En Guyane, l’exploitation de la biomasse fait feu de tout bois

Dans sa nouvelle directive sur les énergies renouvelables, le Parlement européen propose de mieux encadrer l’usage du bois. Mais en Guyane, des associations alertent sur une dérogation qui permettrait de poursuivre la destruction de la forêt primaire.

Rose-Amélie Bécel  • 7 février 2023 abonné·es
En Guyane, l’exploitation de la biomasse fait feu de tout bois
La forêt amazonienne, a des capacités d’absorption du CO2 qui doivent impérativement être préservées.
© Emeric Fohlen / NurPhoto via AFP.

Dans l’imaginaire collectif, on associe aux énergies renouvelables l’image des éoliennes et des panneaux solaires. Pourtant, selon la Commission de Bruxelles, 60 % des énergies renouvelables consommées dans l’Union européenne proviennent de la biomasse. L’industrie de l’énergie a fait des substances organiques une matière première, notamment grâce à la combustion du bois, aussi appelée bois énergie.

Brûler des forêts pour se séparer des énergies fossiles, l’idée paraît surréaliste. Alors l’utilisation de ce bois énergie est encadrée par une directive européenne. Depuis 2018, l’énergie produite à partir de biomasse doit répondre à des critères de durabilité pour être considérée comme renouvelable. Ainsi, les arbres issus de forêts primaires ou très riches en biodiversité ne peuvent plus être utilisés pour produire de l’énergie.

Des subventions pour raser les forêts

Un principe de bon sens, certes, mais qui n’empêche pas les industriels de raser d’autres types de forêts, non primaires, pour faire de la biomasse, tout en bénéficiant de fonds européens au titre de la production d’énergies renouvelables.

Martin Pigeon – membre de l’ONG de défense des forêts européennes Fern – estime qu’une distinction doit être faite dans la loi entre la biomasse primaire (le bois coupé dans les forêts pour être immédiatement brûlé) et la biomasse secondaire (les déchets issus d’une première exploitation du bois et brûlés dans un second temps).

Raser les arbres pour les brûler, cela n’arriverait pas s’il n’y avait pas d’incitations financières européennes.

« À l’origine, les industriels qui exploitaient la biomasse le faisaient à partir de déchets de bois, parce que c’est bien moins coûteux que de couper et de transporter des arbres directement depuis les forêts. Raser les arbres pour les brûler, cela n’arriverait pas s’il n’y avait pas d’incitations financières européennes », explique le militant associatif.

Lueur d’espoir pour les défenseurs des forêts : le 14 septembre dernier, le Parlement européen a adopté un projet de révision de la directive sur les énergies renouvelables. Celui-ci propose de ne plus considérer l’exploitation de la biomasse primaire comme une énergie renouvelable, mettant fin au financement européen d’une industrie dévastatrice pour les forêts.

Depuis le 7 février, la directive européenne sur les énergies renouvelables est entrée dans la phase des trilogues : Parlement, Conseil et Commission européenne doivent dialoguer pour parvenir à un projet de texte commun.

Une exception guyanaise

Depuis 2018 et l’interdiction de l’exploitation de la biomasse issue des forêts primaires, les neuf régions européennes ultramarines bénéficient d’une dérogation à ces critères de durabilité, au nom de leur grande dépendance aux énergies fossiles. La Guyane, recouverte à plus de 90 % de forêts primaires, est concernée par cette dérogation.

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Écologie
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