, centre-droit). Et même si le groupe PT reste le plus nombreux (53 élus, contre 69 en 2014), il est talonné par le PSL de Bolsonaro, qui explose (52 élus, contre 1 en 2014 !). Au total, 30 partis se partagent 513 sièges, dispersion inédite : quel que soit le nouveau président, la constitution d’une majorité de gouvernement relèvera, plus que jamais, de l’équilibrisme et du clientélisme.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Ambitions internationales et continentales : l’avenir de l’Algérie se joue aujourd’hui
Monde 25 avril 2025

Ambitions internationales et continentales : l’avenir de l’Algérie se joue aujourd’hui

Comment se positionne l’Algérie dans la recomposition du monde ? Comme de nombreux pays européens et africains, avec ses forces et ses faiblesses, l’Algérie cherche sa place.
Par Pablo Pillaud-Vivien
En Cisjordanie occupée, la crainte d’une « nouvelle Nakba »
Reportage 23 avril 2025 abonné·es

En Cisjordanie occupée, la crainte d’une « nouvelle Nakba »

Depuis le début de la guerre, les raids de l’armée israélienne s’intensifient dans le nord du territoire occupé. Dans les camps de réfugiés palestiniens de Jénine et Tulkarem, près de 50 000 personnes ont été poussées hors de leurs maisons, sans possibilité de retour. À Naplouse, les habitants craignent de subir le même sort.
Par Louis Witter
« Israël est passé d’une ethnocratie à une dictature fasciste »
Entretien 23 avril 2025 abonné·es

« Israël est passé d’une ethnocratie à une dictature fasciste »

Le député communiste de la Knesset Ofer Cassif revient sur l’annexion de la Cisjordanie, le génocide à Gaza et l’évolution de la société israélienne.
Par Louis Witter
L’État binational, une idée juive
Analyse 23 avril 2025 abonné·es

L’État binational, une idée juive

L’idée d’un État commun a été défendue dès 1925, par l’organisation Brit Shalom et par des prestigieux penseurs juifs, avant de s’évanouir au profit d’une solution à deux États. Mais cette dernière piste est devenue « impraticable » au regard de la violente colonisation perpétrée à Gaza et dans les territoires palestiniens occupés aujourd’hui. Quelle autre solution reste-t-il ?
Par Denis Sieffert