À Bure, « des villages seront à rayer de la carte »
Opposant de longue date à Cigéo, Jean-Pierre Simon relate trois décennies de combat et détaille les dégâts sociaux et environnementaux occasionnés sur le territoire.
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© Amanda Jacquel
Quand on lui demande s’il veut bien être pris en photo, Jean-Pierre Simon joue le jeu et pose fièrement : regard bienveillant derrière ses lunettes, sourire en coin, tête droite et mains sur les hanches. Agriculteur à Cirfontaines-en-Ornois (Haute-Marne), il fait partie des opposants de longue date au projet Cigéo. Né sur ce territoire à la limite du département de la Meuse, il a vite repris la ferme familiale – même s’il aurait préféré « prendre le temps de barouder un peu ». D’abord producteur de lait, il a dû se diversifier avec les céréales il y a une dizaine d’années, pour faire face à la dégringolade des prix. Engagé, il l’est d’abord dans le monde agricole, mais l’industrie du nucléaire a frappé à sa porte. Il l’avait déjà touchée du doigt lors de son service national, en suivant une formation d’officier « nucléaire, biologique et chimique », et en avait alors été convaincu : le nucléaire et son monde sont à l’opposé de sa philosophie de vie.
Comment êtes-vous arrivé dans la lutte antinucléaire ?
Jean-Pierre Simon : Dans les années 1990, le sujet tournait déjà autour de l’emprise des terres, car les compagnies pétrolières et minières sont venues quadriller le territoire pour examiner le sous-sol. La cohabitation n’était déjà pas simple, même si ces sociétés arrosaient financièrement les paysans pour les mettre de leur côté : on voyait les dégâts sur les cultures. À son arrivée, l’Andra (1) ne parlait que de géologie, pas de nucléaire. Nous pensions tous, moi compris, qu’elle