« Les Étoiles » de Simon Falguières : de chair et de papier

Le metteur en scène continue de déployer son vaste univers à la croisée du conte, du réel et de l’épopée. Autour d’un poète en quête de ses mots, ce théâtre fait merveille.

Anaïs Heluin  • 18 janvier 2023 abonné·es
« Les Étoiles » de Simon Falguières : de chair et de papier
© Simon Gosselin

Du 5 janvier au 6 février / Théâtre de la Tempête, Paris.

Le monde de Simon Falguières est à géométrie variable. Avant de présenter au dernier Festival d’Avignon un Nid de cendres de douze heures, il en jouait à Paris au Théâtre de la Tempête une version de six heures. Il en a aussi récemment créé une mouture très courte, d’une heure à peine, que ses douze comédiens interprètent partout, façon théâtre de tréteaux.

Les Étoiles, avec lequel il retrouve la Tempête, a tout pour connaître le même sort. D’abord, il présente une structure similaire. Deux univers s’y côtoient, peuplés de très nombreux personnages dont les vies se déroulent tantôt en parallèle, tantôt dans une porosité que seule permet une scène de théâtre. Fantastiques, merveilleuses pour les unes, plus ordinaires, quotidiennes pour les autres, les aventures du territoire bicéphale de Simon Falguières sont de celles qui ne connaissent pas de fin.

Une passionnante interrogation sur les rapports entre le réel et l’art. (Photo : Simon Gosselin.)

Porté par six acteurs aussi remarquables dans l’art de camper précisément un personnage que dans les moments de métamorphoses qui composent leurs partitions, Les Étoiles commence dans un village aux maisons toutes semblables. Nous sommes devant celle d’Ezra (Charlie Fabert), le jour de l’enterrement de sa mère, Zocha, incarnée par Agnès Sourdillon, dont la capacité à allier fantaisie et gravité fait beaucoup pour la fluidité entre les deux espaces-temps de la pièce.

Trouvailles belles et simples

Car, bien que morte, cette maman formidable a ici une existence bien pleine. Elle vit malgré son absence, comme les dieux mythologiques inventés et fabriqués à base de bave et de papier par son fils, à qui elle a transmis le goût des histoires et celui des mots. Mais les mots, Ezra les perd lorsque Zocha s’éteint. Il part à leur recherche dans son for intérieur, des années durant.

La scénographie d’Emmanuel Clolus, qui tenait déjà ensemble tous les récits du Nid de cendres, accompagne avec des trouvailles belles et simples les allers-retours du monde imaginaire d’Ezra au quotidien de sa maison qui continue sans lui.

Ce rapport artisanal à la matière, aux objets, permet aux Étoiles de toujours briller près de nous. En ramenant sans cesse leurs contes débordants à la réalité du plateau, Simon Falguières et son équipe font du théâtre une passionnante interrogation sur les rapports entre le réel et l’art.

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Théâtre
Temps de lecture : 2 minutes