Ascenseur pour les fachos

Hollande a beaucoup fait pour précipiter le risque d’une arrivée de l’extrême droite au pouvoir.

Sébastien Fontenelle  • 3 avril 2019 abonné·es
Ascenseur pour les fachos
© crédit photo : CHRISTIAN HARTMANN / POOL / AFP

F **rançois Hollande, qui fut président** de la République française entre 2012 et 2017, a fait, dans le quotidien Le Parisien, cette déclaration empreinte de beaucoup de solennité : « La menace vient de l’extrême droite. Je l’affirme, un jour elle arrivera au pouvoir en France […] si l’on ne fait rien. » (Puis de répéter, sur Twitter, avec la même gravité : « Si on ne fait rien, je l’affirme, l’extrême droite arrivera au pouvoir en France. »)

François Hollande a, bien sûr, complètement raison de s’alarmer et d’alerter, car le risque que l’extrême droite arrive effectivement au pouvoir en France est absolument réel, et totalement terrifiant (1).

Mais l’ancien président est un tout petit peu moins convaincant (pour le dire gentiment) quand il déplore qu’« on » ne « [fasse] rien » pour éviter cette catastrophe. Car lui-même, lorsqu’il était aux affaires, a beaucoup fait, non pour l’empêcher, mais pour la précipiter, au contraire – en banalisant la xénophobie dans laquelle cette droite chauvine baratte son beurre électoral.

La place manque, ici, pour énumérer l’ensemble des manquements qui ont été les siens pendant les cinq années de son quinquennat, lorsqu’il a tenu (2) ou laissé tenir par ses ministres (3) des discours et des positions qui étaient autant de concessions à la propagande haineuse du parti raciste. Mais du moins peut-on se rappeler quelques-unes des « confessions » qu’il fit, en 2016, à deux journalistes du Monde (4), et qui furent très logiquement ovationnées par la presse réactionnaire – puisqu’elles entérinaient les pires vilenies de l’extrême droite.

En voici une : « (Ce) qui fait que les gens basculent, ce n’est pas parce qu’ils ont perdu 3 % de pouvoir d’achat – qu’ils n’ont pas perdu d’ailleurs ! – ou parce qu’ils sont chômeurs. Il y a des choses qui les taraudent, ils arrivent dans un train, ils voient des barbus, des gens qui lisent le Coran, des femmes voilées… » Puis une autre : « Je pense qu’il y a trop d’arrivées, d’immigration qui ne devrait pas être là. » Puis une troisième : « Qu’il y ait un problème avec l’islam, c’est vrai. Nul n’en doute. » Puis une dernière : « On ne peut pas continuer à avoir des migrants qui arrivent sans contrôle, dans le contexte en plus des attentats. »

François Hollande, aujourd’hui, panique – du moins l’affirme-t-il – à l’idée que l’extrême droite menace de se hisser jusqu’aux plus hauts pouvoirs ? On peut le comprendre. Mais à relire ses proférations d’il y a trois ans, on se dit qu’il devrait aussi s’effrayer d’avoir tellement aidé à lui construire un ascenseur.

(1) N’en déplaise aux fin·e·s stratèges qui se sont fait une spécialité de nous rabâcher qu’un régime néofasciste ne serait finalement pas bien pire qu’un autre…

(2) Rappelons-nous « l’affaire Leonarda »…

(3) Et en particulier par l’épouvantant Manuel Valls, auteur notamment, lorsqu’il était à l’Intérieur, de l’abjecte profération selon laquelle « les Roms [avaient] vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie »

(4) Qui en firent eux-mêmes un livre, avant de s’attaquer, enhardis par l’exemple de ce débondage présidentiel, à la confection d’un ouvrage dénonçant « l’islamisation » de la Seine-Saint-Denis…

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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